Colonisation israélienne : pas de veto de Washington à l’ONU
Pour la première fois depuis 1979 le Conseil de sécurité de l’ONU a demandé à Israël de cesser la colonisation dans les Territoires palestiniens et à Jérusalem-Est, dans une résolution permise par la décision des Etats-Unis de ne pas utiliser leur droit de veto.
Les Etats-Unis se sont abstenus vendredi alors qu’ils avaient toujours soutenu Israël jusqu’ici sur ce dossier extrêmement sensible. Les 14 autres membres du Conseil ont voté en faveur de ce texte initialement proposé par l’Egypte.
« Israël rejette cette résolution anti-israélienne honteuse des Nations unies et ne s’y conformera pas », ont vivement réagi dans un communiqué les services du Premier ministre Benjamin Netanyahu.
Il s’agit d’ »un grand camouflet » pour Israël, a estimé de son côté Nabil Abou Roudeina, porte-parole de la présidence palestinienne, parlant « d’une condamnation internationale unanime de la colonisation et d’un fort soutien à une solution à deux Etats ».
Ce dossier international se double d’une divergence marquée entre l’administration américaine sortante de Barack Obama et le président élu des Etats-Unis Donald Trump.
Ce dernier était intervenu avec succès auprès du président égyptien Abdel Fattah al-Sissi pour reporter le vote sur ce texte, initialement prévu jeudi. Et il a rapidement cherché à rassurer les alliés israéliens après l’adoption vendredi: « Les choses seront différentes à l’ONU après le 20 janvier », date de son entrée en fonctions, a-t-il twitté.
Représailles diplomatiques israéliennes
Après la volte-face du Caire, quatre pays –la Nouvelle-Zélande, la Malaisie, le Sénégal et le Venezuela– avaient finalement obtenu qu’un vote soit organisé vendredi.
Israël a aussitôt appliqué « une série de mesures diplomatiques » contre le Sénégal et la Nouvelle-Zélande, l’Etat hébreu n’ayant pas de relations diplomatiques avec les deux autres pays.
Quelques heures seulement après le vote, M. Netanyahu a, entre autres, annoncé le rappel « immédiat » de ses ambassadeurs en Nouvelle-Zélande et au Sénégal « pour consultations », ainsi que l’annulation de tous les programmes d’aide au Sénégal.
Wellington a estimé que la résolution du Conseil de sécurité de l’ONU condamnant les colonies israéliennes n’aurait pas dû surprendre l’Etat juif. « Nous avons été transparents sur notre opinion que le (Conseil de sécurité) devrait faire plus pour soutenir le processus de paix au Proche-Orient », a affirmé samedi matin le ministre néo-zélandais des Affaires étrangères Murray McCully.
La résolution votée vendredi exhorte Israël à « cesser immédiatement et complètement toute activité de colonisation en territoire palestinien occupé, dont Jérusalem-Est », affirmant par ailleurs que les colonies israéliennes « n’ont pas de valeur juridique » et sont « dangereuses pour la viabilité d’une solution à deux Etats ».
Frustrés par des années d’efforts diplomatiques infructueux, les Etats-Unis ont justifié leur abstention par l’impact de la colonisation sur la recherche de la paix au Proche-Orient.
« On ne peut en même temps défendre l’expansion des colonies israéliennes et une solution à deux Etats », comme le fait Benjamin Netanyahu, a déclaré l’ambassadrice américaine aux Nations unies Samantha Power après le vote, accueilli par des applaudissements.
L’administration Obama avait mis son veto à une résolution similaire en 2011. Mais cinq ans plus tard, la position du président sortant, qui entretient des relations notoirement exécrables avec M. Netanyahu, faisait l’objet de nombreuses spéculations sur un possible revirement.
Transition politique aux Etats-Unis
« Quand ils ont eu connaissance du fait que (l’administration Obama) ne mettrait pas son veto à cette résolution, des responsables israéliens ont pris contact avec des membres de l’équipe de transition de M. Trump pour demander l’aide du président élu », a affirmé vendredi à l’AFP un responsable israélien sous couvert d’anonymat.
Cette aide s’est matérialisée par un appel à Abdel Fattah al-Sissi, après lequel l’Egypte avait réclamé le report du vote.
La colonisation est vue comme un frein majeur au processus de paix, les constructions israéliennes étant effectuées sur des terres qui pourraient appartenir à un futur Etat palestinien.
Les Nations unies la considèrent comme illégale au regard du droit international et ont appelé à plusieurs reprises Israël à y mettre fin. Malgré cela, des responsables onusiens ont constaté une augmentation des constructions ces derniers mois.
Le secrétaire général des Nations unies Ban Ki-moon a salué vendredi l’adoption de la résolution 2334, y voyant la preuve qu’une solution à « deux Etats est toujours réalisable ».
Après l’échec des derniers efforts américains pour relancer le processus de paix en avril 2014, une conférence a été convoquée par la France pour le 15 janvier afin de réitérer le soutien de la communauté internationale à cette solution.
« La résolution adoptée aujourd’hui et la conférence internationale de Paris représentent les deux faces de la même médaille, visant à affirmer notre attachement commun à la solution à deux Etats », a déclaré l’ambassadeur français aux Nations unies François Delattre.
Les Etats-Unis avaient jusqu’alors utilisé leur droit de veto trente fois pour bloquer des résolutions concernant Israël et les Palestiniens, selon l’organisation Security Council Report. C’est en 2009, concernant un appel à un cessez-le-feu à Gaza, que les Etats-Unis s’étaient abstenus pour la dernière fois lors d’un vote au Conseil de sécurité.
En 1979, le Conseil de sécurité avait adopté la résolution 446, considérant comme illégale et comme un obstacle à la paix l’établissement de colonies dans les Territoires palestiniens par Israël. A l’époque déjà, les Etats-Unis s’étaient abstenus.
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