La prise de la base de Baga par Boko Haram, coup dur pour l’armée nigériane

La base militaire stratégique de Baga, au bord du lac Tchad, est tombée samedi matin entre les mains de Boko Haram. Un véritable coup dur pour l’armée nigériane qui multiplie les revers face au groupe islamiste. Explication en trois points.

Un homme armé à Yola, au Nigeria, le 4 décembre 2014. © AFP

Un homme armé à Yola, au Nigeria, le 4 décembre 2014. © AFP

Publié le 5 janvier 2015 Lecture : 4 minutes.

Après plusieurs heures de combats, Boko Haram s’est emparé, le 3 janvier, de la base militaire de Baga et de plusieurs autres localités, au bord du lac Tchad, forçant les habitants à fuir dans les pays voisins du Nigeria. Un nouveau coup dur pour l’armée de ce pays, dont le président Goodluck Jonathan est de plus en plus critiqué par ses alliés, occidentaux ou africains, sur sa volonté réelle de s’opposer par tous les moyens aux insurgés islamistes. Décryptage de la situation en trois points :

  • Baga, une base militaire de la Force multinationale (MNJP)

Située à 180 km au nord-est de Maiduguri, la capitale régionale de l’État de Borno, la base militaire de Baga était le quartier général de la Force multinationale de la région (MNJTF), créée dans le cadre d’une coordination régionale de la lutte contre Boko Haram.

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Les combattants islamistes "ont submergé les troupes et les ont forcées à abandonner la base", a raconté par téléphone Usman Dansubdu, un habitant de Baga en fuite à Gubuwa, au Tchad. "La force multinationale est composée de militaires du Nigeria, du Niger et du Tchad", a précisé pour sa part le général nigérian Olajide Laleyevoisins. Mais la débâcle de samedi a permis d’apprendre que seuls des soldats nigérians étaient stationnés à Baga, ceux du Niger et du Tchad ayant été rappelés à la suite du massacre de 48 pêcheurs en novembre dernier. Une preuve de la difficile coopération entre le Nigeria et ses alliés voisins du Tchad et du Niger…

  •  L’armée nigériane sous le feu des critiques

En cinq ans, l’insurrection menée par Boko Haram et sa répression par les forces de l’ordre ont fait plus de 13 000 morts et 1,5 million de déplacés dans le nord du Nigeria, majoritairement musulman. Le groupe a également mené plusieurs kidnappings à grande échelle, face à une armée nigériane sous le feu des critiques, qui s’est montrée jusqu’à présent incapable d’endiguer l’inexorable montée en puissance de Boko Haram. Les insurgés tiennent la quasi-totalité des localités frontalières avec la province de l’Extrême-Nord au Cameroun voisin, où ils n’hésitent plus désormais à mener des raids d’envergures contre l’armée, et non plus simplement des opérations de ravitaillement ou de recrutement.

>> Lire aussi : Les erreurs de Goodluck Jonathan

L’extansion de la menace terroriste a suscité de nombreuses critiques envers la politique menée par Goodluck Jonathan. Outre le Niger et le Tchad, les États-Unis se sont également plaints de l’inertie de l’administration du président nigérian. "En dépit des offres d’assistance des États-Unis et d’autres partenaires internationaux, la réponse du gouvernement nigérian à cette crise a été d’une lenteur tragique et inacceptable", avait déclaré en mai 2014 Robert Menendez, le président de la commission des Affaires étrangères du Sénat. Les tensions entre Washington et Abuja se sont récemment tendues avec la décision du Nigeria, rendue publique le 1er décembre, de mettre fin à la formation par les États-Unis d’un bataillon de son armée pour lutter contre Boko Haram. En outre, la corruption de l’armée nigériane, largement subventionnée par les Américains, est régulièrement montrée du doigt.

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>> À lire : Comment l’armée nigériane tente de faire face à Boko Haram

  • Plusieurs autres localités menacées, Maiduguri complètement encerclée

Le sénateur du nord-Borno, Maina Ma’aji Lawan, a confirmé le raid des islamistes dans plusieurs autres localités du nord-est du pays : "Les combattants de Boko Haram ont lancé des attaques dans la région de Baga [le 3 janvier], détruisant six villes et plusieurs campements, forçant leurs habitants à fuir au Tchad." "Ils sont venus en quantité incroyable et ont pris le dessus sur les troupes multinationales ainsi que les groupes locaux d’auto-défense", a ajouté le sénateur.

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Des membres présumés de Boko Haram ont aussi lancé un raid sur la ville de Babban Gida, à 50 kilomètres de Damaturu, la capitale de l’État de Yobe. Des habitants affirment qu’ils y ont rasé plusieurs bâtiments. Selon eux, après avoir maîtrisé les soldats à l’issue d’un échange de tirs, les combattants de Boko Haram ont brûlé un pensionnat abandonné, un bâtiment administratif et détruit la base militaire.

Les islamistes, qui lancent de meurtrières attaques quasi-quotidiennes dans le nord-est du pays, se sont emparés ces derniers mois de plus d’une vingtaine de localités dans l’État de Borno (extrême Nord-Est), proclamant un "califat" dans les zones sous son contrôle. Maiduguri, capitale de l’État de Borno et important carrefour régional où s’est réfugiée une grande partie de la population de la région, est aujourd’hui presque encerclée et pourrait tomber aux mains de Boko Haram, selon les autorités locales.

>> Lire aussi : Boko Haram plus féroce que l’État islamique

(Avec AFP)

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