Biens mal acquis : le procès de Teodorín Obiang s’ouvre à Paris
Le fils du président de Guinée équatoriale, soupçonné de s’être frauduleusement bâti un patrimoine considérable en France, doit être jugé à partir de lundi à Paris. C’est le premier procès en France dans l’affaire dite des Biens mal acquis.
Le procès de Teodoro Nguema Obiang Mangue dit Teodorín, dont les dates ont été fixées fin octobre, doit s’ouvrir ce lundi 2 janvier et durer jusqu’au 12 janvier. « S’ouvre un procès inédit, sans précédent en Europe et bien au-delà », a souligné William Bourdon, avocat de l’ONG Transparency International. « Le chapitre Obiang va se clôturer », a-il ajouté. Mais d’autres vont s’ouvrir.
Âgé de 47 ans et promu fin juin vice-président de Guinée équatoriale par son père Teodoro Obiang Nguema, Teodorín Obiang est poursuivi devant le tribunal correctionnel de Paris pour blanchiment d’abus de biens sociaux, détournement de fonds publics, abus de confiance et corruption.
La défense demande le report du procès
Teodorín Obiang, qui doit être absent ce lundi demande le report de son procès. Selon l’un de ses avocats, Emmanuel Marsigny, les délais son « beaucoup trop courts » et ne sont pas conformes à la loi, arguant du fait que l’accusé a déclaré son adresse à Malabo, la capitale.
Il demande à pouvoir « bénéficier du temps raisonnable pour pouvoir organiser effectivement sa défense », a souligné Me Marsigny, qui envisage de faire citer plusieurs témoins, dont certains résident à l’étranger. Selon l’avocat, Teodorín Obiang « a toujours dit qu’il a[vait] gagné légalement son argent dans son pays », et est « innocent des faits qu’on lui reproche ».
Un patrimoine considérable
Le patrimoine de Teodorín Obiang en France, mis à jour par les enquêteurs, est considérable : immeuble avenue Foch, dans l’un des quartiers les plus huppés de Paris, dont la valeur est estimée à 107 millions d’euros, voitures de luxe et de sport.
Selon les juges d’instruction, il se serait constitué ce patrimoine alors qu’il était ministre de l’Agriculture et des Forêt. Près de 110 millions d’euros provenant du Trésor public de Guinée équatoriale seraient ainsi venus créditer son compte personnel entre 2004 et 2011.
Quand il est à Paris, le fils du président équato-guinéen dépenserait des sommes astronomiques chez les couturiers de l’avenue Montaigne. Dans ses appartements de l’avenue Foch, les robinets seraient recouverts de feuilles d’or, et le maître des lieux disposerait d’un hammam, d’une salle de sport, d’une discothèque, d’un salon de coiffure, d’une salle de cinéma.
Des dépenses somptuaires très éloignées du quotidien de la plupart de ses compatriotes : en Guinée équatoriale, petit pays pétrolier d’Afrique centrale, plus de la moitié des habitants vivent sous le seuil de pauvreté.
Pas d’immunité pour Teodorín
Pour échapper à la justice, Teodorín Obiang a multiplié les voies de recours. Mis en examen en 2014, il a essayé en vain de faire annuler les poursuites à son encontre, invoquant son statut de deuxième vice-président de Guinée équatoriale. Ce titre, selon lui, devait lui octroyer une immunité.
Une demande rejetée par la Cour de cassation qui avait estimé dans son arrêt rendu en décembre 2015 que les faits reprochés avaient été commis à « des fins personnelles », relevant de sa vie privée et donc détachables des fonctions étatiques protégées par la coutume internationale.
Récemment, il a aussi, sans plus de succès, demandé à la Cour internationale de Justice (CIJ) de La Haye, le plus haut organe judiciaire de l’ONU, que soit mis fin aux procédures engagées en France.
La justice française enquête par ailleurs sur les patrimoines bâtis en France par les familles de plusieurs autres dirigeants africains, celle de Denis Sassou Nguesso (Congo), d’Omar Bongo (Gabon) ou encore du président centrafricain déchu François Bozizé.
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