L’incendie a éclaté vendredi avec la publication par le Washington Post d’une vidéo datant de 2005 et dans laquelle Donald Trump, alors homme d’affaires et vedette de télévision de 59 ans, est enregistré à son insu en train de parler en termes très crus et dégradants de sa façon d’aborder les femmes qu’il convoite, au besoin sans leur consentement.
Il affirme à un présentateur qu’en tant que star, « elles nous laissent faire. On fait tout ce qu’on veut ». Un pouvoir qui inclut notamment celui de les « attraper » par le sexe –le milliardaire utilisant un mot vulgaire.
Plus tard, il affirme ne pas pouvoir s’empêcher d’embrasser les belles femmes.
La publication de l’enregistrement a fait l’effet d’une bombe dans la campagne électorale, stupéfiant les alliés républicains du candidat. Celui-ci a été contraint de publier des excuses par communiqué puis dans un message vidéo diffusé au milieu de la nuit.
« Ceux qui me connaissent savent que ces paroles ne reflètent pas qui je suis. Je l’ai dit: j’avais tort et je m’excuse », a-t-il déclaré, tout en annonçant qu’il attaquerait Hillary Clinton pour avoir rudoyé les maîtresses de son mari, Bill, dans les années 1990.
Le débat de dimanche soir s’annonce ainsi houleux.
Peu d’indécis
« Cette vidéo est un couteau planté dans le coeur de Trump, au débat, il est certain qu’on va lui poser la question », prédit Larry Sabato, politologue de l’Université de Virginie.
« Trump ne perdra aucune voix au sein de sa base électorale, ils s’en fichent », dit cet expert. « Mais Trump ne parviendra pas à élargir sa base de soutien ».
Environ 84 millions de personnes ont suivi le premier débat, le 26 septembre, lors duquel le plan d’Hillary Clinton s’est déroulé comme prévu : projeter une image présidentielle tout en laissant Donald Trump exprimer ses penchants les plus troublants aux yeux des électeurs modérés, notamment son impulsivité et sa méconnaissance des dossiers.
A ce stade, il ne reste que 4% d’électeurs indécis, selon des sondages Quinnipiac et CBS, et Hillary Clinton a repris l’avance qu’elle avait brièvement perdue en septembre. Elle recueille environ 44% des intentions de vote contre 41% pour lui.
« L’élection est en train de se fixer, le béton est en train de durcir, il ne reste plus beaucoup d’électeurs indécis », dit Larry Sabato à l’AFP.
Consternation républicaine
Le milliardaire populiste a déjà connu des semaines noires, notamment en août, mais il s’était relevé de ses dérapages.
La différence est que ces révélations émergent à seulement un mois du scrutin, alors que les Américains commencent à voter de façon anticipée.
Des soutiens soulignaient que ces fanfaronnades de vestiaires étaient vieilles de onze ans et ne remettaient pas en cause les autres qualités de l’homme d’affaires.
Mais la panique se répandait dans les rangs républicains, par crainte d’une déroute générale en novembre, quand le Congrès doit aussi être renouvelé.
Les uns après les autres, des ténors ont fait part de leur écœurement et de leur colère, notamment l’homme fort du Congrès, Paul Ryan, qui a retiré l’invitation de Donald Trump à un rassemblement samedi sur ses terres.
Plusieurs élus, dont ceux de l’Utah, État très conservateur, ont annoncé qu’ils ne voteraient plus pour Donald Trump, sans toutefois aller jusqu’à soutenir la démocrate.
Mais très peu de personnalités républicaines ont appelé au retrait du candidat du scrutin, une éventualité peu réaliste.
Le débat, à St. Louis (Missouri), devait être l’occasion pour Donald Trump de changer d’image auprès des jeunes, des minorités et des électrices, afin de leur prouver qu’il n’est pas le personnage xénophobe et sexiste dépeint par les démocrates.
« Les femmes ont le pouvoir de stopper Trump », a tweeté Hillary Clinton, en diffusant une nouvelle vidéo compilant ses paroles sexistes les plus accablantes.
L’autre conséquence de cette nouvelle polémique est que la divulgation par WikiLeaks vendredi de documents de proches d’Hillary Clinton, et notamment d’extraits de discours de la démocrate devant des banques d’affaires, est passée au second plan.
L’entourage de la candidate a mis la fuite sur le compte de Moscou –le jour-même où Washington accusait publiquement la Russie de piratages pour interférer dans l’élection américaine.