Tewolde Gebremariam : « Ethiopian Airlines misera de plus en plus sur les économies émergentes »

Avec un chiffre d’affaires et un trafic passagers en hausse de plus de 40 %, le transporteur éthiopien a les moyens de ses ambitions. Aux commandes depuis janvier, le nouveau dirigeant Tewolde Gebremariam détaille sa stratégie.

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© Vincent Fournier pour JA

Publié le 22 novembre 2011 Lecture : 4 minutes.

Jeune Afrique : Quel bilan dressez-vous de votre première année à la tête d’Ethiopian Airlines ?

Tewolde Gebremariam : Avec un brut à 115 dollars le baril en moyenne, l’année a été une succession de défis pour l’ensemble du secteur aérien, et bien évidemment pour Ethiopian Airlines. Mais elle a été aussi une année de croissance record en termes de volumes. Notre chiffre d’affaires et notre trafic passagers ont ainsi progressé chacun de plus de 40 %. Nous avons agrandi notre flotte avec onze nouveaux appareils, dont cinq Boeing B777-200LR.

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Notre bénéfice net a été moindre que l’année précédente en raison de l’augmentation du prix des carburants. Ceux-ci représentent désormais environ 47 % du total de nos coûts. De fait, cette première année à la tête d’Ethiopian Airlines a été difficile, mais nous avons réussi à relever les défis.

Cette année, vous avez commandé plusieurs avions et multiplié les nouvelles destinations. Quelle logique suivez-vous ? Avez-vous apporté une touche personnelle à la stratégie de développement de la compagnie ?

J’ai servi Ethiopian Airlines pendant les vingt-six dernières années, à divers postes et dans différents départements. Je suis passé d’un poste d’agent de services d’aéroport à la position qui est actuellement la mienne. Je ne suis pas un étranger, je suis un pur produit de la compagnie. Et ma mission est de poursuivre la mise en œuvre de notre plan Vision 2025 pour faire en sorte qu’Ethiopian Airlines compte toujours parmi les leaders du transport aérien en Afrique.

Nous ne faisons que suivre notre feuille de route stratégique sur quinze ans, qui doit faire de nous un groupe d’aviation intégré. Outre l’activité passagers, nous allons mettre un accent particulier sur le fret, la formation, le développement du centre de maintenance… Notre plan se fonde sur nos propres prévisions pour l’industrie du transport aérien, la stratégie et la politique économique de notre pays, ainsi que sur les contextes économiques régionaux.

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Dans quelles régions du monde comptez-vous croître le plus au cours des prochaines années ?

Nous allons continuer de nous développer aux États-Unis et en Europe, où nous sommes déjà bien implantés. Mais l’essentiel de notre développement se fera grâce aux liens commerciaux sans cesse croissants entre l’Afrique et les Brics [le club des puissances émergentes, qui rassemble le Brésil, la Russie, l’Inde, la Chine et l’Afrique du Sud, NDLR]. De façon plus générale, nous miserons de plus en plus sur les économies émergentes.

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Quelle place occupe l’activité fret dans votre stratégie ?

Nos ambitions dans l’activité cargo sont grandes. Aujourd’hui, nous disposons déjà du plus grand réseau cargo en Afrique. Cette activité représente environ 16 % de notre revenu total. Nous y consacrons six appareils (deux B747F, deux MD-11F et deux B757F), une capacité que nous complétons avec certains avions de passagers. Nous venons de commander quatre Boeing 777 [un contrat de 1,1 milliard de dollars au prix catalogue] et nous allons aussi investir dans l’expansion du terminal cargo à l’aéroport international de Bole [à Addis-Abeba].

Lufthansa, votre partenaire au sein de Star Alliance, se développe sur le continent. Quelles synergies mettez-vous en place pour éviter de vous retrouver en concurrence ?

Que ce soit avec Lufthansa ou nos autres partenaires de Star Alliance, nous respectons la stratégie africaine de l’alliance. Le partage de code [accord par lequel des compagnies peuvent commercialiser des places à bord d’un vol opéré par un partenaire], par exemple, nous permet de mutualiser de façon avantageuse nos coûts et d’accroître nos revenus.

Près de deux ans après son lancement, que pouvez-vous dire des résultats financiers d’Asky Airlines, que vous détenez à plus de 25 % ?

Asky Airlines construit progressivement une marque forte sur les marchés à vaste potentiel d’Afrique de l’Ouest et d’Afrique centrale. Bien sûr, la marque Ethiopian Airlines l’aide à gagner de bonnes parts de marché. Son trafic passagers et son revenu croissent assez rapidement, et nous espérons qu’elle va atteindre très bientôt la masse critique pour devenir une compagnie rentable.

Ces dernières années, beaucoup de compagnies aériennes ont été lancées en Afrique de l’Ouest et en Afrique centrale. Que pensez-vous de ce phénomène ?

Les régions Afrique de l’Ouest et Afrique centrale sont des blocs économiques en forte croissance et pourtant insuffisamment desservis par le transport aérien. À mon avis, il y a assez de place pour les nouvelles initiatives. Mais le succès dépend du modèle économique, et est conditionné par une gestion saine.

En 2010, Ethiopian Airlines, South African Airways et Egyptair ont annoncé leur intention de créer une nouvelle compagnie en Afrique centrale. Où en est ce projet ?

C’est un projet que les trois compagnies soutiennent, mais il est porté par South African Airways. Les discussions sont toujours en cours avec les gouvernements de la région Cemac [Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale].

Comment voyez-vous l’évolution du trafic passagers sur le continent dans les années à venir ?

L’Afrique est, à mon avis, la prochaine et peut-être la dernière frontière dans le processus de la mondialisation. Les gouvernements, les multinationales, les investisseurs privés, les fonds de capital-risque des États-Unis, d’Europe, d’Inde et de Chine focaliseront leurs investissements sur le continent et ses ressources naturelles inexploitées. L’Afrique possède 60 % des terres arables non cultivées dans le monde. Avant 2015, elle fournira 13 % de la production totale de pétrole. Je vois donc un potentiel énorme de croissance sur le continent. Et Ethiopian fait ce qu’il faut pour en bénéficier au maximum.

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