L’argent des Africains : Issa, vendeur au marché des artisans de Ouagadougou – 99 euros par mois
Cette semaine, la série l’argent des Africains vous fait découvrir Issa, Burkinabè de 26 ans, vendeur au marché des artisans de Ouagadougou. Combien gagne-t-il et comment dépense-t-il son argent ? Il nous a ouvert son portefeuille.
Comme tous les jours depuis 2007, Issa se rend vers 7h du matin à moto dans le centre de Ouaga. Au marché des artisans situé près du rond-point des Nations Unies, il va rester jusqu’à 18h30-19h, à attendre les rares clients qui déambulent dans l’allée bordée d’une soixantaine de baraques en bois. Là, des vendeurs tentent d’écouler, chacun dans sa spécialité, différents objets issus de l’artisanat africain.
C’est grâce à un voisin touareg que le jeune Ouagalais a trouvé cet emploi, directement après l’école, où il ne pouvait plus se rendre : « À partir de 17 ans les moyens me manquaient pour poursuivre », explique-t-il à Jeune Afrique.
Issa travaille pour le propriétaire de la boutique, qui écoule bracelets, statues, masques et bien d’autres produits en bronze ou en bois. L’une des principales tâches quotidiennes d’Issa est la finition : « On ne fabrique pas les pièces mais on les perfectionne ; on lime le bronze, on nettoie le bois, tout ça pour les rendre plus propres ».
Mais il faut aussi rencontrer les artisans pour passer les commandes ou récupérer les pièces : « On vend de l’artisanat provenant des différentes ethnies du Burkina, mais aussi des pièces Ivoiriennes, il faut donc souvent se déplacer un peu partout ».
Salaire mensuel moyen : 65 000 F CFA, soit 99 euros
Issa touche en moyenne 65 000 francs CFA, soit 99 euros par mois. Son salaire dépend uniquement de ses ventes et de celles de son collègue Ahmdi, avec qui il gère quotidiennement la boutique. « Mais le salaire dépend surtout de la fréquentation du marché, nuance-t-il, et il faut aussi se démarquer par rapport aux autres boutiques », concurrence oblige.
Il avoue volontiers « bien aimer » le commerce. « Le marché me plaît beaucoup, vendre notre artisanat et rencontrer d’autre personnes, étrangères ou non »… Mais les clients ne se bousculent pas dans ce pays enclavé d’Afrique de l’Ouest, surtout depuis fin 2013. L’épidémie d’Ebola, encore vive dans les mémoires, 2014 et l’insurrection contre Compaoré, le putsh de 2015 ou encore l’attentat terroriste du 16 janvier 2016 ont donné un sérieux coup de frein à l’activité touristique.
Deux tiers du salaire consacrés à l’alimentation et à l’aide familiale
Avec ce salaire, Issa vit encore au domicile familial, dans le quartier populaire de Tanghin au nord de la ville. Ici vivent ses deux parents à la retraite ainsi que ses quatre frères et soeurs. Si la maison appartient à leurs parents, ce qui les exempte de loyer, Issa, ses deux soeurs et l’un de ses frères contribuent tout de même chacun à hauteur de 23 euros minimum par mois pour assurer les besoins du foyer (son plus jeune frère étant toujours à l’école, ce dernier ne peut pas encore participer). Une aide qui peut, en fonction des nécessités, monter jusqu’à 35 euros certains mois.
La plus grande dépense du Burkinabè concerne l’alimentation. Mensuellement, Issa débourse 34 euros en eau et nourriture, pour lui le midi et pour sa famille le soir. À cette dépense s’ajoutent environ 12 euros de carburant et d’entretien pour sa moto, « indispensable » à ses déplacements entre son domicile et le marché.
Les « dépenses inutiles », comme il les qualifie, à savoir les bières bues au maquis, les recharches téléphoniques ou encore les cigarettes, représentent 15 euros dans son budget mensuel.
Selon les mois, Issa arrive à mettre une quinzaine d’euros de côté, mais l’épargne est souvent difficile à conserver. En cause, de nombreuses dépenses « imprévues », comme l’achat de médicaments ou, comme c’est le cas actuellement, la réparation de sa moto endommagée après un accident.
Des projets d’avenir pour les périodes creuses
Titulaire du permis de conduire depuis décembre 2015, Issa a pour projet de trouver une voiture pour faire taxi. « C’est bien plus rentable » que le marché, affirme-t-il. Il envisage de se livrer à cette activité en complément le soir, ou « lors des périodes creuses du marché ». Pour les débuts, au moins.
Il souhaite également prendre des cours d’informatique pour appronfondir ses connaissances et, pourquoi pas, s’ouvrir les portes d’une nouvelle activité : de la vente d’artisanat africain par internet, qui sait ?
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