États-Unis : Donald Trump peine à séduire les Noirs avec son discours sur l’ordre public

Donald Trump a promis de ramener l’ordre et la sécurité s’il est élu président des Etats-Unis, un discours aux relents racistes pour beaucoup de Noirs qu’il tente pourtant de séduire.

Donald Trump en Floride, le 12 octobre. © Evan Vucci/AP/SIPA

Donald Trump en Floride, le 12 octobre. © Evan Vucci/AP/SIPA

Publié le 16 octobre 2016 Lecture : 3 minutes.

Donald Trump au soir de son élection, serrant la main de son futur vice-président Mike Pence , le 9 novembre 2016. © Evan Vucci/AP/SIPA
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Trump, 45e président des États-Unis

Donald Trump a remporté mercredi 9 novembre l’élection présidentielle américaine, coiffant au poteau sa concurrente démocrate Hillary Clinton et succédant ainsi à Barack Obama à la Maison Blanche.

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Dans sa promesse de lutter contre l’insécurité, le candidat républicain à la Maison Blanche a particulièrement ciblé Chicago, en proie à une recrudescence spectaculaire de violence par armes à feu avec 549 homicides depuis janvier, soit plus que New York et Los Angeles réunies. Plus de 3.400 personnes y ont été blessées par balle sur la même période, selon le journal Chicago Tribune.

« Quand on a 3.000 personnes touchées par balles et autant de morts, c’est pire que l’Afghanistan ou des pays en guerre », s’était exclamé Donald Trump en septembre, appelant à rétablir la pratique des contrôles inopinés (« stop and frisk ») dans la troisième ville des Etats-Unis.

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Cette technique autorisant les policiers à contrôler un individu dans la rue sans qu’il ait commis d’infraction, afin de vérifier qu’il n’est pas armé, a été rejetée par la justice, la jugeant discriminatoire contre les Noirs et autres minorités.

« Désespoir et colère »

« Chicago a besoin des fouilles inopinées », avait pourtant martelé Donald Trump. Une vision largement rejetée à Chicago, où la technique de « stop and frisk » a été appliquée par le passé avant d’être suspendue l’année dernière.

« Nous ne sommes pas intéressés par une stratégie qui remettrait en question les droits des citoyens », a rétorqué le chef de la police de la ville, Eddie Johnson, dans un communiqué.

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« Ce n’est pas vraiment efficace », renchérit Robin Robinson, conseiller auprès de la police sur les relations entre communautés. « Cela pousserait dans les faits les Noirs et les forces de l’ordre à s’éloigner plus encore les uns des autres », privant notamment la police d’informations précieuses pour mener ses enquêtes.

Les habitants de Chicago eux-même reconnaissent les problèmes d’insécurité dans une ville que certains adolescents surnomment « Chirak », jeu de mot entre Chicago et Irak.

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« Le niveau de désespoir et la colère… Je n’ai jamais vu ça jusqu’à maintenant. Des quartiers entiers sont otages de la peur », témoigne Michael Pfleger, pasteur depuis des années dans l’une des zones les plus violentes de Chicago.

Mais les solutions de Donald Trump ne convainquent pas les Noirs américains. Le milliardaire n’attire que 4% des suffrages dans cet électorat, loin derrière les hispaniques (environ 20%, selon un sondage Los Angeles Times/USC tracking poll).

« Qu’avez-vous à perdre? »

En cause notamment, son slogan sur le rétablissement de « l’ordre et de la sécurité » qui rappelle à beaucoup les mots de ceux qui accusaient dans les années 1950 et 1960 le mouvement de lutte pour les droits des Noirs d’être violent.

« Le système judiciaire du sud utilisait alors les mots +ordre et sécurité+ pour délégitimer le travail des militants sur le terrain », explique Khalil Muhammad, professeur d’histoire et de politique à l’université Harvard.

Et malgré une opération séduction tardive lancée cet été pour tenter de convaincre cet électorat en grande partie acquis à sa rivale démocrate Hillary Clinton, Donald Trump accumule les faux pas.

Il a critiqué le mouvement Black Lives Matter (BLM), qui dénonce les violences policières contre les Noirs et a également froissé des électeurs en concluant automatiquement à plusieurs reprises que ses interlocuteurs noirs venaient de quartiers difficiles.

« Vous vivez dans la pauvreté, vos écoles sont mauvaises, vous n’avez pas de travail, 58% de votre jeunesse est au chômage. Mais qu’est-ce que vous avez à perdre? » avait-il aussi lancé fin août, accusant les démocrates de n’avoir rien fait pour améliorer cette situation, même sous les mandats du premier président noir des Etats-Unis Barack Obama.

Donald Trump s’est depuis rendu dans une église noire pour tenter de renouer avec cet électorat. Et fin septembre il soulignait l’importante contribution des Noirs à l’histoire du pays.

Mais en refusant de s’engager à traiter le problème des violences policières, Donald Trump a peu de chance de convaincre l’électorat noir, estime Michael Kazin, professeur d’histoire à l’université de Georgetown.

Selon lui, le candidat républicain « n’essaye pas de s’adresser aux Noirs d’une façon qui puisse de façon concevable lui attirer leurs votes ».

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