Nigeria : quatre points clés pour comprendre les enjeux d’un éventuel report des élections

C’est une petite phrase prononcée le 22 janvier par le conseiller national à la sécurité du Nigeria lors d’une conférence à Londres qui relance le débat sur un éventuel report des élections. Cette question divise la classe politique nigériane.  

Le président Jonathan lors de l’élection présidentielle d’avril 2011. © Pius Utomi Ekpei / AFP

Le président Jonathan lors de l’élection présidentielle d’avril 2011. © Pius Utomi Ekpei / AFP

ProfilAuteur_EdmondDalmeida

Publié le 23 janvier 2015 Lecture : 3 minutes.

Que dit la loi nigériane ?

La Constitution adoptée en 1999 et les textes législatifs qui l’ont complétée fixent le cadre réglementaire des élections au Nigeria. Ainsi, le scrutin devrait se tenir au plus tôt 150 jours avant la fin du mandat de l’exécutif et au plus tard dans les 30 jours suivant son expiration – soit le 28 juin 2015 au plus tard. C’est donc en respect de cette prescription légale que l’Independent National Electoral Commission (INEC) avait publié le 24 janvier 2014 un calendrier détaillant les opérations et qui fixait les élections au 14 février 2015. Il ne s’agirait donc que d’un report légal de quatre mois maximum.

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Pourquoi reporter ?

Le People’s Democratic Party (PDP) du président Jonathan, à travers la voix de Sambo Dasuki, conseiller national à la sécurité, demande un report du scrutin présidentiel. Selon lui, trente millions de cartes d’électeurs n’ont toujours pas été distribuées et il serait judicieux de reporter les échéances jusqu’à leur distribution complète. Le conseiller appuie son propos sur le fait qu’une telle solution serait "conforme à la loi" et constituerait un acte prudent pour toute la classe politique du pays.

Le Congrès progressiste (APC), principal parti d’opposition, s’insurge contre ces velléités de report et en appelle à la communauté internationale pour pousser le président Jonathan à laisser organiser les élections le 14 février. Dans un communiqué, le parti de Muhammadu Buhari, principal challenger de Jonathan, indique que camp du président sortant "a la certitude que, si le scrutin n’est pas reporté, il ne pourra pas le remporter".

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À qui pourrait bénéficier un un report des élections ?

On pourrait croire qu’un report bénéficierait à Goodluck Jonathan, mais dans les faits, l’équation paraît plus difficile à résoudre.

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Dans le contexte sécuritaire actuel, il est incertain que le scrutin puisse se tenir dans les régions de l’extrême Nord, quotidiennement en proie aux attaques sanglantes des islamistes de Boko Haram. Une situation qui pourrait pénaliser directement le candidat de l’opposition, musulman, originaire du Nord (Katsina), au profit du président sortant, issu du Sud chrétien plus stable.

Mais, en même temps, pour avoir dirigé le pays entre 1983 et 1985 et surtout en raison de son passé de militaire, Muhammadu Buhari dispose de solides soutiens dans tout le pays qui estiment qu’il serait plus compétent pour régler la question sécuritaire.

Chercher à gagner du temps pour reprendre la main et améliorer son image. Telle pourrait être la stratégie de Goodluck Jonathan qui a visité Maiduguri (Nord) le 15 janvier pour la première fois en deux ans, où il tente de reprendre la mains. Quelques récentes attaques de Boko Haram y ont été repoussées.

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Quelles sont les réactions de la communauté internationale ?

La communauté internationale reste pour le moment très mesurée sur l’épineuse question du report des élections au Nigeria.

Le département d’État américain a plaidé il y a quelques jours pour la tenue des élections présidentielle et législatives le 14 février, en dépit des violences terrifiantes perpétrées par Boko Haram. "Nous pensons que les élections sont probablement un facteur" de la violence dans le nord-est du Nigeria, mais "nous estimons que les élections doivent toujours avoir lieu, même face à cette violence terrifiante", a indiqué Marie Harf, porte-parole du département d’État.

Quatorze candidats se présentent à la présidentielle du 14 février, dont l’actuel chef de l’État Goodluck Jonathan et l’ex-président Muhammadu Buhari.

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