Raffinage: plus de vingt projets dans les tuyaux

Malgré le désintérêt des majors pour la production de carburant sur le continent, le secteur connaît une véritable fièvre d’investissements.

Publié le 20 mai 2009 Lecture : 3 minutes.

Lagos, le 28 avril 2009. En échange de droits d’exploration, la compagnie pétrolière nationale nigériane (NNPC) a conclu un accord avec le géant énergétique indien ONGC Mittal Energy (Omel) pour construire dans le pays une raffinerie, une aciérie et une ligne de chemin de fer. Soit 6 milliards de dollars d’investissement. La veille, c’était à son compatriote privé, le groupe Oando, d’annoncer, étude de faisabilité en poche, la construction d’une raffinerie de 240 000 barils/jour, à Lekki, dans la zone franche de Lagos. Prochaine étape : le tour de table financier.

À l’image du Nigeria, le continent fourmille de projets de raffineries. De l’Algérie à l’Égypte, de l’Ouganda à la Côte d’Ivoire ou du Tchad à l’Afrique du Sud… la construction d’une vingtaine d’installations est à l’étude. Dont une douzaine au sud du Sahara. Même des pays enclavés, petits producteurs de brut, se lancent, comme l’Ouganda et son projet de raffinerie de 60 000 b/j, ou le Tchad (20 000 b/j), avec des investissements viables de 100 à 200 millions de dollars.

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Si ces initiatives ont pour but d’accompagner le développement économique de l’Afrique, elles doivent compléter un maillage de raffineries souvent obsolètes et pallier la fermeture de onze sites au cours de ces dernières années. « On dénombre 36 raffineries en Afrique, elles tournent plus ou moins bien », relève Stanislas Drochon, consultant du cabinet PFC Energy, spécialisé dans l’aval pétrolier. Car si les sites du Maghreb, de Côte d’Ivoire ou d’Afrique du Sud tournent bien, ceux du Sénégal ou du golfe de Guinée sont trop petits, dépassés et peu rentables. Les trois raffineries du Nigeria ont par exemple affiché un taux d’utilisation de 12 % en 2007 et de 25 % en 2008 !

Une tendance au renouvellement et à l’augmentation des capacités qui est imprimée par les États ou les entreprises publiques qu’ils contrôlent, associés de plus en plus souvent à des capitaux indiens, chinois, coréens ou malaisiens. Et à la différence des majors, qui se concentrent, comme l’italien ENI (voir p. 63), dans l’amont (exploration et production) et se désengagent de l’aval pétrolier (raffinage et distribution), des activités bien moins sûres et rentables avec des marges dans le raffinage d’environ 5 dollars le baril. Aujourd’hui, seul Total joue encore sur les deux tableaux.

Mais cette stratégie d’investissements tous azimuts qui était justifiée avec un baril entre 80 et 100 dollars l’est-elle encore lorsqu’il tombe entre 40 et 50 dollars en 2009 ? « Il y a une inflation de projets annoncés. Tous ne verront pas le jour, mêmes les plus gros sont en stand-by », affirme Stanislas Drochon. La forte chute de la consommation depuis la fin 2008 et les difficultés à trouver les sources de financement sont leurs principaux obstacles. « Dans un monde parfait, il faudrait deux à trois mégaraffineries, de 300 000 à 600 000 barils par jour (b/j), implantées sur des marchés locaux de taille importante : une au Nigeria pour approvisionner l’Afrique de l’Ouest, une au Mozambique pour l’est du continent et une autre en Afrique du Sud », explique-t-il.

L’Angola fait cavalier seul

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Mais sur le terrain, les deux projets mastodontes de Kura (Afrique du Sud) et de Lubito (Angola) se livrent une bataille sans merci pour attirer les investisseurs. Porté par le groupe Petronas, Kura devrait raffiner ses premiers barils en 2010, un investissement de 8 à 10 milliards de dollars pour une production de 400 000 b/j. « C’est le projet le moins farfelu. Le gouvernement est derrière et le pays a les moyens de le faire », note-t-il. Quant à Lubito, le projet angolais veut raffiner de 200 000 à 250 000 b/j, un investissement de 6 milliards de dollars. Mais après s’être associée sans succès avec le chinois Sinopec, la Sonangol fait cavalier seul depuis 2007. Les premiers voulaient réexpédier le produit à peine transformé en Chine quand les seconds ont l’objectif de raffiner des produits complexes pour les exporter vers les États-Unis ou l’Europe. Déjà concurrents entre eux, les projets africains souffrent en plus de la redoutable force de frappe des méga-installations côtières indiennes et du Proche-Orient, qui dépassent les 500 000 b/j et alimentent le continent par l’est.

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