Abattage des chiens errants au Maroc : des ONG tirent la sonnette d’alarme
Les autorités municipales marocaines abattent et empoisonnent chaque année des milliers de chiens et de chats errants, sous des prétextes sanitaires et sécuritaires. Une pratique qui choque une partie de la société civile, au Maroc et à l’étranger.
Suite à l’indignation causée par de récentes campagnes d’abattage à balles réelles à Salé et à Ksar El Kébir, filmées et partagées sur les réseaux sociaux, la Fondation Brigitte Bardot et l’Association marocaine de défense des animaux et de la nature (Adan) ont été reçues, vendredi 15 avril, à l’ambassade du Maroc à Paris. Objectif : dénoncer de telles opérations et proposer des solutions à la fois moins cruelles et plus durables.
« Je pense que vous ne verrez plus ça », a déclaré Mohamed Adil Embarch, ministre conseiller à l’ambassade du Maroc, qui s’est dit lui-même très choqué par les images qui ont circulé sur les réseaux sociaux. Dans un communiqué publié le 19 avril, la Fondation Brigitte Bardot explique avoir profité de cette rencontre pour évoquer sa collaboration avec la mairie de Rabat et l’association Adan en vue de l’organisation de vastes campagnes de stérilisations et de vaccinations.
Des alternatives efficaces
« En plus de choquer les habitants et traumatiser les plus jeunes, l’abattage ne sert à rien. Cela ne réduit pas le nombre d’animaux dans les rues », a fait valoir Brigitte Auloy, chargée de mission à l’international pour la Fondation Brigitte Bardot, qui rappelle que la situation est la même en Tunisie, en Algérie, en Égypte et dans d’autres pays africains.
La ville de Taghazout, au Maroc, est un exemple probant de l’efficacité de ces campagnes de stérilisation. Grâce au travail de l’association « Le cœur sur la patte », en coordination avec les autorités locales, des chiens y sont castrés pour réduire leur nombre, vaccinés contre la rage et identifiés grâce à une boucle colorée à l’oreille. « Ceci permet d’avoir un autre regard sur l’animal, les gens ont moins peur », explique Michèle Augsburger, fondatrice de l’association, qui espère étendre cette initiative à d’autres villes.
Une poignée d’autres associations et d’activistes au Maroc tentent également par tous les moyens d’interpeller les autorités et changer les mentalités.
Du marathon au crowdfunding
Le 24 avril se tiendra le Marathon Vert d’Agadir, à laquelle participe l’association « Le cœur sur la patte » sous le slogan « Courir pour stériliser, vacciner et stopper l’empoisonnement des chiens des rues ». Pour chaque coureur portant le tee-shirt fourni par le marathon avec un sticker de l’association, des sponsors lui reversent un dirham par kilomètre parcouru. « C’est la première fois que nous sommes aidés par des sponsors marocains », se réjouit Michèle Augsburger.
Cette même association a également créé une campagne de crowdfunding en ligne pour en appeler à la générosité des habitants d’Agadir, et plusieurs pétitions ont été lancées et signées sur internet par des milliers de personnes (vivant surtout à l’étranger) pour mettre fin au « massacre » des animaux errants.
Le 6 mars, une centaine de personnes s’étaient regroupées devant le Parlement à Rabat à l’initiative d’Afaf Harmouch, présidente de l’association de sauvetage des animaux en détresse (ASAD), pour dénoncer ces « actes barbares » et sensibiliser la population.
Des initiatives d’autant plus nécessaires « qu’il ne s’agit pas seulement d’une question d’argent, mais plutôt d’une habitude. Ce sont surtout les mentalités sur lesquelles on doit agir », explique Michèle Augsburger.
Un sujet pris au sérieux par le gouvernement, à la veille de la COP 22
L’excuse financière avancée par les municipalités pour ne pas promouvoir la stérilisation est rejetée par les associations pour la protection des animaux. « Le budget elles l’ont, puisque beaucoup d’argent est déjà dépensé pour du poison, pour les patrouilles de nuit, pour les camions de ramassage, etc », argumente Brigitte Auloy. Pire encore, cette pratique « choquante » peut aussi représenter un danger pour la société, plusieurs cas d’empoisonnement ou d’abattage d’animaux domestiques ayant par exemple été signalés. Qui plus est, « lorsque l’on atteint un niveau d’insensibilité pareil, la maltraitance animale peut aussi se convertir en maltraitance tout court. »
Quoi qu’il en soit, le sujet de la maltraitance animale est pris au sérieux par le gouvernement marocain, à la veille de la COP 22 qui sera accueillie par le royaume en novembre. Vendredi dernier, le ministre conseiller Mohamed Adil Embarch a ainsi clairement insisté sur « l’engagement durable et sincère du Maroc dans la politique de préservation de l’environnement qui englobe, bien entendu, la protection des animaux. »
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