« Biens mal acquis » : la France et la Guinée équatoriale s’affrontent devant la Cour internationale de justice

Mardi, les représentants français devant la CIJ (Cour internationale de justice) ont dénoncé une « tentative de maquillage juridique » de la part de la Guinée équatoriale, qui a sollicité la plus haute juridiction de l’ONU pour qu’elle empêche la justice française de poursuivre Teodoro Nguema Obiang Mangue, dit Teodorin, le vice-président équato-guinéen, dans l’affaire des biens mal acquis.

Teodorin Obiang, le 30 septembre 2015 au siège des Nations Unies. © Frank Franklin II/AP/SIPA

Teodorin Obiang, le 30 septembre 2015 au siège des Nations Unies. © Frank Franklin II/AP/SIPA

Publié le 18 octobre 2016 Lecture : 3 minutes.

Deuxième jour d’audiences publiques à la Cour internationale de justice (CIJ) de La Haye ce mardi. Après que le représentant de la Guinée-équatoriale a exposé lundi les raisons pour lesquelles le pays a sollicité cette instance juridique de l’ONU aux fins de suspendre les poursuites engagées par la justice française à l’encontre du vice-président Teodoro Nguema Obiang Mangue, dit Teodorin, dans l’affaire des « biens mal acquis » (plaidant l’immunité liée à son statut dans l’exécutif et l’illégalité de la perquisition faite en 2012 dans son hôtel particulier de Paris, considéré par Malabo comme une représentation diplomatique), c’était au tour de la France d’argumenter.

« Détournement de procédure »

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Alain Pellet, membre de l’Institut de droit international et représentant de la France pour l’occasion, a affirmé que la Guinée équatoriale menait une « tentative de maquillage juridique » devant la CIJ : « Malabo, qui souhaite que cet immeuble soit considéré comme les locaux de la mission diplomatique de la Guinée en France, a tenté de déguiser un immeuble privé en un bien public à usage diplomatique. Cela s’appelle un détournement de procédure. »

« Pas de remise en cause des liens de confiance entre nos deux pays »

Sur la forme, Hervé Ascencio, professeur à l’Université de Paris I, s’est voulu apaisant après que la Guinée équatoriale s’est dit lundi « profondément offensée par la manière injuste et insultante dont elle est traitée en France ». « Cette affaire ne saurait porter atteinte à l’honneur, ni à la dignité de la Guinée équatoriale et ne fait apparaître ni urgence, ni préjudice irréparable. Pour Paris, le différend ne remet nullement en cause la qualité de nos relations bilatérales et les liens de confiance entre nos deux pays ».

Sur le fond, ensuite, la France a débattu des deux points juridiques soulevés par la Guinée équatoriale. À savoir le statut de vice-président de Teodorin Obiang, nommé à ce poste en juin dernier, après le déclenchement des poursuites, et le statut de représentation diplomatique de l’hôtel particulier de l’avenue Foch, perquisitionné par les enquêteurs français en 2012. Et considéré par la justice française comme une possession personnelle de Teodorin Obiang.

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« Besoin compulsif d’acheter »

En 2012, ce bâtiment avait été saisi sur ordre des juges d’instruction, de même que 17 voitures de luxe, mais aussi des œuvres d’art, des bijoux et des vins fins révélant le train de vie extrêmement luxueux du fils du président équato-guinéen en France. « Tous ces biens ont la même fonction : satisfaire le besoin compulsif d’acheter de Teodorin Obiang, à des fins privées, sans lien avec ses fonctions », a affirmé Alain Pellet.

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Toutefois, la France a souligné le caractère uniquement procédural de l’audience parisienne en raison d’un vice de procédure. « Les premières audiences au fond n’auront pas lieu avant l’année prochaine », a expliqué François Alabrune, directeur des affaires juridiques du ministère des Affaires étrangères, représentant Paris. Ce dernier s’est également voulu rassurant en réaffirmant qu’il n’y avait dans cette affaire aucune volonté politique de la part de l’État français. « Le gouvernement français ne saurait donner de directives aux juges français dans l’exécution de leur mission. Il s’agit de la traduction du principe de séparation des pouvoirs communs aux États de droit. »

Mercredi, la CIJ donnera aux deux camps une dernière occasion d’apporter des réponses aux affirmations formulées par la partie adverse.

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