États-Unis : pour Obama, c’est le moment d’aérer en grand

Accusée de travailler en vase clos, l’administration Obama ouvre les fenêtres. Avec Loretta Lynch à la Justice ou Ashton Carter à la Défense, elle va accueillir de nouvelles têtes.

Loretta Lynch avec Barack Obama, à la Maison Blanche, le 8 novembre. © Carolyn Kaster/AP/Sipa

Loretta Lynch avec Barack Obama, à la Maison Blanche, le 8 novembre. © Carolyn Kaster/AP/Sipa

Publié le 10 décembre 2014 Lecture : 3 minutes.

Décidément, l’Histoire bégaie. Loretta Lynch, le procureur fédéral de Brooklyn qu’Obama a choisie pour remplacer Eric Holder à la tête du Département de la justice, s’était fait un nom en poursuivant des policiers new-yorkais qui avaient tabassé et sodomisé avec un manche à balai un immigré haïtien, Abner Louima. C’était en 1997…

Quinze ans avant Michael Brown – cet adolescent noir abattu par un policier blanc le 9 août à Ferguson, dans le Missouri -, Louima était devenu l’une des victimes les plus emblématiques de la violence policière aux États-Unis. Or si sa nomination est confirmée par le Sénat, qui passe aux mains des républicains en janvier, Loretta Lynch deviendra, à 55 ans, la première Africaine-Américaine à occuper le poste de ministre de la Justice et sera chargée de faire aboutir l’enquête diligentée par son prédécesseur sur la légalité des pratiques de la police de Ferguson…

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Nul doute que cette femme de dossier a la carrure pour continuer le combat. Lui-même premier Africain-Américain à accéder à la tête du Département de la justice, Eric Holder laisse un bilan remarquable, selon les associations communautaires. Il a fait tout ce qui était en son pouvoir pour protéger le droit de vote des minorités, mis à mal par des lois adoptées dans plusieurs États à majorité républicaine sous couvert de lutte contre la fraude électorale.

S’attaquant aux discriminations qui parasitent le système pénal, Holder a mis un terme aux peines automatiques sanctionnant les détenteurs de petites quantités de stupéfiants – peines qui frappaient surtout les Noirs. Enfin, sa visite à Ferguson, au lendemain de la mort de Brown, a contribué à calmer les esprits.

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Un bol d’air dans une administration qui fonctionne en vase clos

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Native de Greensboro, en Caroline du Nord, haut lieu de la lutte pour les droits civiques, Lynch ne fait pas partie des proches d’Obama. Elle n’a pas non plus un profil politique. Deux atouts pour franchir le cap de la procédure de confirmation, d’autant que les sénateurs avaient déjà approuvé en 2000 et 2010 sa nomination au poste de procureur des États-Unis. Mariée à un salarié de la chaîne Showtime, cette diplômée de Harvard cultive un train de vie discret, et son arrivée devrait faire l’effet d’un bol d’air dans une administration accusée de fonctionner en vase clos.

La récente démission de Chuck Hagel, le ministre de la Défense, a donné encore plus de poids à ces critiques. Choisi en 2013 pour son caractère effacé, ce vétéran de la guerre du Vietnam avait fini par s’insurger de voir la Maison Blanche prendre toutes les décisions de politique étrangère et de défense sans réelle concertation.

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Dans sa ligne de mire ? Susan Rice, la conseillère d’Obama à la Sécurité nationale. Hagel, qui n’a pas été officiellement limogé, paie en réalité le mémo acerbe qu’il avait envoyé à Rice le mois dernier, dans lequel il prédisait l’échec de la politique menée en Syrie si les intentions de Washington envers Bachar al-Assad n’étaient pas clarifiées.

Remplacer Hagel n’a pas été une mince affaire. Pressentie par Obama, Michèle Flournoy, ancienne sous-secrétaire à la Défense, s’est retirée de la course dans l’espoir de garder toutes ses chances en 2016 au cas où Hillary Clinton serait élue présidente. Jack Reed, sénateur de Rhode Island, en a fait de même.

Finalement, Obama a choisi Ashton Carter, 60 ans, ancien responsable des achats d’armement au Pentagone. Ce diplômé en physique et en histoire médiévale de l’université Yale a notamment été l’initiateur du programme visant à rendre résistants aux mines les véhicules de l’armée américaine en Irak et en Afghanistan. Carter, qui n’est pas un proche d’Obama, ne devrait pas avoir de peine à obtenir l’aval des sénateurs, les républicains ayant accueilli favorablement l’annonce du président. Il n’est pas certain en revanche qu’il pourra davantage que Hagel contester le monopole de la Maison Blanche sur la politique étrangère.

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