La flexibilité du dirham marocain à l’agenda des discussions avec le FMI

La Banque centrale marocaine et le Fonds monétaire international (FMI) se rencontreront sur le sujet fin mai ou début juin. Les avis sont partagés sur la question. Explications.

Dirham marocain. © Alexandre Dupeyron pour JA

Dirham marocain. © Alexandre Dupeyron pour JA

Publié le 19 mai 2016 Lecture : 3 minutes.

Une délégation du FMI se rendra à Rabat « fin mai ou début juin », a indiqué à Jeune Afrique Abdellatif Jouahri, le gouverneur de la Banque centrale du Maroc. Les deux institutions discuteront de la pertinence de revoir le régime de change semi-flexible instauré par le royaume chérifien depuis les années 80.

Concrètement, le cours du dirham est ancré à un panier de monnaies composé de l’euro et du dollar américain. Ces deux devises, les plus courantes dans les échanges internationaux (le dollar à 80 % sur les marchés de change), sont les plus utilisées par les principaux partenaires commerciaux du Maroc. La valeur du dirham fluctue aujourd’hui dans une bande assez serrée en fonction du cours de ces deux devises.

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Depuis 2015, l’euro pèse 60 % dans le panier de devises auquel est lié le dirham et le dollar américain 40 %, contre 80 % pour euro et 20 % pour le dollar précédemment. La Banque centrale marocaine, Bank Al-Maghrib, garantit cet arrimage en achetant du dirham quand le marché tend à en faire baisser le cours, et en revendant quant à l’inverse son cours tend à monter, de façon à maintenir sa valeur au niveau souhaité.

De fait, la valeur du dirham marocain par rapport à l’euro en particulier est d’une assez remarquable stabilité sur de longues périodes, comme le montre le graphique ci-dessous.

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Le passage à un taux de change plus flexible, où la valeur du dirham dépendrait plus librement de l’offre et de la demande de la monnaie sur le marché de change est en discussion depuis de nombreuses années.

Différents scénarios à l’étude

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Différents scénarios sont envisagés par la Banque centrale marocaine et le FMI.

Soit un élargissement de la bande horizontale qui enserre les valeurs plafond et plancher du dirham : la parité centrale serait maintenue et la banque centrale continuerait d’intervenir si le dirham s’éloigne trop de la parité mais la marge de flottement sera plus importante que celle actuellement en vigueur.

Soit l’adoption d’une bande plus flexible qui évoluerait plus souvent en fonction de la conjoncture. Concrètement, il y aurait alors changement de la parité centrale et le dirham évoluerait en fonction du marché mais avec un contrôle maintenu des autorités qui encadreraient ses fluctuations à une certaine hauteur au-dessus et au-dessous de sa valeur centrale.

Soit laisser filer la valeur du dirham sans aucune bande pour le laisser trouver sa valeur d’équilibre, et éventuellement fixer ensuite une bande autour du niveau d’équilibre une fois qu’il aura été atteint.

Les avantages

Pour Nicolas Blancher, chef de mission au sein du FMI, « l’économie marocaine va bien, que ce soit au niveau de ses équilibres macro ou de son coussin de réserves de change : le pays peut donc procéder à l’introduction d’une plus grande flexibilité du régime de change de manière ordonnée, sans risque majeur de perte de contrôle. »

« Le passage à un taux de change plus flexible permettrait de lier la politique monétaire davantage à l’économie domestique et moins à un ancrage externe. Le pays gagnerait donc en liberté et en indépendance en matière de pilotage de son économie et pourrait aussi absorber les chocs extérieurs en s’y ajustant mieux et en évitant des déséquilibres extérieurs graves », estime-t-il encore.

Les risques

A contrario, « passer à un taux de change flottant représenterait un risque élevé de pression sur la balance des paiements et donc sur les réserves de change », alerte Najib Akesbi, économiste et enseignant à l’Institut agronomique et vétérinaire Hassan II de Rabat.

« Pour l’instant la Banque centrale peut toujours réguler mais si l’on passe à un taux de change flottant, il y aurait baisse de la valeur du dirham et de facto une augmentation du coût des importations. De même de l’impact sur les investissements, chacun peut aisément constater qu’en dépit de toutes les politiques de libéralisation et d’attractivités des IDE menées par le pays depuis bien longtemps, ces derniers évoluent très peu, stagnant bon an mal an depuis plus d’une vingtaine d’année autour de 3 à 3,5 milliards de dollars », analyse l’économiste.

Fin janvier, les réserves de change du Maroc étaient en recul de -25 % sur un an à 229,5 milliards de dirhams, soit l’équivalent de 6 mois et 29 jours d’importations de biens et services. Selon les prévisions de Bank Al-Maghrib, les réserves de change devraient toutefois se renforcer pour assurer la couverture de 7 mois et 21 jours d’importations de biens et services en 2016 et 8 mois et 15 jours en 2017.

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