L’Afrique (du foot) aux Africains !

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Publié le 9 février 2015 Lecture : 2 minutes.

La 30e Coupe d’Afrique des nations (CAN), qui vient de s’achever à Malabo, illustre, jusqu’à la caricature, un travers grandissant de nos dirigeants politiques : la défiance pleine de mépris à l’égard des techniciens africains. Ces dirigeants, pourtant si prompts à user jusqu’à la corde la fibre nationaliste ou à dénoncer les oukases venus d’Occident quand cela les arrange, raffolent des "sorciers blancs", ces entraîneurs venus d’Europe ou d’Amérique du Sud, payés à prix d’or et placés dans des conditions de confort optimales.

Lors de cette CAN Orange 2015, seules trois sélections étaient dirigées par des Africains : la RD Congo de Florent Ibenge (qui a par ailleurs révélé qu’il n’était pas payé depuis plus de six mois…), l’Afrique du Sud d’Ephraim Mashaba et la Zambie de Honour Janza. Triste record dans l’histoire de cette compétition, car jamais ils n’avaient été aussi peu nombreux. À la tête des treize autres sélections, on recense 6 Français, 2 Portugais, 2 Belges, 1 Allemand, 1 Argentin et 1 Israélien. Qui ne parlent parfois pas la langue que pourraient comprendre leurs joueurs…

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Les techniciens africains seraient-ils à ce point mauvais qu’il faille aller chercher non pas des Mourinho ou des Ancelotti pour diriger nos équipes nationales, mais d’obscurs entraîneurs qui, le plus souvent, ne trouvent guère d’employeurs dans leurs continents respectifs ? Évidemment non, l’histoire fourmille de brillants sélectionneurs locaux qui ont obtenu des résultats : l’Ivoirien Yao Martial, qui offrit aux Éléphants la seule ligne significative de leur palmarès (victoire à la CAN en 1992), l’Égyptien Hassan Shehata (CAN 2006, 2008 et 2010 !), le Ghanéen C.K. Gyamfi (CAN 1963, 1965 et 1982), son compatriote Sellas Tetteh (champion du monde des moins de 20 ans en 2009 !), le Sud-Africain Clive Barker (CAN 1996) ou le Nigérian Stephen Keshi (CAN 2013). Mais aussi Abdelmajid Chetali, qui signa, avec la Tunisie, au Mondial 1978, la première victoire africaine dans l’histoire de la compétition, Rachid Mekhloufi (Algérie, Mondial 1982), dont les protégés baladèrent l’Allemagne fédérale, Luís Oliveira Gonçalves, qui réussit l’exploit de qualifier l’Angola pour le Mondial 2006, Mahmoud al-Gohary (Égypte, Mondial 1990 et vainqueur de la CAN 1998), Abdellah Blinda (Maroc, 1994), Souayah (Tunisie), Onigbinde (Nigeria) et Sono (Afrique du Sud) en Corée et au Japon en 2002, Rabah Saadane (Algérie 1986 et 2010), et tant d’autres.

La question n’est donc pas celle des compétences. D’autant que de très nombreux anciens joueurs africains ont effectué de belles carrières professionnelles dans les meilleurs championnats d’Europe et pourraient désormais faire profiter leurs pays de leur expérience au plus haut niveau. Non, le vrai problème, c’est l’absence de volonté politique. Le patriotisme économique et les grands discours sur l’indépendance du continent, c’est bien. Montrer l’exemple, y compris dans le domaine du sport, c’est mieux.

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