Maroc : pendant le ramadan, les dépenses alimentaires des ménages s’envolent au détriment de l’habillement
Selon une enquête officielle, les Marocains dépensent 37% supplémentaires sur leur panier alimentaire par rapport au reste de l’année. Non sans sacrifice.
C’est désormais connu. Pendant le mois de ramadan, les ménages marocains explosent leur budget. Selon la dernière enquête du Haut commissariat au plan (HCP)*, l’organisme public chargé des statistiques nationales, la dépense de consommation par ménage s’apprécie de 16,3% en moyenne durant le mois sacré. Que ce soit dans les villes ou dans le campagnes, cette hausse est quasiment la même.
Budget alimentation en hausse
Et c’est le budget alimentation qui s’envole le plus : un tiers de plus durant ce ramadan en comparaison avec les autres mois de l’année. Toutes les catégories de la population sont concernées par cette hausse mais elle s’accroît au fur et à mesure qu’on avance dans l’échelle du niveau de vie. Dans les classes démunies, elle est de +22,5%. Et pour les plus aisées, elle est à +40%.
Dans les produits les plus consommés, on trouve les fruits frais dont la dépense ce ramadan a carrément explosé : +163% par rapport au reste de l’année. Il y a aussi le lait et les produits laitiers qui augmentent de +47%, les viandes (+35%) et les céréales (+35%).
Nourrir le peuple, une affaire politique
L’augmentation des dépenses s’explique par une hausse des quantités consommées mais aussi par un effet prix. « L’appréciation de la demande exerce une pression à la hausse sur les prix des produits de consommation », explique le HCP. Il suffit de faire un tour dans les marchés pour constater que les prix affichés sur les étals sont largement supérieurs à ceux enregistrés le reste de l’année. À titre d’exemple, les prix du poisson, des œufs ou des agrumes sont très impactés par le passage du ramadan (respectivement +7,5%, +4% et +3,9%).
Pourtant, à l’occasion de chaque ramadan, le gouvernement marocain rassure sur les prix et la disponibilité des produits alimentaires. C’est une affaire politique, depuis « la révolte du pain » en 1981 à Casablanca. Cette année-là, le gouvernement avait décrété des augmentations brutales des prix des produits de première nécessité, frôlant pour certains les +77%. La population avait investi les rues mais sa colère avait été réprimée dans le sang. Des centaines de morts étaient à déplorer.
Pour bien manger, on sacrifie l’habillement
Pour ce ramadan, les marchés sont bien approvisionnés comme l’affirme le gouvernement mais les produits les plus demandés ne sont pas à la hauteur de toutes les bourses. Les Marocains, tenant coûte que coûte à garnir leurs tables non sans gaspillage, grignotent sur d’autres postes de dépenses. Pour l’essentiel, ils ont tendance à réduire le budget non-alimentaire, essentiellement l’habillement. En revanche, ramadan étant un mois de convivialité et de retrouvailles familiales, ils dépensent 20% de plus en communication et en transport.
Concernant l’incidence de la hausse des dépenses de consommation sur le taux de pauvreté, une enquête du HCP, réalisée en 2014, a montré que cette hausse contribue à l’éradication de la pauvreté alimentaire (0% pendant ramadan contre 0,3% le reste de l’année de personnes souffrant de la faim).
En somme, tout le monde mange à sa faim et le fossé entre les classes sociales, un des grands maux du Maroc, s’en trouve réduit. L’espace d’un mois.
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*L’enquête a été réalisée durant la première semaine du ramadan en comparaison avec le reste de l’année pour dégager une moyenne des dépenses.
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