Marche « Je suis Charlie » : les couacs des présidents africains

Absents ou présents, les dirigeants africains ont, à leur manière, fait l’actualité de la manifestation parisienne en mémoire des victimes de « Charlie Hebdo »…

Les larmes de Boni Yayi n’ont pas convaincu tout le monde… © Damien Glez / J.A.

Les larmes de Boni Yayi n’ont pas convaincu tout le monde… © Damien Glez / J.A.

Publié le 15 janvier 2015 Lecture : 2 minutes.

Mis à jour le 19/01 à 11h10.

Dimanche, alors que les rues de Paris ne désemplissaient pas du flot des millions de "Charlie", l’unanimité d’une légitime sensiblerie n’était pas encore fissurée que déjà des doigts quittaient la direction des jihadistes pour pointer des responsables africains présents dans les cortèges. En direct sur des chaînes publiques françaises, un rescapé de la tuerie de Charlie Hebdo, le journaliste Laurent Léger, indiquait que "voir défiler Ali Bongo Ondimba" ne pouvait pas lui faire du bien.

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Plus méticuleuse, l’organisation Reporters Sans Frontières se fendait, ce même dimanche, d’une comptabilité de chefs d’État et de gouvernement qui avaient l’impudence de fouler le bitume parisien, tout en respectant insuffisamment la liberté de la presse chez eux. "Nous devons nous montrer solidaires de ‘Charlie’ sans oublier tous les Charlie du monde", déclarait Christophe Deloire, le secrétaire général de RSF. Dans son viseur : le même indésirable président gabonais, mais aussi Ramtane Lamamra, ministre algérien des Affaires étrangères, Sameh Choukry, ministre des Affaires étrangères d’Égypte ou encore Boni Yayi, président du Bénin. L’émotion démonstrative de ce dernier – des larmes publiques et un jour de deuil national – a été à la hauteur des critiques à son égard. Et pas seulement de la part d’activistes européens…

>> Voir "Charlie Hebdo : Nos crayons contre leurs kalach, par Damien Glez"

Des organes de presse africains rappelaient qu’au Bénin, des journalistes du Béninois libéré ou de L’indépendant, avaient été condamnés à des peines de prison pour offense à un chef de l’État. Et ce n’est pas tout. Les piques sont aussi venues de l’entourage d’homologues de ces présidents marcheurs. Bien entendu, les présidences nigérianes et camerounaises ont dénoncé la tuerie de Paris comme un attentat odieux. Mais, dans les rues, on rappelle que le Cameroun et le Nigeria ont perdu, en dix ans, plus de 10 000 citoyens à cause du terrorisme, essentiellement à cause de Boko Haram. On susurre que certains élus africains préféraient une marche parisienne en mondovision à un soutien de proximité.

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Il est vrai que le groupe islamiste d’Abubakar Shekau continue sa "croisade" morbide, débordant de plus en plus au Cameroun, notamment depuis des frappes aériennes organisées depuis le pays de Paul Biya. Il sème la terreur, faisant des victimes par milliers, mais suscitant curieusement des réactions timides. Timides, en Occident, depuis l’essoufflement de la campagne "people" "Bring Back Our Girls". Et timide en Afrique.

>> Voir l’hommage des "caricaturisques" africains à Charlie Hebdo

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"Charlie" est-il indifférent au sort des victimes africaines du terrorisme ? Certainement pas. Dans sa livraison des "survivants", ce 14 janvier, l’hebdo satirique évoque Boko Haram. Mais comme il ne prise pas la sensiblerie, il se fend d’un dessin, signé Foolz, qui représente des jihadistes devant un village nigérian incendié. L’un des agresseurs, kalachnikov à la main, déclare : "2000 abonnés que Charlie n’aura pas"…

Décompressons par un rire intelligent. Et comprenons Yayi Boni. Peut-être avait-il d’autres rendez-vous à Paris…

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Par Damien Glez

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