Brexit : les marchés africains se préparent avant la tempête
Les marchés africains n’ont pas échappé au vent d’inquiétude provoqué à l’annonce de la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne. Les autorités se veulent rassurantes, cependant les effets pourraient se faire sentir pendant plusieurs années. « The Africa Report » a fait le point.
Les marchés africains se préparent à affronter la tempête. Il faut dire que le vote des Britanniques en faveur d’une sortie de l’Union européenne a provoqué une onde de choc sur tous les marchés financiers internationaux, et ébranlé la foi de plus d’un dans l’un des projets politiques les plus ambitieux de l’histoire moderne.
Avec la concrétisation du Brexit, la livre sterling a atteint son plus bas niveau depuis plus de 30 ans, et connu une variation record de 10% entre son plus haut et son plus bas niveau sur une seule journée.
Le rendement des obligations du Trésor américain a grimpé sans discontinuer après le vote, selon Bloomberg. L’or, considéré comme une valeur refuge pendant les périodes d’instabilité financière, est monté en flèche.
L’Afrique du sud fortement touchée
Le rand sud-africain est quant à lui tombé à son plus bas niveau depuis 2008, perdant 8% de sa valeur par rapport au dollar et 6,6% par rapport au yen. La bourse de Johannesburg a chuté au moment de l’annonce du Brexit, à son plus bas niveau depuis janvier.
Le marché des changes sud-africain a réagi d’une façon particulièrement brutale à l’annonce du Brexit, selon Razia Khan, économiste en chef pour l’Afrique de la banque Standard Chartered. « Ailleurs la réaction immédiate des marchés a été moins violente », a-t-elle confié à The Africa Report (publication du groupe Jeune Afrique)..
Le président sud-africain Jacob Zuma s’est dit confiant dans la capacité des banques et des institutions financières du pays à résister à toute répercussion du Brexit. « Nous sommes équipés pour faire face aux chocs financiers, nous l’avons déjà montré lors de la crise de 2008-2009 », a-t-il indiqué dans un communiqué émis par la présidence.
Les investissements au Nigeria compromis
Le Nigeria pourrait également faire les frais du Brexit. Les échanges commerciaux entre le Royaume-Uni et la première économie africaine atteignaient 8,3 milliards de dollars l’année dernière, et étaient partis pour s’élever jusqu’à 28 milliards d’ici la fin de la décennie.
À cause du Brexit, les accords commerciaux précédemment passés en conformité avec les directives européennes pourraient être renégociés. En outre, la plupart des spécialistes s’accordent sur le fait que le Brexit devrait faire entrer le Royaume-Uni en récession. Or c’est de là que proviennent la majorité des investissements directs au Nigeria. Plus largement, c’est l’ensemble des investissements en direction du continent africain qui pourraient ralentir.
Des autorités qui se veulent rassurantes
Le ministre des finances du Kenya Henry Rotich a indiqué que son pays se tenait prêt à faire face aux retombées économiques du Brexit, ayant pour cela « suffisamment de ressources sur le marché des changes ». « Nous saurons réagir en cas d’effet collatéral », a-t-il affirmé à l’agence Reuters.
Des projets politiques régionaux en Afrique pourraient avoir à pâtir de la décision des Britanniques de se séparer de l’Union européenne : il est en effet possible d’y voir un message négatif sur l’impossibilité de réunir plusieurs nations dans une seule entité. La Communauté d’Afrique de l’Est (CAE), composée du Burundi, du Kenya, de la Tanzanie, du Rwanda et de l’Ouganda a cependant tenu à réaffirmer sa volonté d’aller vers une union renforcée. « Notre union est plus forte car nous avons tiré des enseignements de notre effondrement [en 1977] », a déclaré son secrétaire général Liberat Mfumukeko, qui a ajouté qu’un projet de constitution serait bientôt proposé.
Le Maroc à la place du Royaume-Uni ?
Au Maroc, des utilisateurs de Twitter préfèrent en plaisanter, suggérant que leur pays pourrait prendre la place laissée vacante par le Royaume-Uni. Cependant le Brexit pourrait compromettre le projet d’intégration du Maroc dans l’UE, selon Nabil Adel, enseignant à la Business School de Casablanca interrogé par le Huffington Post, car il pousse à davantage privilégier les accords bilatéraux, aux dépens des espaces commerciaux multilatéraux.
L’écrivain malawien Levi Kabwato estime pour sa part que le Brexit pourrait avoir de bons côtés, car il affaiblirait le Royaume-Uni et l’Union européenne, deux structures qui ont mis en place des accords commerciaux souvent défavorables aux intérêts africains. Sans parler des courants d’extrême droite européens qui « appellent à ce que les migrants – et beaucoup d’Africains en font partie – se voient refuser l’accès au continent, sans avoir à l’esprit que, dans la plupart des cas, le chaos qu’ils fuient est provoqué par le Royaume-Uni et ses alliés encore plus puissants de l’UE. »
Le Premier ministre britannique David Cameron, qui a annoncé peu de temps après l’annonce du résultat du référendum son intention de quitter le pouvoir avant octobre, restera dans l’histoire comme « le dernier premier ministre du Royaume-Uni », selon l’expression de Zito Kabwe, membre de l’opposition en Tanzanie.
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