Les relations Union européenne – Afrique doivent prendre une nouvelle direction
Les relations entre l’Union européenne (UE) et l’Afrique sont à un tournant. Jamais les deux rives de la Méditerranée n’ont été aussi proches depuis l’ère des indépendances.
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Cécile Kyenge
Cécile Kyenge, originaire de RDC, est députée européenne et ancienne ministre italienne de l’Intégration. Elle a été chef de la mission d’observation de l’Union européenne pour les élections au Burkina Faso, en 2015, et membre observatrice de la délégation du Parlement européen pour la présidentielle de 2016 au Gabon.
Publié le 12 avril 2016 Lecture : 3 minutes.
De la tragédie des migrants qui sévit dans le Mare Nostrum à la menace terroriste qui pèse sur nos deux continents, en passant par l’absence de projets politiques ambitieux en mesure de redonner espoir à des millions de jeunes européens et africains, les crises qui associent nos peuples sont aussi nombreuses que complexes. Ce n’est pas un slogan, mais le fruit d’une conviction profonde qui passe par une attention toute particulière que nous prêtons à la démocratie, au respect des droits de l’homme et des citoyens africains, et notamment ceux des jeunes qui aujourd’hui se coalisent et mutualisent leur force de réclamation pour l’instauration d’un ordre démocratique plus juste. Face à eux se dressent des dirigeants politiques qui, au mépris des Constitutions qu’ils font adopter, font tout pour s’accrocher au pouvoir, avec le risque de ruiner l’essor économique du continent africain de ces deux dernières décennies.
Le partage des bénéfices de cet essor est au cœur de notre agenda politique.
L’Europe doit absolument revoir sa stratégie
Pour faire face aux menaces qui pèsent sur les citoyens africains, l’Europe doit absolument revoir sa stratégie. Depuis des années, nous entendons nos institutions annoncées à tout va et avec fierté que « l’Union européenne est le premier donateur mondiale en Afrique ».
Aujourd’hui cela ne suffit plus. L’Europe doit instaurer avec l’Afrique un partenariat politique ambitieux. Nous sommes convaincus que ce dialogue doit être axé sur des défis prioritaires tels que les migrations, la démocratie, la paix, la lutte contre le terrorisme et l’insécurité, la défense des droits de l’homme et de la liberté d’expression, l’accès des femmes et des jeunes au marché du travail, des relations commerciales équitables entre l’UE et l’Afrique, les conflits miniers, etc.
Mais ce dialogue doit être cohérent. Au cours du Sommet UE-Afrique de La Vallette en novembre 2015, la Commission européenne et les États Membres ont lancé un Fonds fiduciaire d’urgence pour lutter contre les causes profondes de l’émigration irrégulière en Afrique. Doté d’un budget de plus de 1,8 milliard d’euros, ce Fonds est destiné à 28 pays africains pour une période de 5 ans (2015-2020).
Mais l’Afrique n’est pas dupe et guigne, pour ne pas pleurer, lorsque qu’un continent riche et prospère de plus de 500 millions d’habitants n’est pas en mesure de redistribuer parmi ses 28 États membres quelque 160 000 de réfugiés
Cette somme peut paraître colossale, mais il n’en est rien ! En effet, quelques mois plus tard, l’UE a signé un accord avec la Turquie pour freiner les flux migratoires vers l’Europe à travers lequel Ankara encaissera 6 milliards d’euros en seulement trois ans ! Mais l’Afrique n’est pas dupe et guigne, pour ne pas pleurer, lorsque qu’un continent riche et prospère de plus de 500 millions d’habitants n’est pas en mesure de redistribuer parmi ses 28 États membres quelque 160 000 de réfugiés. Mais alors quelle leçon pouvons-nous donner à un pays comme l’Éthiopie qui accueille sur son territoire plus de 700 000 réfugiés ?
L’avenir des relations UE-Afrique se jouent aussi dans les commissions parlementaires, les missions d’observation électorales ou dans les résolutions adoptées par le Parlement européen. Lors de nos récentes rencontres avec des représentants de l’Union africaine, nous avons clairement évoqué la nécessité de s’engager ensemble pour le respect des droits et des libertés fondamentaux. C’est l’avenir de la démocratie qui est en jeu, et l’Union africaine ainsi que les organisations régionales du continent en sont les premiers garants. Les jeunes leaders que nous avons accueillis à Bruxelles lors de l’Africa Week organisée cette semaine par le Groupe S&D au Parlement européen ne pourront supporter plus longtemps les caprices de classes politiques corrompues et les vagues de répression qui s’abattent régulièrement sur eux.
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