Abdelwahab Meddeb, Tunisien des Lumières

L’écrivain et universitaire s’est éteint à l’âge de 68 ans. Dans ses ouvrages comme sur les ondes, il défendait un islam éclairé. Hommage.

Abdelwahab Meddeb était poète, penseur et savant, dans la grande tradition arabe. © Vincent Fournier pour J.A.

Abdelwahab Meddeb était poète, penseur et savant, dans la grande tradition arabe. © Vincent Fournier pour J.A.

Fawzia Zouria

Publié le 13 novembre 2014 Lecture : 2 minutes.

"Transmetteur des merveilles de l’islam", comme il aimait à se définir, adversaire farouche des obscurantistes tout autant que des islamophobes, à qui il opposait sa "double généalogie islamo-européenne", l’écrivain et universitaire tunisien Abdelwahab Meddeb s’est éteint dans la nuit du 5 au 6 novembre, à Paris.

Né en 1946 dans une famille de théologiens, venu en France afin de poursuivre des études de lettres et d’histoire de l’art à la Sorbonne, il enseigne la littérature et le soufisme, assure la direction éditoriale des Éditions Sindbad et fonde, en 1995, la revue Dédale. Il écrira une trentaine de livres, entre romans, essais et traductions, et son oeuvre lui vaudra d’être considéré comme le Voltaire musulman, et le adib oriental, lettré à la fois poète, penseur et savant dont s’enorgueillit la tradition arabe.

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La sortie de son essai La Maladie de l’islam (2002) le propulse sur le devant de la scène. Il intervient sur les différentes lectures du Coran et ne manque pas une occasion de pourfendre les exégètes rétrogrades. Sur les ondes de France Culture, dans son émission hebdomadaire, il met en miroir tradition et modernité, Orient et Occident, islam et Europe. Il bouscule les préjugés sur la religion de Mohammed et reproche aux Occidentaux de l’assimiler à l’islamisme.

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Mais il n’use d’aucun compromis envers ses coreligionnaires, dénonçant "la vision fasciste" des courants salafistes. Sans jamais craindre la foudre des barbus ni hésiter à se confronter sur les plateaux de télévision à un Tariq Ramadan décidé à le faire passer pour un "traître à la nation arabe".

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Prises de parole en faveur des courants progressistes

Tunisien d’origine, Abdelwahab Meddeb l’était aussi de coeur. Depuis la révolution, on ne comptait plus ses prises de parole en faveur des courants progressistes. Quelques jours avant sa mort, il donnait même des consignes de vote à ses compatriotes : "Nous sommes devant le choix entre une société ouverte, dynamique, adaptée aux moeurs de notre siècle et une société close, régressive, archaïque." Meddeb aura résumé par ces mots le dilemme actuel du monde musulman. Mais il n’aura pas eu le temps d’achever son "contre-prêche" laïque. Puissent les vivants retenir ses dernières paroles en guise de testament pour les générations futures !

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