Une croissance à durée déterminée ?
Un climat des affaires assaini, davantage d’investissements publics et privés : la reprise se confirme au Togo dans la plupart des secteurs. Les progrès sont modestes, mais semblent durables.
La première préoccupation du gouvernement togolais est de consolider et d’améliorer les 3,7 % de croissance de 2010 ; pour 2011, les prévisions du Fonds monétaire international (FMI) sont encourageantes, en dépit d’un contexte international difficile, avec 3,8 %. Mi-octobre, le chef de l’État, Faure Gnassingbé, a réuni à Blitta (région centrale) son think-tank, baptisé Togo Presidential Investment Advisory Council, afin de réfléchir aux moyens d’améliorer encore l’environnement des affaires. Le secteur privé avait déjà applaudi la baisse de 7 % de l’impôt sur les sociétés en 2009, puis de 3 % en 2010, ainsi que la réduction de 40 % des coûts d’enregistrement en même temps que celle des délais administratifs. Autant de mesures qui ont porté leurs fruits. « Il y a une volonté politique de bien faire, se réjouit le patron d’une compagnie maritime. En tout cas, les investisseurs trouvent des oreilles attentives et des personnes compétentes à la présidence et dans les ministères. Cela permet de surmonter bien des difficultés. »
Le cadre normatif se met progressivement en place. Une charte des PME et PMI a été signée en novembre 2010, qui prévoit une simplification des procédures de financement, la création d’organismes de placements collectifs en valeurs mobilières jouissant d’avantages fiscaux, ou la mise en place d’un fonds de garantie destiné à assurer le remboursement des crédits (à hauteur de 75 % du montant principal du prêt majoré des intérêts). Le gouvernement a par ailleurs adopté, le 19 janvier, le projet de code des investissements, qui sera bientôt soumis à l’Assemblée nationale et comblera le vide laissé par la suspension, en 1996, du précédent texte.
Coup d’accélérateur. L’assainissement des finances publiques est l’autre grand chantier. Grâce aux réformes mises en place, le Togo a atteint le point d’achèvement de l’initiative en faveur des pays pauvres très endettés (PPTE). Le 14 décembre 2010, le FMI et la Banque mondiale ont donc allégé sa dette extérieure de plus de 80 %, soit 1,8 milliard de dollars (1,3 milliard d’euros). Deux jours plus tard, c’était au tour du Club de Paris d’annuler 95 % de la dette du pays envers lui : 203 millions de dollars dans un cadre multilatéral et 404 millions sur la base d’accord bilatéraux. Débarrassé de ce fardeau, l’État peut libérer des ressources pour accélérer les chantiers engagés.
Encore faut-il que ce nouveau départ bénéficie de fondements structurels sains et susceptibles de renforcer la confiance des milieux d’affaires, notamment des PME-PMI fragilisées par le non-paiement des factures par l’administration – un audit engagé en 2008 a ainsi chiffré la dette intérieure, constituée d’arriérés accumulés depuis les années 1990, à 320 milliards de F CFA (488 millions d’euros). Selon le rapport « Perspectives économiques en Afrique 2011 », publié par la Banque africaine de développement (BAD) et l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), la dette intérieure représente 17,9 % du PIB ; les allègements consentis par les créanciers du pays pourraient ramener la dette extérieure à 12,3 % du PIB, limitant ainsi la dette publique totale en valeur actuelle à 30 % du PIB.
En 2010, le secteur primaire a contribué à hauteur de 1,3 % à la croissance. Grâce au soutien des pouvoirs publics aux exploitants, la production vivrière a légèrement progressé (1,1 %) et celle du coton, principale culture de rente, a fortement augmenté (15 %) malgré les faibles précipitations qui ont affecté l’agriculture. Celle-ci reste le pilier de l’économie togolaise (39 % du PIB). Les industries extractives se portent bien ; la production de clinker, notamment, a crû de 14,3 % en 2010. En revanche, celle du phosphate a fléchi, et la rénovation de l’outil de production de la Société nouvelle des phosphates du Togo (SNPT) n’a pas encore eu d’effets majeurs.
Pistes, routes, quais. Participant largement à la croissance, les grands travaux, auxquels l’État a alloué 129,5 milliards de F CFA sur son budget 2011, portent en particulier sur l’extension du réseau routier dans et autour de Lomé et le désenclavement des régions (quelque 50 km de routes ont été bitumés ou réhabilités et plus de 160 km de pistes rurales ont été ouverts en 2010). Sans oublier le retour des investissements privés étrangers, tel celui du groupe français Bolloré Africa Logistics, qui consacre 300 milliards de F CFA à la construction d’un troisième quai au Port autonome de Lomé (PAL). Ces travaux de rénovation et d’extension du terminal à conteneurs permettront de doubler en moins de cinq ans la capacité du PAL, porte d’entrée pour les pays enclavés du Sahel (Mali, Niger, Burkina) et véritable locomotive du secteur tertiaire. Afin de promouvoir sa compétitivité, les autorités ont décidé d’y établir un guichet unique, ce qui permettra également d’augmenter les recettes douanières.
Le commerce a lui aussi renoué avec la croissance, avec une valeur ajoutée de 12,4 % en 2010 (contre – 4,6 % en 2009), celle du secteur tertiaire non marchand augmentant, quant à elle, de 24,6 % en 2010 (contre 7,9 % en 2009), portée par l’essor des services financiers.
On privatise bien les banques
Lancé en 2008, Le processus de privatisation de quatre banques publiques touche à sa fin. Entre août et septembre, treize opérateurs se sont manifestés. Une dizaine d’entre eux seront préqualifiés, avant l’examen des offres financières et techniques, qui doivent aboutir à la privatisation, mi-2012, de l’Union togolaise des banques (UTB, détenue à 100 % par l’État), de la Banque togolaise pour le commerce et l’industrie (BTCI, 83,52 %), de la Banque internationale pour l’Afrique au Togo (BIA Togo, 68,79 %) et de la Banque togolaise pour le développement (BTD, 53 %). Ces établissements, mis en difficulté notamment à cause du non-remboursement des crédits aux filières coton et phosphates, ont été assainis, en collaboration avec la commission bancaire de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA). Les recettes de ces privatisations pour l’État, qui conservera entre 15 % et 26 % des actions, sont estimées « au minimum » à 90 milliards de F CFA (1 37,2 millions d’euros).
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