France : décès de Marc Riboud, photographe de l’indépendance algérienne
Grande figure de la photographie humaniste, l’ancien résistant s’est éteint mardi 30 août des suites d’une longue maladie, à l’âge de 93 ans.
Il photographiait la liberté. Les Algériens le savent, qui connaissent cette image d’une jeune femme exprimant toute la joie de l’Indépendance, en 1962, le corps jaillissant par la fenêtre arrière d’une voiture, un drapeau à la main et un sourire irradiant de bonheur sur son visage.
Marc Riboud, qui photographia la liesse incroyable de juillet 1962, vient de s’éteindre à l’âge de 93 ans. Il aurait dû mourir bien plus tôt, dans le maquis du Vercors, où il combattit dans la Résistance à l’âge de 20 ans et où l’occupant nazi massacra plus de 800 personnes en juillet 1944, militaires comme civils. Issu d’une famille bourgeoise de Lyon, Marc Riboud survivra au massacre, mais il ne pourra jamais réintégrer la routine d’un quotidien tout tracé.
S’il intègre Centrale en 1945, ce n’est pas pour finir comme ses frères qui seront respectivement patron de la banque Schlumberger et de l’entreprise Danone… Lui préfère s’accrocher à l’appareil photo Vest Pocket de la firme Kodak offert par son père en 1936.
La rencontre avec Henri Cartier-Bresson, favorisée par son frère, marquera le tournant décisif de sa vie. À moins que ce ne soit cette longue grimpette dans l’escalier de la tour Eiffel qui lui permet de photographier le peintre Zazou en équilibre au-dessus de Paris, son mouvement gracieux contrastant avec les dures lignes géométriques de la Dame de fer ? Les deux, sans doute, contribueront à lancer sa longue carrière : accueilli à l’agence Magnum, Marc Riboud place sa photo de Zazou dans Life Magazine. Une consécration pour le jeune homme de 30 ans.
Indépendance en Algérie, paix au Vietnam
Une consécration qui n’est pourtant qu’un début : désormais, il parcourra le monde pour le raconter à sa manière, en noir et blanc et avec un constant souci d’humanité. Formaté par Cartier-Bresson, il s’en émancipe peu à peu, au cours de voyages qui l’emmènent de la Yougoslavie à l’Angleterre, de la Turquie à la Chine, de l’Algérie à l’Alaska.
Ses travaux les plus connus concernent l’Asie, même si une image éclipse presque toutes les autres : celle de cette jeune femme tendant une fleur face à une armée de baïonnettes, à l’occasion d’une manifestation pour la paix au Vietnam en 1967. Peu importe, puisque cette image même incarne le regard fraternel que Riboud pouvait porter sur les peuples, au Vietnam comme en Algérie, en Afrique du Sud comme en Pologne.
De lui, son ami l’éditorialiste du Nouvel Observateur Jean Daniel écrivait dans Polka Magazine qu’il avait « une sensibilité de poète de la quotidienneté et d’historien de l’intime ». Demeure en paix, artiste pacifiste.
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