Deux ans après l’opération Serval, où en est l’armée malienne ?
Le 11 janvier 2013, l’armée française intervenait au Mali pour aider les militaires maliens à défendre leur territoire face à l’assaut des groupes jihadistes vers le sud du pays. Deux ans plus tard, l’armée malienne est-elle sur la bonne voie ? « Jeune Afrique » fait le point.
Quels sont les effectifs de l’armée malienne ?
Au 1er janvier 2015, l’armée malienne comptait entre 8 000 et 8 200 soldats. Parmi eux, environ 3 400 ont suivi le programme de formation militaire d’EUTM Mali, la mission de formation de l’Union européenne. Lancé en janvier 2013, dans la foulée du déclenchement de l’opération Serval, ce programme a pour but de renforcer les capacités militaires, tactiques, et déontologiques des Forces armées du Mali (Fama).
Cinq bataillons, d’environ 700 soldats et quatre-vingt véhicules chacun, ont déjà été formés au camp de Koulikoro, près de Bamako. Ils sont actuellement déployés sur le théâtre d’opérations. Un sixième bataillon est en cours de formation et deux autres doivent être entrainés d’ici la fin du second mandat d’EUTM, en mai 2016.
Où est-elle positionnée ?
Depuis la débâcle de Kidal consécutive à la visite de l’ex-Premier ministre Moussa Mara, en mai 2014, l’armée malienne a difficilement repris pied dans le Nord du pays. Selon plusieurs sources militaires, les soldats maliens sont essentiellement positionnés le long de boucle du Niger, avec un centre de commandement opérationnel basé à Gao. Ils sont en revanche absents de la plupart des "points chauds" de l’extrême-nord du pays, tels Kidal, Aguelhok, ou la région de Taoudenni. Seule une poignée de Fama sont présents à Tessalit, aux côtés de militaires français déployés dans le cadre de l’opération Barkhane.
Principales positions de l’armée malienne dans le nord du Mali.
Des pertes régulières
Depuis la fin de l’opération Serval, l’armée malienne continue régulièrement d’affronter les groupes rebelles ou jihadistes présents dans le nord du pays, subissant parfois d’importantes pertes humaines et matérielles. Le début d’année 2015 a ainsi été particulièrement meurtrier dans les rangs des Fama.
Le 5 janvier, un groupe de jihadistes probablement membres d’Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) a attaqué le camp militaire de Nampala, au nord-ouest de Mopti, près de la frontière avec la Mauritanie. Le bilan est très lourd : onze soldats maliens sont tués, c’est l’une des pires attaques contre l’armée depuis six mois. Une dizaine de jours plus tard, le 16 janvier, un nouveau raid de jihadistes a lieu dans la même région, ciblant cette fois la localité de Ténenkou. Trois soldats y perdent la vie.
Le recours aux milices
En août 2014, quelques semaines après la défaite de l’armée malienne à Kidal, est officiellement créé le Groupe autodéfense touareg Imghad et alliés (Gatia), dirigé par Fahad Ag Almahmoud. Opposée à toute forme d’autonomie dans le Nord du Mali, cette milice progouvernementale est composée d’Imghad, une tribu touarègue rivale des Ifoghas, qui sont à la tête des principaux groupes rebelles tels le Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA) ou le Haut conseil pour l’unité de l’Azawad (HCUA).
Le Gatia s’allie rapidement aux autres groupes loyaux aux autorités maliennes, comme le Mouvement arabe de l’Azawad (MAA) "pro-Bamako" ou la Coordination des mouvements et Front patriotique de résistance (CM-FPR). Depuis la fin de l’année 2014, les accrochages se multiplient entre milices pro-gouvernementales et groupes rebelles dans les régions de Tabankort et d’Anéfis, près de Kidal. Selon plusieurs observateurs, les militaires maliens, incapables de tenir leurs positions, s’appuieraient désormais sur le Gatia pour affaiblir les groupes rebelles. Un célèbre officier Imghad de l’armée, le général El Hadj Ag Gamou, est ainsi fortement suspecté d’être le vrai patron de cette milice.
La corruption toujours présente
Trois ans après le début de la crise malienne, l’état d’esprit de certains militaires et de leurs dirigeants prête le flanc aux critiques. Les problèmes de corruption sont encore bien présents et entachent la réputation de l’ensemble de l’institution militaire, du soldat de première classe au sommet du ministère de la Défense. Outre des problèmes de vol de matériel, certains commandants de bataillons ont par exemple parfois tendance à pas déclarer les soldats tués ou ceux qui ont déserté pour continuer à toucher leurs salaires.
Pourtant, le principal scandale de ces derniers mois ne concerne pas directement les hommes de rang ou leurs officiers mais les responsables du ministère de la Défense et du gouvernement, épinglés pour l’achat de l’avion présidentiel et plusieurs contrats d’armement surfacturés. Ces "anomalies" financières, se chiffrant en dizaines de milliards de francs CFA, ont valu au Mali une suspension temporaire des aides budgétaires de ses bailleurs internationaux, au premier rang desquels le Fonds monétaire international.
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Benjamin Roger
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