Selon le FMI, l’année 2016 restera difficile au Maghreb et au Moyen-Orient
C’est la région couverte par le Fonds monétaire international (FMI) la plus problématique du monde.
De la Mauritanie jusqu’au Kazakhstan et de l’Afghanistan à Djibouti, la chute des cours des matières premières, notamment du pétrole, s’est combinée avec des conflits armés et un terrorisme meurtrier pour casser la croissance économique, tarir les emplois et jeter sur les routes et sur les mers des millions de réfugiés.
S’il salue une certaine résilience, le FMI n’est pas optimiste outre mesure pour les 31 pays concernés où aucun des « printemps » politiques n’a produit beaucoup de fruits. Masood Ahmed, directeur du Département Moyen-Orient et Asie centrale du Fonds, distingue les pays selon leur position par rapport au pétrole.
« Les pays exportateurs net de pétrole vivent un choc énorme, analyse-t-il. Ils ont perdu quelque 400 milliards de dollars en 2015 et vont en perdre encore de 100 à 150 milliards en 2016. Leurs confortables excédents de la décennie passée se sont changés en déficits très importants ».
Leur premier défi est de juguler cette hémorragie. Ils ont donc commencé par tailler dans leurs investissements et avec un certain succès puisqu’un pays comme l’Arabie saoudite a réduit son déficit budgétaire à 90 milliards de dollars en 2015, alors que 120 milliards étaient redoutés. Personne ne sait quand le prix du pétrole remontera et l’ajustement promet d’être de longue haleine, car à 50 dollars par baril (contre environ 45 dollars aujourd’hui), ces pays devraient encore réduire leurs dépenses en moyenne de -18 %.
« Je suis admiratif de leurs efforts, car ils ont augmenté le prix de leur énergie et ils taillent dans leurs dépenses courantes. Mais, il va leur falloir maîtriser aussi leurs dépenses salariales publiques », estime Masood Ahmed.
Le deuxième défi des pays pétroliers est de continuer à se serrer la ceinture, tout en créant des emplois. « D’ici 2021, 10 millions de jeunes arriveront sur leurs marchés de l’emploi, poursuit le responsable du FMI, et si rien ne change dans leur rythme de développement, 3 millions d’entre eux iront grossir la masse de leurs chômeurs. À l’image de ce que tente le prince Mohammed Ibn Salman en Arabie saoudite, il faut changer la structure de leurs économies trop dépendantes des hydrocarbures. Cela suppose de favoriser l’entreprise privée et de faire comprendre aux jeunes que la fonction publique n’est pas la panacée ».
La croissance des pays du Golfe ne dépassera pas 1,8 % cette année (+1,2 % pour l’Arabie saoudite). Seuls l’Irak (+7,2 %) et l’Iran (+4 %) parviendront à accroître leur production d’or noir, l’Algérie tirant son épingle du jeu (+3,4 %) grâce à ses réserves en devises. Les pays en guerre comme la Libye (+2%) et le Yémen (+0,7%) demeureront en récession.
Du mieux pour les importateurs de pétrole
Dans les pays importateurs de pétrole, cela va mieux. La croissance y est supérieure de un à deux points parce que les importations d’énergie sont allégés par l’effondrement du prix du baril et parce que leurs indicateurs macroéconomiques sont stables.
Ils ont réalisé une croissance moyenne de +3 % de 2008 à 2014. Ils vont accélérer à +4 %, selon les calculs du FMI. « Ce n’est pas assez pour créer des emplois solides en nombre suffisant, surtout compte tenu des menaces que vont peser sur eux leurs voisins en conflit, comme en Tunisie où le tourisme a été mis à mal par le terrorisme venu de Libye, explique Masood Ahmed. Les réformes n’y sont pas assez rapides pour inspirer confiance aux investisseurs et, là encore, pour créer les conditions d’un développement du secteur privé seul capable de donner de l’emploi à des millions de jeunes ».
Le peloton de tête comprendra, cette année, Djibouti (+6,5 %), le Pakistan (+4,5 %) et la Mauritanie (+4,1 %). Les moins bien lotis seront le Liban écrasé par la masse de ses réfugiés et l’inertie de son monde politique (+1%), la Tunisie et l’Afghanistan malmenés par les attentats (+2%) et le Maroc où la pluie a fait défaut (+2,3%).
La ceinture demeurera serrée partout, par le biais d’augmentations des taxes sur l’essence et le tabac, de réductions des subventions en tous genres et de limitations des effectifs de la fonction publique. Une inconnue : la capacité des populations déjà pauvres à supporter une telle austérité qui n’est pas partagée par tous…
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