RD Congo : Moïse Katumbi, que va-t-il faire maintenant ?

Après son inculpation pour atteinte à la sûreté intérieure et extérieure de l’État, Moïse Katumbi, candidat déclaré à la présidentielle en RD Congo, a été autorisé à quitter le territoire national pour suivre des soins médicaux appropriés en Afrique du Sud. Comment compte-t-il rebondir ?

L’opposant congolais Moïse Katumbi à Abidjan, le 21 mars 2016. © Eric Larrayadieu/AFRICA CEO FORUM/JA.

L’opposant congolais Moïse Katumbi à Abidjan, le 21 mars 2016. © Eric Larrayadieu/AFRICA CEO FORUM/JA.

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Publié le 24 mai 2016 Lecture : 4 minutes.

« Pour l’instant, Moïse Katumbi est toujours sous observation médicale à Johannesburg », affirme un proche de l’ancien gouverneur de l’ex-Katanga. À l’en croire, après des examens de santé et une fois rétabli, rien n’empêchera au candidat déclaré à la présidentielle congolaise de quitter l’Afrique du Sud.

Que fera-t-il ? Regagnera-t-il immédiatement la RD Congo le parquet l’a inculpé, jeudi 19 mai, d’atteinte à la sûreté intérieure et extérieure de l’État ou s’envolera-t-il vers d’autres cieux ?

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Katumbi déjà hors course ?

« Peu importe sa décision, le scénario voulu par Kinshasa paraît irréversible : disqualifier de la course à la présidentielle un candidat populaire devenu le principal rival du camp présidentiel », confie à Jeune Afrique un magistrat de la capitale congolaise, qui dit avoir déjà traité des « dossiers similaires et sensibles ».

À l’en croire, il en a été ainsi de plusieurs autres opposants qui se sont retrouvés, avant Moïse Katumbi, dans le collimateur du pouvoir. « En exécutant des instructions venues d’en-haut sans réfléchir, des juges avaient récemment condamné l’ancien député Vano Kiboko, passé à l’opposition, à trois ans de prison alors que les faits infractionnels qui lui étaient reprochés ne pouvaient être punis d’une peine de plus de deux ans », rappelle-t-il.

Ce n’est pas évident de mettre Moïse Katumbi en taule, admet un cadre de la Majorité présidentielle

Dans le cas Katumbi, les choses se sont précipitées. « L’audition a été suspendue le jour où notre client a été agressé par les forces de l’ordre. Le parquet a promis de la reprendre dès qu’il serait rétabli. Nous n’avons donc pas compris pourquoi le même parquet a finalement choisi de l’inculper sans l’entendre de nouveau », explique un avocat de la défense. Puis, au lendemain de son inculpation, l’opposant, soupçonné d’avoir recruté de supposés mercenaires étrangers, a été autorisé à quitter la RD Congo pour aller en Afrique du Sud recevoir des soins médicaux appropriés…

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« Visiblement, ce n’est pas évident de mettre Moïse Katumbi en taule », admet un cadre de la Majorité présidentielle (MP, la coalition au pouvoir). « Le dossier est complexe et divise au sein même de l’entourage du chef de l’État : d’un côté le camp des durs qui veut poursuivre cette affaire jusqu’au bout – position défendue notamment par des responsables de l’Agence nationale de renseignement (ANR) et certains faucons de la MP -, et de l’autre, un camp plus modéré qui considère qu’il est trop risqué d’avoir les États-Unis à dos en cette période préélectorale déjà tendue », explique-t-il.

L’Américain Darryl Lewis enfin devant le parquet

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Arrêtés le 24 avril à Lubumbashi lors du meeting de Katumbi dispersé à coups de gaz lacrymogène et transférés dès le lendemain à Kinshasa, l’Américain Darryl Lewis et trois Congolais (Idi Sefu, Yannick Kabinda et Franck Mwashila) proches de l’opposant sont considérés par les autorités congolaises comme des « mercenaires » au service de l’ancien gouverneur.

Détenus au secret depuis presqu’un mois, « tous les quatre ont été transférés aujourd’hui [24 mai] devant le parquet général de la République où une audition est prévue devant le même magistrat qui a entendu M. Katumbi », a indiqué Me Azarias Ruberwa, l’un des avocats du collectif de la défense. Une « bonne nouvelle, selon cet ancien vice-président de la République, car leur détention était très irrégulière ».

Hormis le citoyen américain, les trois suspects congolais n’ont jamais reçu de visite ni de leurs familles ni de leur conseil. Ce qui fait craindre une « extorsion de faux témoignages pour fabriquer des preuves contre Katumbi », relève un autre avocat du collectif.

Katumbi-Tshisekedi de nouveau à l’ordre du jour

Concernant le dossier principal, des avocats affirment toutefois continuer à travailler pour que l’inculpation de Moïse Katumbi soit retirée. « Contrairement à ce que le porte-parole du gouvernement a indiqué, l’affaire n’est pas passée en phase juridictionnelle, nous continuons à discuter avec le parquet parce que ce dernier n’a pas entendu notre client comme il était prévu », explique Me George Kapimba.

En attendant, Moïse Katumbi est « annoncé dans le courant de la semaine à Bruxelles », selon certaines indiscrétions au sein de l’Union nationale pour la démocratie et le progrès social (UDPS). Une « rencontre autour d’Étienne Tshisekedi [leader historique de l’UDPS] » est en effet en gestation dans la capitale belge. Elle connaîtrait la participation de Katumbi, ou du moins du G7, regroupement politique qui soutient la candidature de Katumbi à la présidentielle. « Les lignes bougent… », souffle un membre de la coalition.

Moïse Katumbi veut toujours rassembler l’opposition

Dans l’entourage de Katumbi, l’on ne confirme pas un imminent tête-à-tête entre ce dernier et Tshisekedi. Ses proches se contentent d’affirmer que des « négociations » sont en cours avec l’UDPS et le G7 pour « harmoniser les vues ». « Mais Moïse Katumbi demeure dans sa droite ligne, celle de rassembler toute l’opposition. Il avait déjà rencontré Étienne Tshisekedi  et d’autres opposants dans cette optique. Naturellement, le G7, allié de Katumbi, s’inscrit aujourd’hui sur la même ligne », explique l’un d’eux.

Pourrait-on envisager de voir Katumbi sur la liste des opposants participant au dialogue politique, convoqué par le président Kabila, que Tshisekedi s’apprête à envoyer au facilitateur Edem Kodjo ? « Ce serait réducteur de résumer les tractations entre l’UDPS et G7 à une histoire de liste alors que les deux parties, malgré leurs différences d’approche, travaillent sur le respect de la Constitution et celui des délais qu’elle impose pour l’organisation des élections, l’alternance démocratique et la nécessité d’avoir une candidature commune de l’opposition », avance-t-on dans l’entourage de Katumbi.

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