Lutte contre les Shebab : un rapport de Human Rights Watch accuse les forces de sécurité kényanes d’exactions
Dans un rapport publié mercredi, Human Rights Watch accuse les forces de sécurité kényanes d’exactions et d’enlèvement dans le nord-est du Kenya dans le cadre de la lutte contre les Shebab.
Pour éradiquer la menace que représentent les extrémistes somaliens Shebab dans le nord-est du pays, les autorités auraient eu recours à des techniques de contre-terrorisme… pas si éloignées du terrorisme qu’elles sont censées combattre. C’est en tout cas l’accusation portée par Human Rights Watch, qui publie mercredi un rapport documentant les exactions commises par les troupes kényanes ces derniers mois (en anglais).
L’ONG affirme avoir comptabilisé 34 disparitions forcées et 11 exécutions extrajudiciaires ces deux dernières années parmi l’ethnie somali, majoritaire dans cette région du Kenya. Des violences qui viennent s’ajouter à plusieurs autres cas qui ont déjà jeté l’opprobre sur la police locale.
Une politique systématique validée au plus haut sommet de l’État ?
Le rapport décrit comment des gens ont été enlevés chez eux par des hommes masqués et armés, qui ne se sont pas identifiés, ou ont été battus dans les rues avant d’être emmenés dans des véhicules gouvernementaux. Certaines des personnes disparues ont été vues pour la dernière fois sous la garde de policiers ou de militaires. Aucune d’entre elles n’a été inculpée pour un quelconque crime, et leurs familles n’ont jamais été en mesure de retrouver leur trace, selon le rapport.
Le directeur exécutif de Human Rights Watch, Ken Roth a ajouté que les cas révélés par son organisation n’étaient « que la partie visible de l’iceberg », avant d’ajouter que « rafler les gens et ensuite refuser de dire ce qu’ils sont devenus est un crime grave qui ne fait qu’accroître la peur et la défiance à l’encontre des forces de sécurité. » Le directeur a conclu en insistant sur l’implication de toute la hiérarchie dans ces mauvais traitements, remontant jusqu’au « plus haut sommet de l’État ».
la réponse de la police
La police kényane a réagi en reconnaissant que ces accusations étaient très graves et en demandant à ce qu’elles soient soumises à l’organe chargé de superviser la police et de s’assurer qu’elle agit dans le respect du droit. « Je sais qu’ils ne nous ferons pas confiance pour enquêter nous-mêmes, et c’est pour ça que nous disons qu’ils devraient donner toutes leurs informations à l’IPOA (Autorité indépendante de supervision de la police, ndlr), qui est un organisme indépendant chargé d’enquêter sur les excès de la police », a rétorqué le porte-parole de la police, Charles Owino.
Risque de radicalisation
Autre enjeu majeur du dossier, le risque de radicalisation de la population. En effet, les défenseurs des droits de l’homme et des universitaires mettent en garde contre le risque pour le gouvernement de se mettre à dos et de perdre le soutien des populations locales avec ces méthodes brutales. Qui pourraient in fine grossir les rangs des Shebab, déjà auteurs des attentats de Nairobi en 2013 (67 morts) et Garissa en 2015 (148 morts).
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