Le Tchad bashing nuit à la lutte contre le terrorisme

En Afrique aussi, l’élection de Donald Trump soulève un certain nombre de questions, notamment en matière de sécurité.

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  • Souha Touré

    Diplômée en relations internationales et en droit des affaires, Souha Touré est une journaliste béninoise spécialiste des questions foncières (Agence Ecofin)

Publié le 2 janvier 2017 Lecture : 3 minutes.

La place de la Nation à N’Djamena. © Abdoulaye Barry pour JA
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Pétrole et terrorisme : double choc pour le Tchad

Le pays est confronté à la fois à une crise financière sans précédent et aux attaques de Boko Haram. Idriss Déby Itno est contraint d’entamer son cinquième mandat sous le signe de l’austérité. Et de convaincre qu’il n’a pas d’autre choix.

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En effet, la survie sécuritaire de l’Afrique, et particulièrement de la bande sahélo-saharienne, dépend depuis de nombreuses années de la coopération militaire avec des puissances occidentales, en particulier les États-Unis et la France.

Cette survie est aujourd’hui remise en cause par la volonté annoncée du nouvel homme fort américain de se concentrer sur la relance économique de son pays, mais aussi par une échéance électorale française à l’issue de laquelle le Front national, anti-interventionniste, pourrait jouer un rôle majeur.

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Alors que Boko Haram accuse un net recul et multiplie les raids meurtriers avec l’énergie du désespoir, le Tchad, leader de la task force chargée d’éliminer la menace terroriste dans la région, doit plus que jamais pouvoir compter sur une aide internationale renforcée. Une coopération que rend, hélas, encore plus incertaine le bashing dont est victime le pays.

Officieusement, la Libye de Mouammar Kadhafi a longtemps joué le rôle de gendarme dans le Sahel. C’est donc sans grande surprise qu’après la chute du régime, la sous-région a sombré dans l’insurrection armée, menée par des groupes jihadistes particulièrement actifs dans le Nord-Mali, au Nigeria, au Cameroun et au Tchad. S’il peut paraître excessif, voire déplacé, de regretter le « Guide » libyen, une évidence s’impose : le Sahel a besoin d’un leader. Une place laissée vacante depuis 2011 et que N’Djamena s’efforce de mériter malgré l’absence de concurrence sérieuse, les dirigeants des pays de la région ne semblant guère intéressés par une telle charge.

Si, dans son combat contre la secte islamiste, le Tchad peut compter sur l’aide du Nigeria, du Niger, du Cameroun et du Bénin, sous la bannière de la Force mixte multinationale dont le quartier général est basé à N’Djamena, c’est bien le pays d’Idriss Déby Itno (IDI) qui tient les rênes et s’impose comme le nouveau gendarme du Sahel.

La puissance militaire du Tchad et l’efficacité de ses troupes sont bien connues. N’Djamena est aujourd’hui le premier partenaire de la France dans les dispositifs militaires qu’elle déploie en Afrique (Barkhane et Sangaris, notamment) et le Sahel n’est pas la seule zone d’influence de l’armée tchadienne, engagée sur de nombreux fronts. Un activisme qui porte ses fruits. Plus de 1 000 Tchadiens enrôlés dans les effectifs d’Abubakar Shekau, le leader contesté de Boko Haram, viennent d’abandonner sa cause, affaiblissant davantage la secte. Pas suffisant, pourtant, pour redorer le blason du Tchad aux yeux de la communauté internationale.

Le Sahel est en proie à des maux que ne réglera pas l’angélisme de la limitation du nombre de mandats, mais que peut combattre un homme d’État volontaire

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Le régime de N’Djamena n’a pas bonne presse. Les quatre réélections d’IDI à la tête du pays sont venues à bout de la patience de la plupart des observateurs et médias internationaux, qui ne jurent que par l’alternance. Si cet idéal est partagé par de nombreux Tchadiens, comment expliquer que ces derniers plébiscitent IDI à chaque scrutin présidentiel depuis 1996 ? Sans doute ont-ils compris qu’en ces heures sombres marquées par l’insécurité, la crise pétrolière et le réchauffement climatique, la realpolitik était préférable à la défense d’idéaux dont la mise en application pourrait s’avérer hasardeuse, voire désastreuse.

Le Sahel est en proie à des maux que ne réglera pas l’angélisme de la limitation du nombre de mandats, mais que peut combattre un homme d’État volontaire, au franc-parler bien connu. Garant d’institutions militaires et diplomatiques fiables dans la lutte contre les groupes jihadistes, IDI doit pouvoir être certain qu’elles continueront de fonctionner une fois qu’il aura quitté ses fonctions.

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La communauté internationale a montré à de nombreuses reprises qu’elle pouvait sacrifier ses exigences d’alternance sur l’autel de la sécurité et de la stabilité dans les régions du monde qui constituent de véritables poudrières, comme le Moyen-Orient. Alors pourquoi ne pas en faire autant au Tchad et accompagner ce pays dans sa volonté de porter le combat pour la sécurité sous-régionale ? Face à l’hydre du jihadisme, les médias ne seraient-ils pas mieux inspirés de changer leur regard et de traiter la situation sécuritaire du Sahel en fonction non plus de l’idéal, mais de la réalité du terrain ?

Persister dans le Tchad bashing à l’heure où, aux États-Unis comme en Europe, on assiste au triomphe de politiques isolationnistes, c’est ajouter un second boulet au pied d’un pays qui est pourtant le fer de lance de la lutte contre un fléau qui nous concerne tous : le terrorisme.

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