Gouvernement d’union nationale en Tunisie, ou quand il est urgent d’attendre
Suspense, rebondissements, rivalité de clans, scénario à rallonge… Le feuilleton du gouvernement d’union nationale n’a rien à envier à ceux du petit écran. Mais pour combien de temps encore le pays sera-t-il tenu en haleine ?
Après 33 jours de discussions, Béji Caïd Essebsi se réjouit. La première phase de son initiative est (presque) bouclée, et les participants aux pourparlers se sont (presque) mis d’accord, le 4 juillet, sur les priorités du programme de travail du prochain gouvernement. Presque, car aux dernières nouvelles, l’adoption du document devrait finalement se faire la semaine prochaine, après que de nouvelles demandes de modification ont été formulées.
Face aux critiques et à la crise économique et sociale en Tunisie, le président avait déclaré le 2 juin être favorable à un projet de gouvernement d’union nationale élargi au patronat (Utica) et à la centrale syndicale (UGTT). Avec ou sans l’actuel chef du gouvernement Habib Essid ? Les paris sont ouverts et les spéculations vont bon train en attendant l’issue, plus ou moins proche, de l’intrigue.
Une date butoir après l’autre
Depuis l’annonce de cette initiative présidentielle, les principaux leaders du pays se sont succédé au palais de Carthage, pour des discussions en tête-à-tête ou à plusieurs, ainsi qu’à l’occasion de cinq réunions de concertation officielles. De ces réunions sont ressortis de nouveaux points de discussion et de débat, et donc de nouvelles dates butoirs.
Béji Caïd Essebsi avait, dans un premier temps, jugé indispensable d’arriver à un premier accord avant la fin du mois, puis avant l’Aïd El-Fitr (le 6 juillet), puis finalement d’ici vendredi prochain… Se voulant confiant et rassurant, Rached Ghannouchi, président du parti Ennahdha, a quant à lui déclaré le 29 juin à l’agence TAP que « les parties prenantes aux concertations ont convenu de clore le dossier et d’annoncer le nouveau gouvernement d’ici le 25 juillet prochain. » Entre-temps, la fête de l’Aïd, la « séance unique », (réduction des horaires de travail pendant l’été et le ramadan) et les désaccords risquent de ralentir un peu plus le processus, qui n’en est encore qu’à sa première étape.
Après la signature du document de synthèse relatif à l’établissement des priorités du prochain gouvernement, la suite sera « du ressort des partis politiques », a rappelé Béji Caïd Essebsi à la TAP. Car d’après la Constitution, seule l’Assemblée des représentants du peuple (ARP) peut changer le chef du gouvernement. Encore faudrait-il alors que tout ce beau monde arrive à se mettre d’accord…
Autant d’avis que de partis
Autour de la table du président se trouvent réunis pour fixer les objectifs du projet les principaux représentants des organisations et partis politiques tunisiens, parmi lesquels l’Union générale tunisienne du travail (UGTT), l’Union tunisienne de l’industrie, du commerce et de l’artisanat (UTICA), l’Union tunisienne de l’agriculture et de la pêche (UTAP), le quartet de la coalition au pouvoir (Nidaa Tounes, Ennahdha, l’Union patriotique libre, Afek Tounes) ainsi que des partis de l’opposition. Sans compter le Front populaire, qui a décidé de boycotter les concertations en dénonçant une manœuvre « pour se maintenir au pouvoir ».
Des forces politiques et sociales qui comptent bien faire entendre leurs voix, aussi discordantes soient-elles. D’autant qu’au sein même de Nidaa Tounes, fondé en 2012 par Béji Caïd Essebsi et dirigé par son fils Hafedh Caïd Essebsi, une crise interne fait rage depuis plusieurs mois et entrave les prises de décision unanimes.
Les négociations s’annoncent donc compliquées, chacun lorgnant avidement la plus grosse part du gâteau. « C’est la première fois dans l’histoire de la Tunisie que toutes les sensibilités politiques se réunissent autour d’une même table et font preuve d’altruisme lorsqu’il s’agit de l’intérêt supérieur du pays », s’est néanmoins félicité mardi le président tunisien. Prochaine étape, la composition du gouvernement et la nomination du futur chef du gouvernement. Ou inversement.
Le choix épineux d’un chef du gouvernement
Deux questions se posent quant à ce choix : qui fera partie de ce nouveau gouvernement ? Et sa composition reviendra-t-elle au futur chef du gouvernement, ou aux parties participant aux pourparlers ?
Si aucun nom ne sort du lot pour l’instant, plusieurs ont été avancés, comme ceux d’Ahmed Néjib Chebbi (seul candidat déclaré), de Slim Chaker (dont la candidature est appuyée par Nidaa Tounes, ou, du moins, par Hafedh Caïd Essebsi), ou encore de Mustapha Kamel Nabli (ancien gouverneur de la Banque centrale de Tunisie). L’objectif, ou plutôt le casse-tête : arriver à un consensus entre la coalition gouvernementale et les partenaires sociaux. Tout un programme, qu’il devient urgent d’appliquer.
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