Pierre Nacoulma : « Les nouvelles taxes ne reflètent pas le modèle économique voulu par le Burkina »

La ligue des consommateurs du Burkina Faso a manifesté son opposition aux nouvelles taxes instaurées par l’État dans la loi de finances rectificative 2016 adoptée fin juillet par le Parlement. Selon le président de l’association, interviewé par « Jeune Afrique », cette mesure va peser sur les classes les plus pauvres.

Chaîne de production de l’entreprise Brakina à Ouagadougou, le 10 juin 2010. © Renaud VAN DER MEEREN pour Les Editons du Jaguar

Chaîne de production de l’entreprise Brakina à Ouagadougou, le 10 juin 2010. © Renaud VAN DER MEEREN pour Les Editons du Jaguar

Publié le 4 août 2016 Lecture : 3 minutes.

Afin de combler le besoin de financement du budget de l’État après une période d’austérité, les parlementaires burkinabè ont voté une série de taxes sur les boissons et bières, les jeux de hasard et casinos ainsi que les propriétés bâties et non bâties. La taxe sur les boissons et la bière passera ainsi de 25 à 30 % au mois de septembre. Un impôt de 0,1 % sera perçu sur la valeur des propriétés bâties ou non bâties de même qu’un prélèvement de 0,2 % sur la valeur des terrains nus.

Des mesures qui, selon le gouvernement, devraient permettre d’augmenter les ressources propres. Mais la ligue des consommateurs ne l’entend pas de cette oreille. Le président de l’association, Pierre Nacoulma, préconise plutôt un impôt sur la fortune car, estime-t-il, le gouvernement ne s’est pas attaqué aux bonnes personnes.

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Jeune Afrique : Pourquoi la Ligue des consommateurs est-elle opposée à la nouvelle taxation de l’État ?

Pierre Nacoulma : Nous estimons que ces nouvelles taxes devraient refléter le modèle économique que le gouvernement dit vouloir pour le Burkina Faso. Ce que l’on ne perçoit pas toujours dans les décisions qui sont prises. Avec ces nouvelles mesures, il est évident que ce sont les plus démunis qui vont encore saigner. Ce qui, naturellement, ne peut être cautionné par la Ligue des consommateurs.

Avec ces mesures les couches les plus démunies vont se tourner vers les boissons frelatées

Le gouvernement affirme que cette hausse était nécessaire et aurait déjà dû être réalisée. Que répondez-vous ?

Les produits ciblés ne sont pas les mieux indiqués. Il serait plus utile de taxer  les boissons de luxe, car il faut aller chercher l’argent là où il s’en trouve le plus. Or nous pressentons que les taxes sur la bière sont davantage susceptibles de créer des problèmes que d’en résoudre. Les couches de la société les plus démunies vont se tourner vers les boissons frelatées et des problèmes de santé peuvent en découler.

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Auriez-vous souhaité être associés à cette décision ?

Il ne s’agit pas de cela. Nous attirons simplement l’attention du gouvernement sur le fait que cette décision ne reflète pas le modèle économique dans lequel le nouveau Burkina devrait s’engager. C’est notre rôle de tirer la sonnette sur les probables conséquences de telles mesures.

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N’est-il pas normal de taxer des gens qui ont par exemple plusieurs propriétés ?

Nous ne parlons pas ici d’imposition sur la fortune, mais des terrains nus. Ceux qui ont les moyens de construire ne laissent pas leurs terrains nus, ils les mettent en valeur. Ceux qui font de la spéculation foncière se dessaisissent généralement des biens moyennant argent. Alors que fait-on ? La solution serait plutôt de taxer les fortunes : plus on est fortuné, plus on devrait contribuer au trésor public pour soulager les pauvres. Il est beaucoup plus facile pour les riches de payer.

De quelle façon comptez-vous amener le gouvernement à prendre en compte vos préoccupations ?

Nous ne rejetons pas tout ce que le gouvernement a proposé mais nous souhaitons qu’il aille plus loin afin que chacun contribue en fonction de ses ressources. Nous allons attendre pour voir la forme que prendront ces mesures qui doivent entrer en vigueur au mois de septembre. Et en temps opportun, nous entreprendrons les concertations nécessaires avec les personnes indiquées pour que l’intérêt du plus grand nombre soit pris en compte.

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