Algérie : « Vote off », un documentaire sur la présidentielle de 2014 censuré
Un document qui raconte le vécu d’une jeunesse algérienne désabusée et abstentionniste au moment du scrutin présidentiel qui a maintenu Abdelaziz Bouteflika au pouvoir. Mais les autorités algériennes ont interdit sa projection aux Rencontres de Béjaïa pour « atteinte au symbole et à la souveraineté de l’État ».
Vote off, un documentaire sur la présidentielle de 2014 en Algérie, ne sortira pas en Algérie, jeudi 8 septembre, comme prévu. Les autorités algériennes l’ont censuré. Programmé dans le cadre des Rencontres cinématographiques de la ville de Béjaïa, il met en scène les espoirs et les déceptions des Algériens lors de ce scrutin qui a porté Abdelaziz Bouteflika au pouvoir pour un quatrième mandat.
Le samedi 3 septembre, 48 heures avant le début de ces Rencontres, les organisateurs ont été surpris de découvrir que le film n’a pas obtenu l’autorisation de projection. Sans justification aucune. Une première en 13 ans de festival. « J’ai introduit un recours auprès de la commission de visionnage des films, qui relève du ministère de la Culture, mais je n’ai eu aucune réponse », déclare à Jeune Afrique Abdenour Hochiche, président de l’association Project’heurs qui organise ce festival. « Pourtant, il s’agit d’une radioscopie d’un moment politique sans parti pris aucun », poursuit-il.
En 2011, les autorités algériennes ont institué une loi en vertu de laquelle le ministère de la Culture exige « un visa culturel » pour tout film programmé dans une manifestation artistique.
Sur son site web, le ministère de la Culture algérien a affirmé que la commission de visionnage des films, composée d’experts et de professionnels du cinéma, est la seule habilitée à fournir les autorisations de tournage et de projection et qu’elle a délibéré favorablement sur 23 films à part Vote Off qui « comporte des contenus portant atteinte au symbole de l’État et à sa souveraineté ».
Un peuple en quête de changement
Vote Off, un documentaire à 100% algérien, est un voyage électoral où se côtoient le doute, la peur et l’espoir des Algériens. Le réalisateur, Fayçal Hammoum, a suivi une jeunesse qui a la trentaine et qui n’a jamais voté pour comprendre les raisons de son boycott et ses impressions sur les élections. Il n’a pas parlé du président Bouteflika mais du climat politique délétère dans lequel vivent les Algériens, fatigués d’attendre le changement.
Sur la page Facebook de son documentaire, le jeune réalisateur s’est dit « indigné » par cette censure. « Au delà des parcours individuels de mes personnages, j’ai aussi fait ce film pour une raison simple et sans doute un peu naïve : je veux croire que l’Algérie peut et doit devenir aussi démocratique que possible. Interdire un film, c’est avouer que rien ne changera ! », écrit-il, ajoutant: « On peut toujours enterrer un film mais jamais la parole et encore moins la pensée des hommes ! ».
La liberté artistique en jeu
Ce 8 septembre, à la place du documentaire censuré, les organisateurs des Rencontres cinématographiques de Béjaïa ont programmé un débat sur la liberté de création en Algérie, en présence du réalisateur et du producteur (Thala Films). Histoire de dire « non » à la censure.
La Matinale.
Chaque matin, recevez les 10 informations clés de l’actualité africaine.
Consultez notre politique de gestion des données personnelles
Les plus lus – Culture
- Algérie : Lotfi Double Kanon provoque à nouveau les autorités avec son clip « Ammi...
- Stevie Wonder, Idris Elba, Ludacris… Quand les stars retournent à leurs racines af...
- RDC : Fally Ipupa ou Ferre Gola, qui est le vrai roi de la rumba ?
- En RDC, les lampions du festival Amani éteints avant d’être allumés
- Bantous : la quête des origines