Cameroun : Kribi, côté investisseurs…
Alors que s’engage la construction du port en eau profonde, nombre d’opérateurs affluent dans la région.
Lolabé, à près de 35 km au sud de Kribi. La rumeur des vagues est dominée par le grondement des bulldozers, pelleteuses et camions qui repoussent la forêt littorale camerounaise. Pour l’instant, le chantier du port en eau profonde, l’un des plus importants projets d’équipement lancés au Cameroun, n’est encore qu’une vaste clairière. Vétéran du BTP en Afrique, le français Razel est chargé de réaliser les travaux de terrassement. Dans quelques semaines, China Harbour Engineering Company (CHEC) prendra le relais pour entamer les titanesques travaux d’ingénierie portuaire, dont la construction d’une digue artificielle de près de 3 km pour protéger les futurs bassins de la houle. Dans le même temps, le dragage de 11 millions de m3 permettra d’atteindre la profondeur souhaitée pour le chenal et les darses et fournira le remblai nécessaire pour les terre-pleins.
« Un très bon investissement »
L’ouvrage, d’un coût de 282 milliards de F CFA (près de 430 millions d’euros), sera financé en grande partie par China Exim Bank, qui a consenti un crédit commercial dont la garantie de remboursement repose sur les profits générés par l’activité du complexe portuaire. « Avec un taux de rentabilité estimé à 16 %, c’est un très bon investissement pour eux », explique un expert du ministère camerounais de l’Économie.
Grâce à son port et aux infrastructures en cours de construction dans sa périphérie, Kribi devrait drainer le trafic de marchandises en provenance du Congo, de Centrafrique et du Tchad, et devenir un concurrent direct pour Pointe-Noire (Congo) et Malabo (Guinée équatoriale).
Mais au-delà de la construction du port, c’est un vaste pôle de développement qui s’organise autour de Kribi, notamment dans les secteurs minier et agro-industriel. Avec une température supérieure à 18 °C, un taux d’humidité supérieur à 80 %, plus de 2 000 mm de précipitations par an et cinq heures de soleil par jour, cette région littorale, relativement peu peuplée, est favorable au développement de vastes exploitations d’hévéas, de palmiers à huile, de bananiers, entre autres.
L’agro-industrie en force
Plusieurs opérateurs y sont déjà présents. La société Hévéa du Cameroun (Hevecam) exploite des milliers d’hectares de plantations à Niété, où ses usines transforment le latex en caoutchouc. La Société camerounaise de palmeraies (Socapalm, filiale du groupe Bolloré), qui détient 42 % du marché local de l’huile de palme brute, envisage de rajeunir ses plantations de palmiers, de moderniser ses huileries et de se diversifier en augmentant de 1 500 ha sa surface de culture d’hévéas.
De nouveaux acteurs se positionnent pour s’implanter dans la région. Le plus ambitieux d’entre eux est sans doute le singapourien Biopalm Energy, filiale de Siva Group, qui a lancé le 24 août dernier un projet de 900 milliards de F CFA (1,37 milliard d’euros) d’investissements pour l’exploitation de 200 000 ha de palmeraies réparties entre les localités de Béla (près de Kribi), Lolodorf et Akom II, plus au sud.
… et côté VIP
La cité balnéaire ne séduit pas que les industriels. Ses plages et la forêt qui l’entoure attirent les touristes, illustres ou anonymes.
Des célébrités lui sont attachées, comme l’ex-tennisman et chanteur Yannick Noah, qui a été fait citoyen d’honneur de Kribi en 2005. Il y vient régulièrement et aime arpenter pieds nus ses plages de sable clair, sur lesquelles il a tourné une partie du clip de Saga Africa. Le footballeur Samuel Eto’o a également droit aux honneurs de la cité. Il a acquis 7 ha de terrain à Ebome, à 5 km du centre-ville.
Mémoire et farniente
L’attrait de la station balnéaire pour les vacanciers, illustres ou anonymes, ne se dément pas. Les Camerounais de l’étranger affluent pour s’y reposer ou célébrer des mariages. Les Africains-Américains à la recherche de leurs racines viennent y méditer sur les conditions du départ de leurs ancêtres victimes de la traite négrière. D’autres visitent les vestiges de la colonisation allemande, nombreux dans la région où, chaque mois de mai, le carnaval Mayi commémore le déplacement des populations prises entre le feu allemand et celui des troupes franco-britanniques pendant la Première Guerre mondiale. Tandis que de plus en plus d’écotouristes se laissent envoûter par l’extraordinaire biodiversité du parc national voisin de Campo Ma’an.
Les classes moyennes de Yaoundé aiment aussi se retrouver à Kribi en fin de semaine. La mode est à l’achat de résidences secondaires sur la bande côtière, où la pression foncière croissante fait exploser les prix et le nombre de litiges. On achète aussi des terrains dans l’hinterland, dans un rayon de près de 40 km autour de Kribi, où le charme de la nature encore sauvage attire des people en quête de tranquillité et des expatriés, pour la plupart retraités.G.D
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