RDC : le regroupement des FDLR dans l’Est, un vrai casse-tête

Un centre de regroupement pour les combattants des Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR), disséminés dans les provinces de l’Est, a été aménagé à Kisangani. Après avoir longtemps tergiversé, les intéressés ont enfin pris le chemin de leur nouveau campement.

Le centre a été aménagé à Kisangani. © Gwen Dubourthoumieu pour J.A.

Le centre a été aménagé à Kisangani. © Gwen Dubourthoumieu pour J.A.

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Publié le 23 décembre 2014 Lecture : 4 minutes.

La RDC a tout pour décoller. © andré thiel/flickr
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Avec ses millions d’hectares de terres arables, de mètres cubes de minerais précieux et ses ressources humaines, le pays a tout pour décoller. À condition bien sûr que les conflits cessent, que la gouvernance s’améliore vraiment, que les investisseurs reviennent. Et que l’avenir politique s’éclaircisse enfin.

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Kisangani n’a pas vraiment eu le choix. La décision est venue de Kinshasa. La capitale de la Province-Orientale accueillera les combattants des Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR) qui acceptent de déposer les armes.

Malgré les critiques de la société civile locale, opposée au projet, le gouvernement n’a pas cédé, et un centre de regroupement des rebelles rwandais a déjà été aménagé au sein de l’ex-camp militaire Base – rebaptisé depuis camp Bahuma, en hommage au défunt général qui dirigea l’offensive de l’armée congolaise contre les rebelles du Mouvement du 23-Mars (M23) dans le Nord-Kivu, en novembre 2013 -, avec l’appui logistique de la Mission de l’Organisation des Nations unies pour la stabilisation du Congo (Monusco).

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Au camp Bahuma, « vingt baraquements d’une capacité de 40 lits chacun sont prêts pour accueillir 800 personnes, commente Bil Tchagbele, responsable de l’information publique de la Monusco à Kisangani. Un dispensaire pour les soins urgents et une salle de divertissement sont également prévus ». Jusqu’à la fin novembre, ce n’était pourtant pas suffisant pour convaincre les rebelles rwandais de s’y rendre. La méfiance persistait. « Nous n’avons pas été consultés. Il est hors de question que nous envoyions nos hommes et leurs familles à des milliers de kilomètres du Rwanda alors qu’ils veulent rentrer chez eux », ne cessait de répéter La Forge Fils Bazeye, l’un des porte-parole des FDLR.

Pour les responsables de ce groupe armé actif dans le Nord-Kivu et le Sud-Kivu depuis près de vingt ans, le désarmement de ses combattants devait être précédé par des garanties d’ouverture d’un dialogue politique avec Kigali. Une « condition inacceptable » pour les autorités rwandaises, qui considèrent les FDLR comme un « mouvement d’idéologie génocidaire ». « Le processus de désarmement volontaire des FDLR est un casse-tête pour les Nations unies et pour les États de la région », reconnaît un diplomate occidental basé à Kinshasa.

« Trop de tergiversations »

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« Il y a eu trop de tergiversations dans la gestion de ce dossier », explique-t-il, faisant allusion notamment à cette « réunion malheureuse » organisée en juin, à Rome, entre certains leaders des FDLR et les représentants de la communauté internationale travaillant sur la situation sécuritaire dans la région des Grands Lacs. Sans compter les « tâtonnements » du gouvernement congolais, qui avait d’abord indiqué que les combattants FDLR désarmés seraient regroupés dans le camp naval d’Irebu, dans l’ouest du pays, avant d’opter pour Kisangani.

L’option militaire suggérée par le Conseil de sécurité des Nations unies dans l’une de ses résolutions reste sur la table.

« Il ne faut surtout pas que la relocalisation de ces rebelles rwandais sur le territoire congolais ressemble à un traquenard. Les envoyés spéciaux des Nations unies, des États-Unis et de l’Union européenne doivent plutôt obliger Kigali à ouvrir un espace politique au Rwanda, préconise Juvénal Munubo, député de Walikale, dans le Nord-Kivu. De cette manière, beaucoup seront encouragés à rentrer chez eux, en espérant pouvoir y exercer des activités politiques. Rien n’empêchera la justice de traquer en même temps certains de ces FDLR qui ont commis des crimes graves au Rwanda et en RD Congo. »

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Une dernière chance pour les FDLR

En attendant, l’option militaire suggérée par le Conseil de sécurité des Nations unies dans l’une de ses résolutions reste sur la table. « Mais aucune action d’envergure n’a été engagée contre les FDLR, alors que ces combattants demeurent une menace pour les populations locales », déplore Me Omar Kavota, porte-parole de la société civile dans le Nord-Kivu.

Début juillet, la Communauté de développement d’Afrique australe (SADC) a décidé d’accorder une dernière chance aux FDLR : un ultimatum de six mois, jusqu’à début janvier 2015. Depuis, rien ni personne, ou presque, n’avait bougé. Kigali s’impatientait, pendant que Kinshasa temporisait… Et la stratégie a payé.

Fin novembre, une visite au camp Bahuma a convaincu les responsables des FDLR, qui ont assuré que le désarmement et le cantonnement pouvaient reprendre : dès le 26 novembre, le mouvement de leurs hommes depuis Goma vers le nouveau camp de Kisangani a commencé ; ils seront rapidement rejoints par les effectifs qui se trouvaient déjà dans les camps de transit saturés de Kanyabayongo et Walungu, lesquels accueilleront d’autres hommes prêts à déposer les armes. L’auront-ils tous fait avant l’échéance du 2 janvier ? Peut-on entrevoir la fin de la « lutte armée » des rebelles rwandais en RD Congo ? Pour La Forge Fils Bazeye, désarmer dans les temps n’est pas la priorité. « Ce qui nous préoccupe, dit-il, c’est l’ouverture politique à Kigali afin que nous puissions rentrer chez nous. C’est tout. »

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