C.A.N. : Coupe de l’Apathie Nationale…
Si la déprime de nouvelle année engourdit les employés dans des bureaux qui tournent au ralenti, l’événement qui la console ne contribue pas à « booster » l’efficacité professionnelle. Chut ! la Coupe d’Afrique des Nations vaut bien une pause…
Vous avez introduit, en 2014, un dossier administratif qui s’est enlisé dans les méandres calendaires des fêtes de fin d’année ? Pris à la gorge par les délais de procédures qui requièrent le précieux document, vous comptez finaliser l’opération avec des employés de bureau gonflés à bloc par les bonnes résolutions de la nouvelle année ? Si vous avez de la chance, la secrétaire qui a oublié votre requête entre le panier "Courrier arrivée" et le panier "Courrier départ", ne sera pas absente, déjà revenue du village où l’on commémorait l’anniversaire du septième jour du décès du second époux de la sœur de son père. Si vous avez de la chance, le coursier chargé de déplacer votre dossier visé du rez-de-chaussée à l’étage des signatures n’aura pas été réquisitionné par son supérieur hiérarchique pour fixer des porte-savons rosâtres dans la villa de son troisième "bureau". Si vous avez de la chance, le responsable habilité à signer votre Saint Graal ne sera pas parti, dès 9h10, à la pause "brochette" de 10h.
Mais on n’a jamais de chance en janvier…
En ce premier mois de l’année sévit la "janviose", cette épidémie de dèche post-festivités qui engourdit la motivation professionnelle, tant le salaire de la fin du mois est déjà consommé en crédits informels. En 2015, l’aigreur de début d’année n’est consolée – ou du moins distraite – que par un seul évènement, le même qui compromet tout règlement administratif prompt : la Coupe d’Afrique des nations du "sport roi".
Car si la CAN change les idées de la secrétaire, du coursier ou du "parapheur", elle les détourne encore davantage de leur devoir professionnel. Ne venez pas trop tôt dans les services, surtout dans ces pays où le froid sahélien anesthésie l’ardeur jusqu’en milieu de matinée. Ne venez pas trop tard car l’heure du début de l’après-midi de travail est à peu près celle à laquelle il faut quitter le bureau pour être bien assis devant le premier match de la soirée. Un écran de télévision attire les supporters de foot aussi sûrement qu’un lampadaire les éphémères. En termes d’horaires exploitables pour un administré en quête de document, les fenêtres de tir sont si étroites qu’elles deviennent dérisoires, surtout si la requête suppose l’intervention successive de plusieurs employés. Et ne comptez guère sur la hiérarchie pyramidale pour mettre les points sur les "i" et les fonctionnaires sur leur chaise.
Dans la grande tradition du "panem et circenses" (du pain et des jeux), hypnotiser les grognons permet de chasser momentanément les revendications syndicales. Il ne vous reste alors que deux solutions : céder comme les autres aux sirènes du roi football et rejeter aux calendes équato-guinéennes votre impératif administratif ou déposer un cierge à la cathédrale du coin. Un cierge pour exprimer au Seigneur votre souhait de voir votre équipe nationale rapidement éliminée, au milieu de dizaines de cierges destinés à lui garantir une place en finale…
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Par Damien Glez
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