Le déficit marocain se creuse

Rallonge du budget de la caisse de compensation, financement des revendications sociales… Si l’objectif de paix syndicale a été atteint, la facture risque d’être salée dans les mois à venir.

Publié le 27 juillet 2011 Lecture : 3 minutes.

Depuis le début de l’année, le royaume chérifien vit largement au-dessus de ses moyens. La faute à la hausse des cours du pétrole, mais aussi, et surtout, à la prodigalité du gouvernement en ces temps de contestation. Conséquence immédiate sur le plan des finances publiques, l’objectif de 3,5 % de déficit budgétaire prévu par la loi de finances 2011 ne pourra pas être tenu, de l’aveu même d’Abdellatif Jouahri, gouverneur de la Banque centrale, qui table sur un déficit de l’ordre de 5 %. Certains économistes sont encore plus pessimistes et prévoient un déficit supérieur à 6 %. Un trou budgétaire jusque-là en partie limité par des recettes exceptionnelles puisque la cession, en mai, de 20 % de la Banque centrale populaire (BCP), principale banque publique, a rapporté 5,5 milliards de dirhams (477 millions d’euros). Mais ce n’est qu’une goutte d’eau.

Cessions en vue. Déjà, le gouvernement envisage de céder une participation minoritaire (8 %) dans le capital de Maroc Télécom et les rumeurs de privatisation de Royal Air Maroc (RAM) agitent les salons rbatis. Ces recettes pourraient-elles combler le déficit ? Pas sûr, puisqu’elles sont normalement affectées au Fonds Hassan II pour le développement économique et social et non aux recettes du Trésor. Ce ne sont donc pas les revenus de la cession du patrimoine de l’État qui permettront d’honorer la promesse d’employer quelque 4 300 diplômés chômeurs dans la fonction publique ou de financer la revalorisation du traitement de tous les fonctionnaires.

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Le gouvernement a donc sorti l’artillerie lourde. Sous pression, dès la mi-février, le Premier ministre, Abbas El-Fassi, a décidé de rallonger le budget de la caisse de compensation (qui prend en charge les subventions des produits pétroliers et alimentaires de base) de 15 milliards de dirhams (1,3 milliard d’euros), portant à 32 milliards (2,8 milliards d’euros) le total des dépenses de compensation. Un budget qui permet de parer aux besoins urgents en matières premières.

Conséquence de ces dépenses, la balance commerciale du royaume se détériore rapidement. « La situation pour les prochains mois n’est pas à haut risque, rassure l’économiste Fouad Abdelmoumni. Cependant, les tendances lourdes de l’économie sont peu réjouissantes. » Le taux de couverture des importations s’établit aujourd’hui à 48 %. Selon la note de conjoncture de Bank Al-Maghrib parue le 14 juillet, la facture énergétique s’est accrue de 44 % sur les cinq premiers mois de l’année par rapport aux cinq premiers mois de 2010 et, parallèlement, sur la même période, les achats de produits alimentaires se sont envolés de 57 %. Le royaume importe donc deux fois plus qu’il n’exporte, malgré la bonne tenue des ventes de phosphate, en progression de 53,5 % sur les cinq premiers mois de l’année 2011.

« La compétitivité du Maroc par rapport à ses concurrents directs se détériore, en raison notamment d’une pression fiscale excessive », souligne, pour sa part, un industriel. Conséquence, l’investissement productif stagne, avec, depuis dix ans, un rythme annuel moyen de création de 80 000 emplois, alors que 250 000 jeunes arrivent chaque année sur le marché du travail.

Du coup, le gouvernement scrute les recettes de transfert (+ 9,2 % des recettes au titre des voyages), en particulier ceux des Marocains résidant à l’étranger, qui ont bondi de 7,2 % depuis le début de l’année. Un coup de pouce pour la consommation intérieure et un véritable levier de la croissance des dernières années. Sur ce volet, Bank Al-Maghrib vient de relever sa prévision du taux de croissance d’un demi-point, et elle estime que le PIB du pays connaîtra une hausse en 2011, avec une croissance comprise entre 4,5 % et 5,5 %.

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