Tunisie : Essebsi revendique la victoire à la présidentielle, Marzouki conteste

Béji Caïd Essebsi a revendiqué dimanche soir la « victoire » à l’élection présidentielle tunisienne. Son annonce a été immédiatement contestée par le camp de son adversaire, le président sortant Moncef Marzouki. Les résultats officiels devraient être publiés lundi.  

Le candidat à la présidentielle Béji Caïd Essebsi, le 21 décembre 2014 à Tunis. © AFP

Le candidat à la présidentielle Béji Caïd Essebsi, le 21 décembre 2014 à Tunis. © AFP

Publié le 22 décembre 2014 Lecture : 3 minutes.

"Les indicateurs que nous avons (…) indiquent une victoire de Béji Caïd Essebsi". Dimanche 21 décembre, quelques minutes après la fermeture des bureaux de vote, Mohsen Marzouk, le directeur de campagne de Béji Caïd Essebsi (BCE), n’a pas attendu les résultats officiels pour annoncer "son" vainqueur de la présidentielle. Face à près de 2 000 personnes rassemblées devant son QG de campagne, Béji Caïd Essebsi, 88 ans, a lui remercié ses électeurs et salué son rival, bien que l’inimitié entre les deux hommes soit de notoriété publique. "La Tunisie a besoin de tous ses enfants", a-t-il lancé.

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Un taux de participation de 59%

De son côté, le camp du chef de l’État sortant, Moncef Marzouki, a immédiatement contesté ces affirmations. "Ce qu’a déclaré le responsable de la campagne de Béji Caïd Essebsi à propos de sa victoire nette est sans fondement", a estimé son directeur de campagne, Adnène Mancer, évoquant un écart "très serré" de "quelques milliers de voix" et accusant l’adversaire de "porter atteinte à la paix sociale". "Que direz-vous à vos partisans si les résultats s’avèrent être contraires à ce que vous avez annoncé ?" a-t-il lancé au camp rival.

De son côté, Moncef Marzouki a affirmé qu’il ne ferait "pas de commentaire pour le moment" mais a, dans le même temps, fait état d’indicateurs le donnant en tête. "Je refuse de m’avancer (…) malgré toutes les données et informations qui (…) indiquent que nous sommes vainqueurs", a-t-il dit à ses partisans rassemblés devant son QG de campagne. "Je vais respecter la loi et je vais respecter les instances indépendantes qui, elles seules, (..) ont le droit de donner les résultats", a-t-il ajouté faisant référence à l’instance électorale, l’ISIE. Cette dernière a indiqué qu’elle ferait son possible pour que les résultats soient annoncés lundi. Pour l’instant, seul le taux de participation est connu : 59% sur l’ensemble de la Tunisie.

Campagne tendue

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Les deux candidats Caïd Essebsi et Marzouki ont mené des campagnes très dures, échangeant invectives et insultes. Le président sortant s’est présenté en défenseur de la révolution face au retour des tenants de l’ancien régime, BCE ayant servi le père de l’indépendance Habib Bourguiba puis brièvement Zine El Abidine Ben Ali, avant d’assurer plusieurs mois la fonction de Premier ministre après la révolution.

À l’inverse, le chef du parti Nidaa Tounès s’est posé en homme providentiel malgré son grand âge, se disant à même de réparer les dégâts causés par les islamistes d’Ennahdha, au pouvoir de 2012 à début 2014, et par leur allié Moncef Marzouki, qualifié "d’extrémiste". Si la victoire de Béji Caïd Essebsi était confirmée, il réaliserait un doublé moins de deux mois après la victoire de son parti aux législatives. Quel que soit le résultat dimanche, il appartiendra à Nidaa Tounès de former un gouvernement et il devra rapidement s’atteler à construire une coalition stable, faute de majorité absolue au Parlement.

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L’essentiel du pouvoir exécutif revient au gouvernement, alors que le chef de l’État a vu ses prérogatives limitées dans la Constitution adoptée début 2014 afin d’éviter un retour vers la dictature. Le vainqueur de la présidentielle deviendra le premier chef d’État tunisien élu librement depuis l’indépendance en 1956. Habib Bourguiba et Zine El Abidine Ben Ali avaient constamment eu recours à la fraude ou au plébiscite, et Moncef Marzouki a été élu par l’Assemblée constituante à la faveur d’un accord politique avec les islamistes d’Ennahdha.

Menace jihadiste

Le cycle électoral de cette fin d’année doit achever la transition en Tunisie, qui, malgré plusieurs attaques attribuées à la mouvance jihadiste et des crises politiques à répétition, a évité de basculer dans le chaos ou la répression, à l’inverse de la plupart des autres pays du Printemps arabe.

Des dizaines de milliers de militaires et policiers avaient été déployés, permettant le bon déroulement du scrutin selon les autorités, malgré une attaque dans la nuit contre l’armée. Une unité a été visée par un "groupe armé" devant une école de la région de Kairouan (160 km au sud de Tunis), où du matériel destiné aux élections était stocké, mais les autorités se sont refusées à évoquer la piste jihadiste. Un assaillant a été tué et trois autres arrêtés, selon le ministère de la Défense.

L’incident intervient quelques jours après que des combattants tunisiens ayant rejoint le groupe État islamique ont revendiqué les assassinats des personnalités anti-islamistes Chokri Belaïd et Mohamed Brahmi en 2013. Ils ont aussi appelé au boycott du scrutin et menacé de nouvelles violences.

(Avec AFP)

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