Burkina Faso : Compaoré au cachot ?

L’ex-président Blaise Compaoré devra-t-il affronter les tribunaux ? La justice nationale ou internationale ? Les déclarations des autorités burkinabè se suivent et ne se ressemblent pas. Pas encore…

L’oeil de Glez. © Daùien Glez

L’oeil de Glez. © Daùien Glez

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Publié le 3 décembre 2014 Lecture : 3 minutes.

Recroquevillé, ces derniers mois, sur son entourage familial et arc-bouté sur la légalité illégitime de son projet de révision constitutionnelle, Blaise Compaoré a compromis un avenir prometteur. Pour une rallonge de pouvoir qu’il annonçait périlleux, il y a quelques années, à Mamadou Tandja, l’ex-président du Faso a perdu l’occasion d’être applaudi. Applaudi pour avoir offert au Burkina, en 2015, sa première alternance démocratique. Peut-être même applaudi pour avoir sauvé l’Afrique d’une délocalisation canado-haïtienne du pouvoir francophone. En 2012, Yamina Benguigui, alors ministre française de la Francophonie, ne défendait-elle pas l’idée d’un Compaoré à la tête de l’OIF ?

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Au lieu de cela, après 27 ans de pouvoir, l’ancien “P.F” est devenu “S.D.F.”. Et c’est là sa moindre angoisse. Car des épées de Damoclès judiciaires planeraient sur sa tête, si l’on en croit les déclarations notamment officielles venues de son pays natal. Sera-t-il sauvé par les contradictions d’une transition bicéphale ? D’un côté, le Premier ministre, le lieutenant-colonel Isaac Zida, annonçait, lors d’une interview télévisée locale, qu’il entendait demander au Maroc l’extradition du président déchu, pour peu qu’une plainte soit déposée à son encontre. Une saillie qui peut paraître trop spontanée, si l’on considère que le “P.M.” fut le numéro deux du Régiment de sécurité présidentiel mis à l’index dans quelques dossiers “de sang”. Une annonce trop spontanée, au regard de la modération de son actuel patron…

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Sur France 24, le président par intérim du Burkina Faso, Michel Kafando, déclarait, quelques heures après Zida, que la possibilité d’une extradition de Compaoré n’était "pas très urgente". La chaîne France 24 a-t-elle plus d’impact que la RadioTélédiffusion du Burkina ? Et le statut de président, vaut-il plus que celui de Premier ministre, tant il se murmure que le diplomate sorti de sa retraite serait une marionnette des militaires ? Des militaires qui entendent appliquer le principe du "vox populi vox Zida", le lieutenant-colonel ayant déjà limogé son ministre de la Culture, 59 heures après sa nomination, pour cause de sit-in…

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Les positions des deux têtes de l’exécutif burkinabè n’étant pas, sur ce point, si inconciliables, Blaise Compaoré doit faire ses calculs. La justice qui semble vouloir se mettre en branle est la burkinabè, notamment sur les célébrissimes dossiers Sankara et Zongo. Le premier concerne l’ex-président du Faso Thomas Sankara, sur le cadavre duquel s’installa le régime récemment déchu. Le second est celui de Norbert Zongo, journaliste assassiné après avoir enquêté sur François, le frère de Blaise. Le “beau Blaise” devenu buriné compte, pour l’instant, sur deux boucliers : la loi d’amnistie pour les anciens chefs d’État qu’il fit voter en 2012 et l’absence d’accord d’extradition entre le Burkina et le Maroc.

Pour peu que le populisme du nouveau régime burkinabè ne s’impose pas à sa crainte d’être, lui aussi, taxé de “révisionnite”, il restera la justice internationale. Le nom du second couteau Compaoré ayant été cité dans le procès de son ami Charles Taylor, au Tribunal spécial pour la Sierra Leone, faut-il imaginer qu’il remonterait à la surface si l’ancien président libérien venait à être jugé sur le dossier de son propre pays. "Si l’amnistie…", "Si l’extradition… ", "Si le Liberia…", Blaise Compaoré doit se dire qu’avec des “si”, on mettrait Ouagadougou en bouteille. Il doit tout de même se calfeutrer dans son domicile marocain. Un exil marocain qui ne porta pas chance à Mobutu Sese Seko…

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Par Damien Glez

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