Turquie : l’AKP veut amnistier certains violeurs de mineurs s’ils épousent leurs victimes

Annuler, sous certaines conditions, la condamnation d’un violeur pour agression sexuelle sur mineur si celui-ci épouse sa victime ? C’est la nouvelle idée du gouvernement dirigé par l’AKP qui a proposé un texte en ce sens à l’Assemblée, suscitant une vive polémique nationale.

Le président Recep Tayyip Erdogan se livre à un discours depuis son palais d’Ankara, le 24 février 2016. © Kayhan Ozer/AP/SIPA

Le président Recep Tayyip Erdogan se livre à un discours depuis son palais d’Ankara, le 24 février 2016. © Kayhan Ozer/AP/SIPA

Publié le 18 novembre 2016 Lecture : 2 minutes.

Certains pays avancent, d’autres semblent régresser. Alors qu’au Maroc, cette disposition a été supprimée du code pénal en 2014, la possibilité pour un violeur de mineur d’échapper à sa condamnation s’il épouse sa victime pourrait bientôt être adoptée en Turquie.

Le gouvernement dominé par l’AKP (le parti au pouvoir) a déjà proposé le texte à l’Assemblée, qui s’est prononcée jeudi soir en première lecture et doit à nouveau voter dans les prochains jours. La mesure, qui serait appliquée une seule fois et de manière rétroactive, a précisé vendredi le Premier ministre Binali Yildirim, concernerait 3 000 personnes. Elle permettrait de suspendre la condamnation d’une personne pour agression sexuelle sur mineur commise avant le 11 novembre 2016 si son auteur épouse sa victime.

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La réalité du mariage précoce

« Il y en a qui se marient avant d’avoir atteint l’âge légal [de 17 ans avec l’autorisation des parents, dès 16 ans dans certaines circonstances exceptionnelles avec l’aval d’un juge, NDLR]. Ils ne connaissent pas la loi. Ils ont des enfants, le père va en prison et les enfants restent seuls avec leur mère », a dit le Premier ministre pour justifier la mesure.

Même si le mariage précoce est encore une réalité en Turquie, les jeunes filles étant rarement en mesure de s’opposer aux pressions familiales, la proposition de loi a suscité un tollé au sein de l’opposition et de la société civile turques. « L’AKP a fait passer un texte qui pardonne ceux qui épousent l’enfant qu’ils ont violé », a réagi sur Twitter un député de l’opposition sociale-démocrate (CHP), Özgür Özel. Des membres de l’opposition de droite nationaliste (MHP), avec qui le parti au pouvoir a formé une alliance pour réformer la Constitution, ont eux aussi exprimé leur opposition. Sur Twitter, le mot-dièse #TecavüzMesrulastirilamaz (#OnNePeutPasLegitimerLeViol en turc) était parmi les plus populaires en Turquie vendredi.

« Agression sexuelle sans contrainte »

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M. Bozdag a souligné que la mesure ne s’appliquerait que dans les cas où « l’agression sexuelle a été commise sans force, menace ou toute autre forme de contrainte. » (sic) « Le ministre de la Justice a utilisé l’expression ‘agression sexuelle sans contrainte’. Il n’y a rien d’autre à ajouter, je pense », a ainsi déploré Ruhat Sena Aksener, d’Amnesty International en Turquie.

La cour constitutionnelle turque s’était déjà prononcée en juillet en faveur du retrait d’une disposition du code pénal qui caractérise tout acte sexuel avec un enfant de moins de 15 ans comme un abus sexuel, un jugement dénoncé par la société civile. Comment jugera-t-elle la nouvelle loi, si celle-ci venait à être adoptée ?

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