Sommet d’Abuja : la communauté internationale appelée à en faire plus pour contrer Boko Haram
L’emprise de Boko Haram a reculé autour du lac Tchad mais la communauté internationale doit en faire bien davantage, financièrement et militairement, pour venir à bout du groupe islamiste et aider les populations, dont la situation humanitaire est préoccupante, ont conclu samedi les participants du sommet d’Abuja.
Seul chef d’État non africain présent à ce sommet, le président français François Hollande a appelé samedi à ne pas « baisser la garde » contre Boko Haram, appelant la communauté internationale à faire « davantage » en termes d’aide humanitaire et de développement pour les pays touchés.
« Les résultats sont impressionnants » dans la lutte contre Boko Haram qui « a été amoindri, obligé de reculer », a reconnu M. Hollande, mais « ce groupe terroriste reste néanmoins encore une menace ».
Le sommet s’est refermé avec un communiqué final soulignant que « la défaite de (cette) insurrection ne repose pas seulement sur une solution militaire mais également sur une action gouvernementale de développement en vue d’en éradiquer les causes ».
« Combat d’une génération contre un démon »
Plus tôt, le chef de la diplomatie britannique Philip Hammond avait estimé lui aussi qu’il fallait « beaucoup plus » que des efforts militaires, fussent-ils coordonnés. Les pays de la zone doivent gagner « les cœurs et les âmes de ceux qui sont terrorisés par Boko Haram », car il s’agit du « combat d’une génération contre un démon qui nous détruira tous si nous ne le détruisons pas ».
Même son de cloche chez le secrétaire d’État américain adjoint Antony Blinken, pour qui la « victoire sur le champ de bataille ne suffit pas »: « une approche durable et globale » est indispensable afin qu’on ne reproduise pas les mêmes erreurs et que Boko Haram ne renaisse pas de ses cendres. Il est essentiel de traiter dignement les anciens combattants de Boko Haram, a-t-il dit notamment, en référence aux accusations répétées d’abus commis sur des suspects.
Outre les représentants français, britannique et américain, la réunion a rassemblé onze pays du continent, dont les pays frontaliers du Nigeria (Bénin, Cameroun, Tchad et Niger), et la chef de la diplomatie de l’Union européenne Federica Mogherini.
Au coeur des discussions: comment mettre fin aux exactions des islamistes de Boko Haram qui depuis 2009 ont tué plus de 20.000 personnes dans la région du lac Tchad et contraint plus de 2,6 millions d’habitants à fuir leur foyer.
Le déploiement effectif de la force multinationale mixte (FMM), composée de 8.500 hommes originaires du Nigeria et des pays voisins, mise en place depuis juillet, est resté jusqu’ici très confus. Une meilleure coordination entre les différentes armées est désormais indispensable.
Une situation humanitaire alarmante
« Nous devons appuyer les forces armées du Nigeria et des pays de la région, les aider à être plus efficaces », a souligné M. Hollande.
Depuis l’arrivée de Muhammadu Buhari à la tête du Nigeria, il y a un an, l’armée a multiplié les victoires militaires contre Boko Haram, conduisant le président à annoncer que le groupe islamiste était « techniquement » vaincu. Désormais, Boko Haram « ne tient plus » aucun district administratif dans le nord-est, a-t-il de nouveau assuré samedi.
Pourtant, le groupe rebelle reste puissant et commet régulièrement des attentats meurtriers, tandis que la forêt de Sambisa dans le nord-est demeure son bastion.
Dans une déclaration unanime adoptée vendredi, le Conseil de sécurité de l’ONU s’est « alarmé » des « liens entre Boko Haram et l’Etat islamique ». Il y a un an, le premier a en effet prêté allégeance au second.
Le Conseil de sécurité s’est également alarmé de la situation humanitaire alarmante dans la région du bassin du lac Tchad.
« La principale difficulté à présent est la réhabilitation » des infrastructures détruites, a confirmé samedi le président Buhari, évaluant à 960 millions d’euros l’aide nécessaire au développement de la région.
« Il est indispensable que la communauté internationale fasse davantage aujourd’hui », a appuyé François Hollande en rappelant que « 4,5 millions de personnes sont en situation d’insécurité alimentaire, dont 300.000 enfants ».
Plus tôt, le président français avait fait savoir que Paris allait continuer de soutenir la FMM, à travers de l’assistance, de la formation et du renseignement. La force Barkhane, déployée au Sahel, peut également « intervenir chaque fois qu’il y a un risque terroriste ou une action menée par des groupes », a-t-il ajouté. « Nous sommes là, nous sommes présents et nous allons rester présents. »
M. Hollande a précisé avoir signé avec M. Buhari « une lettre d’intention » en vue d’un accord de défense entre Paris et Abuja.
La France, qui possède une base militaire au Tchad pour sa lutte antiterroriste dans la région du Sahel, est considérée comme un partenaire incontournable entre le Nigeria et ses voisins, tous francophones, et avec qui les relations sont historiquement difficiles.
Le Nigeria a souffert d’un manque de coopération militaire internationale sous les précédentes administrations, son armée étant régulièrement accusée de corruption et de violations des droits de l’Homme.
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