Villes cruelles

Le 29 avril, un immeuble de six étages s’est effondré dans un quartier de Nairobi, la capitale du Kenya.

Effondrement d’un immeuble à Nairobi © Ben Curtis/AP/SIPA

Effondrement d’un immeuble à Nairobi © Ben Curtis/AP/SIPA

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  • Tshitenge Lubabu M.K.

    Ancien journaliste à Jeune Afrique, spécialiste de la République démocratique du Congo, de l’Afrique centrale et de l’Histoire africaine, Tshitenge Lubabu écrit régulièrement des Post-scriptum depuis son pays natal.

Publié le 19 mai 2016 Lecture : 2 minutes.

Bilan du drame : 49 morts. Ce n’est pas la première fois que cela arrive dans un pays qui, dit-on, est en plein boom immobilier. Les autorités, un trémolo dans la voix, ont vite désigné les coupables : des zigotos, qui s’improvisent promoteurs immobiliers, graissent la patte à des ronds-de-cuir pourris, avant d’ériger des immeubles avec ou sans permis de construire.

Ces promoteurs utilisent des matériaux de mauvaise qualité, recrutent une main-d’œuvre rarement qualifiée, très mal rémunérée, et des architectes de pacotille. Les immeubles sortent de terre à la vitesse de l’éclair, sans aucun contrôle administratif sur la conformité aux normes urbanistiques. Parfois, même quand les travaux ne sont pas complètement achevés, les promoteurs, mus par l’intérêt, n’hésitent pas à mettre en location ces immeubles dangereux.

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Pendant ce temps, les ronds-de-cuir, toujours insatiables, se frottent les mains, en attendant le prochain drame. Le président du Kenya, Uhuru Kenyatta, a juré de châtier les coupables. Si c’était la première fois, on le croirait volontiers. Les morts ? Il n’a pas dit s’il allait les ressusciter.

Partout le laxisme, l’incompétence et la corruption de l’administration sont flagrants.

Le drame de Nairobi en rappelle bien d’autres qui ont eu lieu à Abidjan, Bamako, Casablanca, Diourbel, Fès, Kinshasa, Lagos, Le Caire, Libreville, Ouagadougou… Mêmes causes, mêmes effets. Partout le laxisme, l’incompétence et la corruption de l’administration sont flagrants. Cela dit, il faut aussi se demander combien de gouvernements du continent mènent de vraies politiques d’urbanisation.

Ayant visité des dizaines de villes africaines, j’ai constaté que les responsables soucieux du bien-être des administrés sont rarissimes. La plupart des citadins respirent à pleins poumons les miasmes d’une insalubrité criminelle. Personne ne leur parle de la qualité de l’air, encore moins du niveau de pollution. C’est, sans doute, un luxe pour des populations sous-développées, qui n’ont qu’à vivre cernées par des immondices.

Les robinets restent secs, les ampoules froides.

Que dire de la fourniture d’eau et d’électricité ? C’est un scandale permanent, une atteinte grave aux droits humains. Depuis de longues années, les citadins africains continuent de payer pour ce qui leur est livré de façon plus qu’erratique. D’innombrables communes et quartiers vivent cela au quotidien : les robinets restent secs, les ampoules froides.

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Chaque jour, les gouvernants promettent des lendemains enchanteurs, mais rien ne vient. Pis, là où l’eau et l’électricité se manifestent par miracle, elles sont arbitrairement rationnées, comme si les villes étaient assiégées. Et lorsqu’on s’adresse à ceux qui doivent rendre compte d’une gestion aussi calamiteuse, la rengaine reste la même : « C’est une question de jours, tout va s’arranger ! » Les consommateurs, fatalistes, se remettent à espérer la fin du calvaire. Las, toujours rien !

Les factures d’électricité flambent en Côte d’Ivoire ? Face à la grogne populaire, Alassane Ouattara les revoit à la baisse. L’eau se fait rare à Ouagadougou ? Le gouvernement décide de desservir les quartiers de façon alternative. Des solutions, vous en conviendrez avec moi, bancales. Qui témoignent d’un manque de vision.

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