Robert Beugré Mambé : « Tout le monde revient à Abidjan pour faire des affaires »
Rénovation des routes, développement des réseaux d’eau et d’électricité… Le gouverneur du district d’Abidjan évoque les grands chantiers qui devraient rendre la cité plus viable et attractive.
Abidjan, le retour
La capitale économique ivoirienne commence à se remettre des longues années de crise politique. Les chantiers sont lancés pour qu’Abidjan redevienne le centre névralgique de l’Afrique de l’Ouest.
Sorti vice-major de l’École nationale supérieure des travaux publics en 1976, Robert Beugré Mambé a poursuivi sa formation d’ingénieur au Centre des hautes études de la construction, à Paris, avant d’intégrer le Bureau central des études techniques à Abidjan. On peut dire que l’homme maîtrise les questions d’aménagement. Après avoir quitté la présidence de la Commission électorale indépendante début 2010, l’ancien ingénieur des travaux publics a été nommé gouverneur du district autonome d’Abidjan le 4 mai 2011.
Depuis, l’objectif principal de Robert Beugré Mambé, 62 ans, est de faire de la capitale économique ivoirienne la vitrine de l’Afrique de l’Ouest sur l’Atlantique. Il a ainsi mis en oeuvre un plan de développement articulé autour de projets prioritaires dont le montant s’élève à plus de 2 milliards d’euros. Pour réunir les investissements requis par les différents chantiers – et pas seulement les plus grands ni les plus visibles -, le gouverneur reçoit beaucoup et sillonne, aussi, les métropoles et collectivités du monde entier, notamment dans le cadre de l’Association internationale des maires francophones (AIMF), dont il est vice-président.
Jeune Afrique : Quels sont les principaux axes du plan de développement 2013-2015 ?
Robert Beugré Mambé : Nous avons de grands projets d’investissement à moyen et long termes. Ceux-ci nécessitent de lourds financements. Sur le court terme, nous avons donc amorcé le programme de développement 2013-2015 du district qui porte sur six points : les routes, l’électricité, l’adduction d’eau, l’assainissement, la réhabilitation des écoles primaires et la lutte contre la pauvreté, avec la création de richesses et la construction d’équipements structurants, en particulier des hôpitaux multifonctions.
En accord avec le chef d’État et avec le conseil de district, nous avons décidé de bitumer les routes et d’ouvrir de nouvelles voies d’accès pour améliorer la circulation. L’électrification des villages occupe elle aussi une place importante dans notre programme, puisque l’accès à l’énergie est à la base du développement. Des travaux sont donc en cours pour faciliter la connexion au réseau électrique. Cela s’applique également à l’eau, car beaucoup de maladies sont liées à la mauvaise qualité de celle-ci. Nous comptons donc développer l’accès de nos populations à l’eau potable, mais aussi leur assurer de vivre dans un environnement sain. C’est pourquoi nous avons engagé de grands travaux d’assainissement. Pendant la saison des pluies, l’eau de ruissellement envahit les rues, les cours et même les maisons… Tout cela ne sera bientôt plus qu’un mauvais souvenir.
Que comptez-vous faire en matière de logement ?
Avec les transports et l’aménagement des espaces publics, le logement est un souci constant pour le district. Comment faire alors pour que les habitants aient tous un toit ?
Nous avons engagé des discussions avec de grands groupes pour la construction de logements, et je peux déjà annoncer la bonne nouvelle : à l’initiative du district, 25 000 logements économiques, dont 1 000 pour les ménages à revenus faibles, sont en cours de construction, sur 4 sites à Bingerville et à Bassam. Le programme s’étale sur cinq ans. Le montant d’une maison en location-vente n’excédera pas 14,5 millions de F CFA [22 105 euros]. Au total, cette importante opération immobilière coûtera 72,5 milliards de F CFA – prix du terrain, des aménagements et des constructions compris.
>> Lire aussi : le port d’Abidjan et Piemme Côte d’Ivoire lancent un programme de 1600 logements
Le district a-t-il un rôle dans l’assainissement de la lagune ?
L’assainissement de la baie, qui est en cours, est un projet très lourd. C’est donc l’État qui en a la charge. Le district autonome, lui, intervient au niveau de l’aménagement et de l’embellissement des berges de la lagune, afin que les riverains bénéficient d’un cadre agréable pour se détendre et, pourquoi pas, pour développer de petites activités économiques.
Comme dans nombre de métropoles, les problèmes de sécurité sont récurrents. Que faites-vous pour répondre à l’inquiétude des populations ?
La sécurité relève des pouvoirs régaliens de l’État. Malgré la conjoncture économique difficile, nous faisons le maximum pour contribuer à la lutte contre le grand banditisme et la criminalité. Le district d’Abidjan construit des commissariats et des gendarmeries, offre du matériel roulant et du carburant aux policiers et aux gendarmes, du matériel de constat rapide pour les accidents. Il participe aussi à la sécurisation avec l’implantation de caméras dans les points sensibles de la ville… La vidéosurveillance est primordiale. Par ailleurs, le partenariat noué avec des collectivités territoriales européennes nous a permis d’offrir des camions d’incendie aux sapeurs-pompiers militaires. Au regard des besoins, c’est une goutte d’eau dans la mer, mais c’est tout de même mieux que rien.
Au-delà des chantiers urgents, comment voyez-vous la future Abidjan ?
Notre ambition est de faire d’Abidjan une grande ville où il fait bon vivre. Mais aussi d’en faire un vrai pôle d’attractivité, dans tous les domaines. Nous avons par exemple pour projet la construction d’un parc des expositions, à l’image de celui qui existe à Paris. Plus largement, pour piloter le développement de la ville, nous réfléchissons aussi à la création d’une agence d’urbanisme et de prospective.
Quel est l’impact du retour, ces derniers mois, de la Banque africaine de développement (BAD) à son siège d’Abidjan ?
L’institution avait quitté la ville il y a onze ans pour des raisons de sécurité. Cela a été pour nous un très mauvais signal de la part de la communauté internationale. Le fait que la BAD ait enfin réintégré son siège abidjanais signifie que la Côte d’Ivoire a retrouvé son rang sur la scène internationale et que notre pays, locomotive de l’Union économique et monétaire ouest-africaine [UEMOA], est redevenu fréquentable.
Cela a évidemment un impact sur le plan économique. Les investisseurs, qui cherchent à placer leur argent dans un environnement stable, vont eux aussi revenir à Abidjan pour faire des affaires. Par ailleurs, ce retour de l’institution va nécessairement "booster" la consommation dans l’agglomération grâce au pouvoir d’achat de ses travailleurs. C’est un volet qu’il ne faut pas négliger.
Des jeux et des travaux
Après la station balnéaire française de Nice, en 2013, c’est Abidjan qui accueillera les Jeux de la Francophonie 2017, qui vont réunir plus de 3 000 athlètes et artistes. Le gouvernement ivoirien a déjà remis à niveau certaines infrastructures sportives existantes, dont celles du campus universitaire de Cocody et du palais des sports de Treichville. "Pour la première fois depuis plus de trente ans, l’État a prévu un budget d’investissement pour réhabiliter et construire des infrastructures sportives.
Des appels d’offres ont donc été lancés cette année en vue de la réhabilitation complète des complexes sportifs de Yopougon, Abobo, Angré, Bingerville et de la piscine d’État de Treichville", souligne Alain Lobognon, le ministre de la Jeunesse et des Sports. La plupart de ces projets seront conduits dans le cadre de partenariats public-privé (PPP). Afin d’améliorer son offre en infrastructures répondant aux normes techniques imposées par les instances internationales, le pays s’est porté candidat à l’organisation d’autres grands événements sportifs et a notamment accueilli la Coupe du monde par équipe de taekwondo en novembre 2013 (une première en Afrique) et sera l’hôte de la Coupe d’Afrique des nations (CAN) 2021.
De quoi redoubler d’efforts pour accélérer la stratégie de construction d’installations sportives. Après une année consacrée au montage technique et financier du projet, dont le coût est estimé à 47,1 milliards de F CFA (71,8 millions d’euros), la construction du complexe olympique d’Abobo (Abidjan-Nord) commencera en 2015. Si le délai de livraison est respecté, le stade pourrait être prêt pour les Jeux de la Francophonie 2017.
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Propos recueillis à Abidjan par Baudelaire Mieu
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