Centrafrique – Jane Holl Lute : « L’ONU ne peut pas prendre en charge seule tous les cas d’abus sexuels »

Jane Holl Lute vient d’être nommée Coordonnatrice spéciale du Secrétaire général de l’ONU pour l’amélioration de la lutte contre l’exploitation et les atteintes sexuelles. Elle s’est rendue en Centrafrique du 9 au 11 avril. Jeune Afrique l’a rencontrée.

Des soldats mauritaniens embarquent pour la Centrafrique en février 2016 (photo d’illustration). © Ahmed Mohamed/AP/SIPA

Des soldats mauritaniens embarquent pour la Centrafrique en février 2016 (photo d’illustration). © Ahmed Mohamed/AP/SIPA

Publié le 12 avril 2016 Lecture : 2 minutes.

Jeune Afrique : En quoi consiste votre poste, créé suite à la vague d’accusations d’abus sexuels contre des Casques bleus déployés en Centrafrique?

Jane Holl Lute : Mon rôle peut se résumer en une phrase : renforcer de manière mesurable la capacité de l’ONU à prévenir les cas d’abus et à y répondre rapidement. Par « mesurable », je veux dire que l’on pourra juger de mon efficacité au regard de la diminution du nombre de cas d’abus.

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Comment éradiquer, de manière concrète, le problème des abus sexuels par des soldats de maintien de la paix ?

Ce genre de comportements a toujours existé, et existera toujours. En ce qui concerne les opérations de maintien de la paix, il y aura de nouveaux cas. L’objectif sera d’y répondre rapidement. Mais il faut savoir que, souvent, les victimes ne se confient pas aux personnels des Nations unies ou aux autorités, mais à leurs proches ou aux humanitaires. Il est donc irréaliste de s’attendre à ce que l’ONU prenne en charge à elle seule, et le plus rapidement possible, tous les cas d’abus sexuels.

Des organisations de droits de l’homme ont critiqué la manière dont étaient conduites les enquêtes onusiennes jusqu’ici. Par exemple, certaines victimes subissaient des entretiens nombreux et redondants, qui ont pu conduire à leur « retraumatisation ». Allez-vous travailler sur ce point?

Je pense que tout le monde est d’accord là-dessus. Il semble inconcevable de soumettre des victimes présumées à de multiples entretiens. J’ai consulté plusieurs organisations, y compris des experts qui n’appartiennent pas à l’ONU : cela fait partie de mon mandat. Nous avons appris que l’Unicef a un protocole qui répond à ces questions. Nous allons l’examiner.

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Les investigations de l’ONU sont des enquêtes administratives. Leurs conclusions sont-elles recevables par un tribunal dans le cadre d’une enquête criminelle ?

Cela dépend. Il faut savoir qu’en ce qui concerne les militaires, que ce soit à l’ONU, à l’OTAN ou ailleurs, c’est toujours le pays fournisseur de troupes qui garde toute autorité sur eux. C’est à lui de traduire ou non en justice ses troupes incriminées. Il existe trois manières de procéder. Soit le pays d’où est originaire l’accusé procède seul aux investigations, selon ses propres lois et procédures judiciaires. S’il n’en est pas capable, le service d’investigation de l’ONU peut prendre en charge l’enquête. Dans un troisième cas, on procède à une enquête conjointe, mais qui répond aux règles judiciaires du pays fournisseur de troupes.

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