Génocide au Rwanda : Pascal Simbikangwa jugé en appel en France
Pascal Simbikangwa, premier condamné en France pour sa participation au génocide de 1994 au Rwanda, fait de nouveau face à la justice française, à partir de mardi. Condamné il y a deux ans à 25 ans de prison pour génocide et complicité de crimes contre l’humanité, il avait fait appel.
Pascal Simbikangwa affirme avoir traversé le génocide rwandais sans voir un seul cadavre. Cet ex-officier de la garde présidentielle rwandaise, reconverti dans la police politique après l’accident qui l’a cloué dans un fauteuil roulant en 1986, comparaît en appel, à partir de mardi 25 octobre, aux assises de Bobigny, en région parisienne, pour « complicité de génocide » et « complicité de crimes contre l’humanité ».
Il y a deux ans, la cour d’assises de Paris l’avait condamné à 25 ans de réclusion criminelle pour génocide et complicité de crimes contre l’humanité. L’accusation lui reproche d’avoir, à Kigali et dans sa région natale de Gisenyi, organisé les barrages routiers au passage desquels étaient filtrés et exécutés les Tutsis, d’avoir donné des instructions et livré des armes aux miliciens Interahamwe qui tenaient ces barrages.
Procès « historique »
Tout au long de son premier procès, Simbikangwa, qui nie les faits, n’avait cessé de minimiser son rôle et sa compréhension des massacres à l’époque. Il avait ainsi répété à la stupéfaction générale n’avoir vu aucun cadavre pendant les 100 jours d’avril à juillet 1994, au cours desquels au moins 800 000 Tutsis et Hutus dits « modérés » ont été massacrées.
Quelque 24 tomes de procédure, une cinquantaine de témoins et 32 jours d’audience aux assises de Bobigny sont au programme
Depuis ce procès « historique » – le tout premier en France d’un Rwandais pour le génocide de 1994 -, un deuxième a eu lieu, celui de deux anciens bourgmestres, Octavien Ngenzi et Tito Barahira. Ils ont été condamnés à perpétuité en mai 2016 pour leur participation au génocide et ont également fait appel. Pascal Simbikangwa, 56 ans, risque lui aussi la perpétuité lors de ce nouveau procès.
Celui-ci est d’ores et déjà hors-normes. Quelque 24 tomes de procédure, une cinquantaine de témoins et 32 jours d’audience aux assises de Bobigny sont au programme. Certains témoins, emprisonnés au Rwanda, seront entendus par visioconférence.
La défense va s’attacher à dénoncer une condamnation politique
Arrêté à Mayotte en 2008 pour trafic de faux papiers, Pascal Simbikangwa est jugé en France au titre de la « compétence universelle » qui permet à un État de poursuivre les auteurs des crimes les plus graves, quels que soient le lieu où il a été commis et la nationalité des auteurs ou des victimes. En 2014, il avait été condamné pour les faits qui lui étaient reprochés à Kigali mais été acquitté de ceux qui lui étaient imputés à Gisenyi.
La Cour avait à l’époque mis en doute certains témoins de Gisenyi, en évoquant « une certaine concertation entre eux peu compatible avec la vérité ». Un point capital pour ses avocats, Fabrice Epstein et Alexandra Bourgeot, qui avaient critiqué un dossier reposant uniquement sur des témoignages, qu’ils s’étaient attachés à mettre en doute.
Comme en première instance, la défense tentera d’obtenir l’acquittement
La défense avait aussi dénoncé un « procès politique » qui tombait à pic, à quelques semaines du vingtième anniversaire d’un génocide dans lequel le rôle de la France a été très critiqué. « Nous espérons que seuls les faits seront regardés lors ce deuxième procès », sans la « pression morale » qui avait accompagné les premières audiences, ont-ils déclaré. Comme en première instance, ils tenteront d’obtenir l’acquittement.
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