Âgé de 68 ans, le gouverneur de l’État de Kogi, au Nigeria, déborde d’amour. Au point d’en distribuer à nombre de femmes légitimes, nombre que même les textes saints avaient hésité à envisager. Alors que Jacob Zuma n’a encore convolé en justes noces qu’avec six épouses, Alhaji Abubakar Audu vient d’épouser sa douzième femme, la prénommée Olivia. Et comme le renouvellement des conjointes répond souvent, comme pour les pick-ups, à la quête d’un "modèle plus récent", l’homme politique a, cette fois, choisi une dulcinée de 14 ans.

Pour faire taire des supputations de mariage à la consommation peu probable, le "jeune" marié a publié une photo où il échange, avec sa nouvelle légitime, un tendre bécot destiné à confirmer l’intimité des amoureux. Une manière d’afficher également le large sourire d’une adolescente manifestement comblée. Mais le cliché est peut-être contre-productif. Non seulement il n’a pas fait taire les commentaires qui, sur les forums, évoquent le nerf de la guerre comme seul moteur de cette love story, mais il a hérissé le poil de ceux qui hurlent à la pédophilie. "L’argent, l’argent, l’argent… et après ?", s’insurge un internaute, non sans avoir comparé le marié bedonnant à toute une série d’animaux de la brousse. Un autre évoque une situation "nauséabonde" et des "parents irresponsables" qui "pour sortir de leur pauvreté, préfèrent sacrifier une ado pleine de futur".

Pas de cliché romantique pour Shekau

C’est clair : les jeunes du continent ne font pas tous l’objet de beaucoup de bienveillance. Dans ce même Nigeria, c’est par grappes que la secte islamiste Boko Haram enlève les lycéennes. Et son leader ne s’embarrasse pas de scrupules. C’est sans cliché romantique qu’Abubakar Shekau aime annoncer, tout de go, qu’il vend les jeunes filles converties, parfois pour une douzaine de dollars. Et si Olivia a potentiellement plus de chance qu’une élève de Chibok, cette élève remerciera elle-même un Seigneur – peut-être pas de son choix – si on ne l’oblige pas à entreprendre une (courte) carrière de kamikaze. Début janvier, c’est une fillette de dix ans que l’on envoyait se faire exploser au marché de Maiduguri.

L’avenir des gamins n’est pas sans nuages, et pas qu’au Nigeria.

Seul espoir pour les bambins : Boko Haram vient d’annoncer qu’on ne rechignera pas à utiliser désormais des chèvres, des vaches et des ânes piégés. La recette du méchoui a bien évolué… Si de nombreuses associations font un travail remarquable pour l’accès des jeunes africains à l’éducation, il n’en reste pas moins que l’avenir des gamins n’est pas sans nuages, et pas seulement celui des petits Nigérians. Les enlèvements et assassinats d’enfants se sont tellement multipliés en Côte d’Ivoire, ces trois derniers mois, que les autorités ont dû procéder, ces derniers jours, à un milliers d’interpellations.

Les malveillances iraient de simples escroqueries de "brouteurs" à des crimes rituels. Dans d’autres contrées, on n’attendrait même pas que l’enfant ait quelques années avant de s’en prendre à lui. Hélas, si le scandale des trafics de bébés défraie la chronique au Niger, le tribunal correctionnel de Niamey vient de se déclarer incompétent pour juger l’affaire. Et même lorsque le secteur de l’éducation essaie de compenser le manque de conscience des sociétés, elle boîte parfois. En Afrique du Sud, c’est le germe de la discorde que vient de semer l’école maternelle "Curro Foundation School" en séparant les enfants par couleur de peau.

________

Par Damien Glez

Follow @DamienGlez

>> Retrouvez ici tous les dessins de Damien Glez