Investissements : le Gabon sort de son « tête-à-tête » avec Paris
Libreville fait jouer la concurrence. Ses nouveaux partenaires sont chinois, turcs, mauriciens, américains… Volage, le Gabon ? Non, réaliste !
On ne peut pas non plus rater le titanesque chantier mené sur le front de mer par China Harbour Engineering Company (CHEC), Champ-Triomphal – Port-Môle, l’un des projets spéciaux du septennat d’Ali Bongo Ondimba : 40 hectares sont en passe d’être gagnés sur la mer pour accueillir une marina ainsi qu’un complexe commercial et culturel.
Coût estimé du projet : 450 millions de dollars (environ 350 millions d’euros), pour une livraison prévue en 2020. Et c’est encore un groupe chinois, Sinohydro, qui construit le barrage de Grand Poubara, dans l’est du pays (300 millions d’euros).
>>>> Libreville ravale son front de mer
Et les entreprises chinoises ne sont pas les seules à disputer aux Français la place prédominante qu’ils occupaient dans l’économie du pays. Le groupe agro-industriel singapourien Olam, arrivé au Gabon en 1999, y a diversifié ses activités et est devenu le partenaire de l’État pour le développement de la zone économique spéciale de Nkok, inaugurée en 2011.
Logements
Début 2013, le conglomérat mauricien Ireland Blyth Ltd (IBL) a signé un accord avec le Fonds gabonais d’investissements stratégiques (FGIS) pour l’essor de la filière pêche, qui s’est déjà concrétisé par la création d’une coentreprise, Tropical Holding, et la remise en état de l’usine de Gabon Seafood. Quant à la construction des premiers lots de logements sociaux d’Angondjé, elle a été confiée à des entreprises turques (Dorce et Afrika Rönesans).
Cerise sur le gâteau, l’Agence nationale des grands travaux (ANGT), maître d’ouvrage délégué chargé depuis 2010 de superviser l’ensemble des principaux chantiers prévus dans le cadre du programme « Gabon émergent », a pour partenaire stratégique l’américain Bechtel, géant de l’ingénierie et du BTP, qui a participé à l’élaboration du Schéma directeur national d’infrastructure.
Frilosité
La nouvelle génération de dirigeants gabonais prône la diversification des partenaires. Elle veut sortir du « tête-à-tête » avec l’ancienne puissance coloniale en ouvrant grand le pays, tout en se défendant d’entraver les intérêts des entreprises françaises. Seul l’attentisme de ces dernières serait en cause. « Au moment où l’économie gabonaise prend son envol avec des perspectives encourageantes, je constate malheureusement que nos partenaires traditionnels, de qui nous aurions attendu plus, marquent le pas. Est-ce par simple prudence ? est-ce par frilosité ? ou par désintérêt ? » s’interrogeait Ali Bongo Ondimba devant les patrons français réunis au siège du Medef en avril 2014.
« Dire que les Français perdent du terrain au Gabon est une présentation erronée de la situation », tempère un conseiller du président.
Les entreprises françaises n’ont semble-t-il pas vu venir ce tournant, pourtant clairement énoncé par le Plan stratégique Gabon émergent (PSGE 2011-2016). Leur volume d’activités a-t-il réellement chuté pour autant ?
« Dire que les Français perdent du terrain au Gabon est une présentation erronée de la situation. Nous assistons à un ajustement, à un retour des choses à leur juste proportion », tempère un conseiller du chef de l’État.
Cette volonté de rééquilibrage ne remet pas en question les positions de groupes bien implantés, tels que le forestier Rougier. C’est aussi le cas de Veolia, dont le partenariat avec la Société d’énergie et d’eau du Gabon (SEEG, dont il a acquis 51 % en 1997 dans le cadre d’un contrat de concession de vingt ans) devrait aller jusqu’à son terme en dépit de désaccords avec le gouvernement.
Par Georges Dougueli, envoyé spécial à Libreville
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