L’après-uranium : aux bons soins d’Areva

Plus de dix ans après l’arrêt de ses activités dans le pays, la Comuf, filiale du leader mondial du secteur, prend ses responsabilités pour assurer le suivi médical de la population et réparer les torts causés à l’environnement.

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Publié le 19 mai 2011 Lecture : 3 minutes.

À Mounana, dans le Haut-Ogooué (Sud-Est), la Compagnie des mines d’uranium de Franceville (Comuf), filiale à 68,4 % du français Areva, a exploité des gisements d’uranium pendant près de quarante ans, jusqu’à la cessation de ses activités, en 1999. Abandonnant 3 000 ex-mineurs aux risques sanitaires liés à leur travail au contact du minerai, et laissant les habitants vivre dans l’angoisse des effets induits par les résidus radioactifs sur la santé et l’environnement. Il aura fallu dix ans et la ténacité d’associations locales, soutenues par diverses ONG, pour que les inquiétudes de cette population soient prises en compte. 

Psychose radioactive

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Non-respect des zones de restriction correspondant aux différents sites de l’usine démantelée, taux de radiation relevés nettement supérieurs à la normale (de 2 à 50 fois) aussi bien en plein air que sur les bâtiments (supermarchés, logements), absence de prise en charge du suivi médical par l’industriel ou par l’État… Après la publication de plusieurs rapports alarmants, la psychose s’est installée.

Celui produit en décembre 2009 par la Commission de recherche et d’information indépendantes sur la radioactivité (Criirad), une association française, révèle des mesures radiamétriques, effectuées en mai 2009, selon lesquelles certaines cités hébergeant les cadres et les ouvriers de la Comuf auraient été construites avec des matériaux radioactifs. Les auteurs du rapport estiment à plus de 2 millions de tonnes la quantité de résidus radioactifs directement déversés dans la rivière. La conclusion souligne que des résidus d’extraction de l’uranium ont contaminé les sols de la forêt environnante et que les déchets radioactifs sont toujours présents dans l’environnement accessible à la population.

Accord

Mis devant ses responsabilités et face à la menace de poursuites judiciaires, en septembre dernier, Areva a réagi et trouvé un accord avec l’État gabonais et le Collectif des anciens travailleurs et miniers de Comuf-Mounana (Catram). Ce texte a notamment abouti à la création, en partenariat avec les ONG Sherpa et Médecins du monde, d’observatoires de la santé chargés d’assurer la surveillance médicale des anciens mineurs et de la population locale.

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Pour mettre en place le dispositif, Areva a fait établir un relevé de toutes les maladies soignées à l’hôpital de Mounana depuis les années 1950 : « Nous avons recensé les gens qui ont été accueillis, les traitements qui ont été prescrits et ce qu’il est advenu de ces patients », explique le docteur Alain Acker, directeur médical d’Areva. Par ailleurs, les équipes des observatoires ont répertorié tous les anciens mineurs encore en vie, soit plus de 1 000 personnes, en indiquant l’exposition à laquelle ils ont été soumis et leur habitat.

« J’étais le 10 avril à Mounana et j’ai pu visiter le site de la Comuf, où d’importants travaux sont réalisés, constate Alexandre Barro Chambrier, le ministre gabonais des Mines, du Pétrole et des Hydrocarbures. On y construit des digues pour canaliser et traiter l’eau, on reconstitue les paysages, on a érigé des observatoires de la santé où l’on pratique une surveillance médicale de la population. » Et de conclure : « C’est vrai qu’on intervient a posteriori et qu’il aurait mieux valu prévoir pour éviter ces dégâts. Mais l’État assume pleinement ses responsabilités. »

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Reste à espérer que, dans le contexte de relance des investissements miniers, il fera bon usage de cette expérience et que, au-delà des études d’impact et des cahiers des charges sur la réhabilitation des sites désormais imposés en amont des projets, l’État exigera des compagnies candidates à l’exploitation de l’uranium sur son territoire qu’elles créent des observatoires de ce type.

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