Passeport africain : pourquoi le sujet vous passionne
La semaine dernière, Jeune Afrique a publié une vidéo expliquant le projet de passeport africain lancé par l’Union africaine. Une publication qui a fait beaucoup de bruit : plus de 50 000 vues en moins de deux jours sur Facebook et des commentaires provenant de tout le continent. Pourquoi autant d’engouement chez les lecteurs de JA ? Décryptage.
Le débat est passionné. Sur Facebook, les idéalistes s’indignent : « Laissez-nous rêver », commente Lamine Diouf. « Excellente idée », ajoute Abdelaziz Nafouki… D’autres, plus sceptiques, trouvent comme notre lecteur James Kauli que le projet fait « trop de bruit pour rien », tandis que Ramadan Souleymane déplore qu’on mette « la charrue avant les bœufs ».
Le passeport commun de l’Union africaine, vieille idée qui a commencé à se concrétiser par la remise de deux exemplaires à Idriss Déby Itno et Paul Kagame, lors du 27e sommet de l’UA, divise.
Franchir sans entraves les frontières héritées du colonialisme
« Qu’il serait bon et plaisant de voir l’unification de tous les Africains », chantait Bob Marley en 1979… Presque quarante ans plus tard, le souhait du roi du reggae ne semble pas si chimérique : s’il était mis en place, le passeport de l’UA permettrait la libre circulation dans tous les pays du continent. Un tel document a donc tout d’un symbole, une lueur inespérée ravivant la flamme dormante du panafricanisme tel que conçu par ceux qui, de Kwame Nkrumah à Sékou Touré, ont osé rêver d’unité pour l’Afrique.
C’est pour cela que le sujet suscite autant l’intérêt : avec cette initiative, l’UA a l’audace de se tourner vers un horizon qu’on ne se risquait plus à envisager. Les Africains libres de parcourir leur continent, franchissant sans entraves les frontières héritées pour la plupart du colonialisme… L’idée est séduisante, et ceux qui la soutiennent voient en elle la promesse qu’un jour la solidarité et l’identité africaine pourront supplanter les divisions politiques et les velléités individuelles, au-delà des contraintes économiques, des limites institutionnelles et des conflits inter-ethniques.
On ne peut cependant pas ignorer les réalités auxquelles se heurtent les aspirations de l’UA aujourd’hui. Nombreux sont les lecteurs de JA qui ont le sentiment qu’avec ce projet, « on se trompe de priorités », tel Elhadj Diako qui s’est exprimé sur Facebook le 18 juillet. Vous avez été beaucoup à souligner que le passeport ne peut représenter à lui tout seul une panacée pour l’unité du continent. Au lendemain de la crise d’Ebola, à l’heure de Boko Haram et autres terroristes Shebab, où la gouvernance peine à s’affranchir de la corruption, force est de constater que la libre circulation est, à ce jour, inapplicable.
Un passeport africain ne pourra en effet voir le jour que si les conditions sont réunies pour assurer une unification stable et durable du continent. Avant d’envisager la libre circulation, il s’agirait d’aborder les questions de l’intégration économique et commerciale, de solidifier les capacités institutionnelles et administratives à l’échelle des pays, et d’assurer une plus grande coopération sur le plan sécuritaire.
Comme l’a souligné Sow Alpha en réponse à notre vidéo, réaliser ce projet « en fanfare sans un fond solide ne fera que feu de paille ». Le chemin sera long, mais en attendant de se voir remettre le fameux document à la couverture rouge, rien ne nous empêche de rêver au son des hymnes panafricains de Miriam Makeba et de Fela Kuti…
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