Craintes au Nigeria à l’approche d’une opération militaire dans le Delta du Niger

Dans le Delta du Niger, coeur de la production pétrolière du Nigeria, la population s’inquiète du déploiement d’une force spéciale de l’armée pour mater une nouvelle rébellion qui attaque plateformes et gazoducs.

Dans le Delta du Niger la population s’inquiète du déploiement d’une force spéciale de l’armée pour mater une nouvelle rébellion. © AFP

Dans le Delta du Niger la population s’inquiète du déploiement d’une force spéciale de l’armée pour mater une nouvelle rébellion. © AFP

Publié le 29 juillet 2016 Lecture : 3 minutes.

En annonçant ce déploiement cette semaine, l’armée nigériane a demandé aux habitants de la région de « ne pas paniquer » s’ils croisent des mouvements inhabituels de troupes, ainsi que de « lourds attirails militaires ».

« Le but de cet exercice est d’entraîner nos forces spéciales et d’autres unités de l’armée nigériane à mener des opérations amphibies dans des environnements riverains », a indiqué l’armée qui dit aussi vouloir cibler les « criminels, les auteurs de kidnappings, les rebelles et les pirates » actifs dans cette région constellée de criques et de marécages.

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Mais pour de nombreux leaders communautaires de cette immense zone pétrolifère, d’où la première économie africaine tire la quasi-totalité de ses revenus, user de la force ne pourrait être qu’une menace contre les populations et aggraver le conflit avec les Vengeurs du Delta du Niger (NDA), rébellion active depuis le début de l’année.

Les NDA ont attaqué des installations pétrolières des compagnies étrangères comme Shell, Chevron, Exxon, Eni et Total, mais aussi du groupe public nigérian NNPC, ce qui fait tomber la production, alors que les cours du brut chutent sur les marchés mondiaux, mettant en difficulté les finances de l’Etat.

Résultat, la devise nationale, le naira, a reculé face au dollar et l’inflation s’est mise à galoper pour atteindre un sommet en 11 ans dans ce géant d’environ 180 millions d’habitants qui doit importer une grande partie de ses produits de consommation.

Les forces nigérianes, qui combattent les djihadistes de Boko Haram dans le nord-est, n’ont pas mené d’opérations militaires dans le Delta du Niger depuis 2009, année de la mise en oeuvre d’un programme d’amnistie avec l’ancienne rébellion du Mouvement pour l’émancipation du delta du Niger (MEND) qui prévoyait notamment la reconversion de rebelles dans le secteur pétrolier.

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Mais l’annonce par les autorités de la fin de ce programme d’amnistie pour 2018 a étrangement coïncidé avec de nouvelles attaques, cette fois menée sous la bannière des Vengeurs du Delta du Niger, un groupe méconnu qui dit militer pour la sécession de cette région pétrolifère stratégique.

Des drones armés ?

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Vendredi, les NDA se sont moqués de l’armée nigériane qui a annoncé vouloir utiliser de nouvelles technologies contre les rebelles récalcitrants si ceux-ci continuaient de refuser l’offre d’un dialogue de paix.

« Monsieur le Président, vous pouvez acheter tous les drones que vous voulez en Europe ou aux Etats-Unis, mais cela n’empêchera pas les Vengeurs du Delta du Niger de mettre l’économie du Nigeria à terre », ont prévenu les rebelles dans un communiqué.

« Le pire que vous puissiez faire est de tuer de pauvres innocents, ce à quoi l’armée excelle. Mais sachez une chose: l’économie nigériane va souffrir », ont ajouté les rebelles qui suggèrent pouvoir encore gagner en popularité dans leurs fiefs si l’armée faisait des victimes au sein de la population civile.

Seriake Dickson, le gouverneur de la province de Bayelsa, épicentre des attaques de ces rebelles sécessionnistes, a d’ailleurs mis en garde cette semaine le président nigérian Muhammadu Buhari contre l’usage de la force dans sa région, car les civils risquent de payer un lourd tribut.

Plus tôt cette année, le gouvernement avait dépêché des soldats dans le delta du Niger afin de traquer « Tompolo », l’ancien leader des rebelles du MEND aujourd’hui en cavale alors qu’il est poursuivi pour corruption et blanchiment d’argent. Tompolo a d’ailleurs nié être l’éminence grise du NDA, groupe qui serait selon ce scénario une réincarnation du MEND.

Chose certaine, à la suite de cette intervention ciblée de militaires dans le delta du Niger, des habitants avaient accusé les soldats d’abus, de viols et de destructions de maisons. Bref, rien pour calmer le jeu dans cette région clé pour le développement du pays africain le plus peuplé.

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