Tunisie : Hamma Hammami, gentleman révolutionnaire
Issu de la gauche radicale tunisienne, le porte-parole du Front populaire a su se recentrer pour rassurer.
Porte-drapeau d’une gauche tunisienne défaite et déboussolée, Hamma Hammami, 62 ans, défend les couleurs de la Jabha Chaabiya (le Front populaire) avec l’ambition de faire mieux que de la figuration. Conforté par le résultat des législatives du 26 octobre, qui ont hissé son parti en quatrième position dans la nouvelle Assemblée avec 15 sièges, l’ancien enfant terrible de la gauche radicale a opéré un spectaculaire recentrage et séduit maintenant bien au-delà de sa famille politique. Ses admirateurs le décrivent comme un possible "Lula tunisien".
Militant intrépide, qui a consacré toute sa vie à la lutte révolutionnaire, "Hamma" est aussi un mari exemplaire, père attentionné de ses trois filles. Avec sa femme, l’avocate Radhia Nasraoui, ils forment un couple moderne, rassurant. Deux images a priori antagonistes qu’il prend soin de cultiver à chacune de ses apparitions médiatiques et qui constituent le ressort profond de sa popularité.
Plus de dix années en détention
Arrêté une première fois en 1972, à l’âge de 20 ans, Hamma Hammami a passé au total plus de dix années en détention, et presque autant dans la clandestinité. Sauvagement torturé, il garde les séquelles des mauvais traitements endurés dans les geôles. Enfermé dans le pavillon des condamnés à morts – un "honneur" alors réservé aux détenus politiques -, il a vu partir pour la potence plusieurs de ses camarades d’infortune.
Mais de cela, il dit ne garder aucune rancoeur. Il a enfoncé le clou en affirmant ce mois-ci à la télévision que ceux qui prétendent à la responsabilité suprême alors qu’ils se laissent aveugler par leur soif de vengeance risquent de porter préjudice à l’État et de nuire au peuple. Une allusion limpide aux dérapages de la campagne de l’actuel président provisoire, Moncef Marzouki…
Politiquement, Hamma Hammami a su rebondir après sa débâcle électorale d’octobre 2011, lorsque l’extrême gauche, qui s’était présentée en ordre dispersé, n’avait glané qu’une demi-douzaine de sièges. Le sit-in du Bardo, durant l’été 2013, a débouché sur un rapprochement durable entre le Front populaire et Nidaa Tounes. Les deux formations, pourtant aux antipodes l’une de l’autre, sont depuis lors objectivement alliées contre Ennahdha, et leur entente, facilitée par la complicité entre Hammami et Béji Caïd Essebsi, pourrait même survivre aux élections.
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