Nigeria : Buhari, un an de pouvoir en dix dates
Le 29 mai 2015, Muhammadu Buhari était investi président du Nigeria. « Jeune Afrique » revient sur les dix dates qui ont marqué sa première année au pouvoir.
13 juillet 2015 : tour de vis dans l’armée
Dès son arrivée aux affaires, le président Muhammadu Buhari limoge les trois chefs d’état-major (terre, air, mer) et nomme leurs successeurs en expliquant qu’ils n’étaient pas choisis « pour leurs accointances avec les membres du gouvernement, comme c’était trop souvent le cas par le passé, mais pour leur bonne réputation et leurs qualifications ». Le ton est donné.
20 juillet : la visite à Washington
C’est la première grande visite de Muhammadu Buhari à l’étranger. À l’invitation de Barack Obama, le président nigérian séjourne quatre jours aux États-Unis. Obama salue « sa réputation d’intégrité » et « son agenda […] pour la sécurité et la paix dans son pays ». Washington annonce son intention d’aider Buhari à récupérer l’argent « volé » du pétrole – quelque 20 milliards de dollars (plus de 18 milliards d’euros) entre 2012 et 2014, selon Lamido Sanusi, l’ancien gouverneur de la Banque centrale limogé par l’ex-président Goodluck Jonathan.
2 septembre : sa déclaration de patrimoine
Muhammadu Buhari a tout de suite promis de combattre « le démon de la corruption ». Il montre sa bonne volonté en publiant sa déclaration de patrimoine, quelques semaines après avoir annoncé que le salaire présidentiel serait réduit de moitié. Selon le document, le président nigérian affirme n’avoir que 30 millions de nairas (136 000 euros) sur son compte en banque. Et jure ne posséder ni compte à l’étranger, ni concession pétrolière. Il détient également des parts dans trois sociétés : une usine de fabrication de peinture et deux banques commerciales ; cinq maisons à Abuja et dans les villes nordiques de Kano, Kaduna et Daura, dont il est originaire ; mais aussi des fermes, un verger, un ranch, du bétail et des voitures, dont certaines étaient des cadeaux.
11 novembre : le premier gouvernement
C’est seulement cinq mois après son entrée à Aso Rock, la villa présidentielle d’Abuja, que Muhammadu Buhari forme son premier gouvernement. Trente-six ministres et secrétaires d’État dont sept femmes, issus de chacun des 36 États de la fédération nigériane, sont nommés. Le président conserve le ministère du Pétrole, assisté par Ibe Kachikwu, le patron de la grande compagnie pétrolière publique NNPC. Depuis le 29 mai 2015, il dirigeait le pays accompagné de hauts fonctionnaires secrétaires permanents, laissant la porte ouverte aux accusations d’autocratie.
12-14 décembre : 350 chiites tués par l’armée ?
Selon Amnesty International, l’armée nigériane a délibérément abattu 350 musulmans de la minorité chiite fin 2015 avant d’enterrer leurs corps dans des fosses communes et de détruire les preuves de ce carnage. Ces exactions auraient eu lieu les 12 et 13 décembre, lors d’affrontements à Zaria, fief du Mouvement islamique du Nigeria (IMN), des chiites partisans de l’instauration d’un régime à l’iranienne, dans l’État de Kaduna, dans le nord du Nigeria. Les militaires nigérians sont régulièrement accusés de commettre des bavures meurtrières, notamment dans le cadre de la lutte contre Boko Haram.
24 décembre : la guerre contre Boko Haram »techniquement » gagnée
L’une des déclarations marquantes de ses premiers mois au pouvoir. Ce jour-là, le président du Nigeria affirme que son pays a « techniquement » gagné la guerre contre Boko Haram malgré la menace persistante d’attaques suicides à quelques jours de la fin du délai qu’il s’est lui-même fixé pour vaincre le groupe jihadiste. « Je pense donc que nous avons techniquement remporté la guerre parce que les gens sont en train de regagner leurs quartiers », dit Muhammadu Buhari dans une interview à la BBC.
Février 2016 : les premières critiques
Buhari n’est pas épargné par le contexte morose – baisse des cours du pétrole privant le Nigeria, premier producteur de brut du continent, de sa principale source de revenus et faisant dégringoler à la fois la croissance et la monnaie locale, le naira. Les premières grosses critiques sont formulées après une controverse autour du projet de budget. Lequel culmine a un niveau record de 6 080 milliards de nairas (environ 27 milliards d’euros) pour 2016, soit une augmentation des dépenses publiques de 20%, mais contenant de grosses erreurs.
Les mêmes dépenses de véhicules, ordinateurs et meubles apparaissent à 24 reprises, pour un montant total de 46,5 milliards de nairas, une porte ouverte à la corruption, dénonce ainsi Oluseun Onigbinde, co-fondateur de BudgIT, une organisation nigériane qui oeuvre pour plus de transparence dans l’action publique. Résultat : le projet est retardé, provoquant un début de polémique.
24 mars 2016 : offensive contre la corruption
« Un comité installé pour auditer les contrats passés de 2011 à 2015 par l’Office of the National Security Adviser (ONSA, bureau du conseiller du président sur les questions de sécurité) a mis en inculpation plus de 300 sociétés et personnalités, dont des officiers de l’armée en activité et à la retraite. Sept milliards de nairas (31 millions d’euros) ont été récupérés, et 41 milliards de nairas (180 millions d’euros) doivent encore l’être », annonce la présidence nigériane.
Une des premières mesures fortes du président Buhari dans le cadre de sa lutte contre la corruption avait été de mettre de l’ordre dans l’industrie du pétrole. L’ancienne ministre Diezani Alison-Madueke avait ainsi été arrêtée en octobre à Londres.
3 mai : réconciliation avec le Cameroun
La visite de Paul Biya au Nigeria début mai entérine la réconciliation entamée en juillet à l’occasion du déplacement de Muhammadu Buhari à Yaoundé. « Une nouvelle ère. Dans l’histoire des rapports entre le Nigeria et le Cameroun, il y aura désormais un avant et un après juillet 2015 ». C’est en ces termes que le président camerounais a qualifié l’état des relations entre les deux pays. Un réchauffement important imposé notamment par la nécessité d’une coopération sécuritaire accrue face à Boko Haram.
19 mai : la rescapée de Chibock
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Presque un an après son investiture, cette libération arrive à point nommé. Amina Ali, qui avait 17 ans lors de son enlèvement par Boko Haram il y a plus de deux ans, est la première des 219 lycéennes enlevées par le groupe terroriste à recouvrer la liberté. Elle a été secourue à Baale, près de la ville de Damboa (à 40 km de Chibok), par des soldats et des villageois membres d’une milice d’autodéfense – qui assistent les militaires nigérians dans la lutte contre Boko Haram.
Sur une photographie fournie par l’armée nigériane, on peut voir une jeune femme hébétée, assise sur une chaise en plastique, portant un long hijab de couleur claire, un pagne rose et de simples tongs. Elle porte d’une main un bébé, présenté comme sa fillette de quatre mois, Safiya.
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