RDC : la chasse au portefeuille… bien garni
C’était un soir de la semaine dernière.
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Tshitenge Lubabu M.K.
Ancien journaliste à Jeune Afrique, spécialiste de la République démocratique du Congo, de l’Afrique centrale et de l’Histoire africaine, Tshitenge Lubabu écrit régulièrement des Post-scriptum depuis son pays natal.
Publié le 10 décembre 2016 Lecture : 2 minutes.
Une icône sur mon téléphone m’indique que j’ai un message. Je m’empresse d’aller sur le réseau social activé. Un vieil ami, un plus-que-frère qui vit dans un pays scandinave, est en ligne. Il écrit : « Salut, mon cher. Je souhaite que tu deviennes membre du prochain gouvernement congolais. » Je n’en crois pas mes yeux. Moi, membre d’un gouvernement ?
Quelle plaisanterie ! Et je réponds : « Moi, ministre ? C’est incompatible avec mon mauvais caractère ! » Réplique de l’ami : « Oh, non ! Il faut que tu penses à tes copains, à tes proches, à ta famille. Tu dois penser à tes vieux jours ! » Mes vieux jours ? Ils sont déjà vieux, mes jours ! Peut-être que mon ami voulait dire : « Quand tu seras grabataire. » Et même si c’était le cas, faut-il devenir ministre pour échapper à son destin ?
Le lucre a pris le pas sur les convictions
Mon ami poursuit sa démonstration : « Un copain qui est comme toi à Kin se bat bec et ongles pour entrer dans le futur gouvernement. Il m’a dit textuellement ceci : “À la minute où tu découvres que je suis devenu ministre, prends le premier vol pour Kin !” » Je contre-attaque : « J’ai juste une question banale. Ton ami rêve d’entrer au gouvernement pour quoi faire ? » Réponse : « C’est très simple : se servir, se remplir les poches et, au passage, ne pas oublier les amis ! » J’explique à mon ami que ce « projet de société » est non seulement curieux mais au-dessus de mes forces.
L’ami, qui ne comprend toujours pas mon attitude, lance une nouvelle offensive. « Mais comment arrives-tu à cohabiter avec des gens qui passent leur temps à ne clamer que cela ? » Je lui réponds que je ne fréquente pas cette engeance-là. « Alors, tu vis isolé ? » s’enquiert mon ami. « Pas du tout ! Je laisse la scène à ceux qui ambitionnent d’avoir une carrière politique pour des raisons alimentaires. Je me bats à ma façon, pour préserver mes convictions. C’est le plus important ! Être journaliste n’est pas la pire des choses. »
La classe politique congolaise est-elle une espèce rare ? Je n’en sais rien. Mais je constate que, depuis des décennies, le lucre a pris le pas sur les convictions. Un député de l’opposition me disait, il y a deux ans de cela, que siéger à l’Assemblée nationale ne l’intéressait plus : il voulait devenir ministre pour avoir un haut standing. Pour quiconque connaît un tant soit peu l’histoire de la République démocratique du Congo, l’élite est à court d’idées. Résultat : tout est un perpétuel recommencement. Y compris la course effrénée pour le partage d’un gâteau flétri par l’indignité.
Le prochain gouvernement congolais sera plus que pléthorique. Or le budget de l’État pour 2017 est en chute libre. Comment faire fonctionner un tel gouvernement s’il faut dépenser plus qu’on ne gagne ? Et comment une équipe aussi disparate, avide d’honneurs et de prébendes, pourra-t-elle atteindre les objectifs qui lui sont assignés ? À voir la frénésie qui s’est emparée de la classe politique – mais pas seulement –, on se demande si le jeu en vaut la chandelle. Si c’est à cela que se limite un rêve de ministre, je ne dirai pas amen ! Car un prédateur ne cherche jamais à construire. Hélas, les prédateurs sont légion. L’amour de la patrie ? Plutôt celui du billet vert !
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