Tchad : le verdict du procès en appel d’Hissène Habré attendu le 27 avril
Jugé en appel pour crimes contre l’Humanité, l’ancien chef d’État tchadien Hissène Habré sera fixé sur son sort le 27 avril 2016, date à laquelle le tribunal spécial rendra son verdict.
C’est du moins ce qu’a déclaré le président de la Chambre d’assises d’appel, le magistrat malien Wafi Ougadèye, après la fin des plaidoiries des parties civiles, puis des avocats commis d’office pour la défense ce jeudi 12 décembre.
Le verdict sera définitif. En cas de condamnation, Hissène Habré, 74 ans, purgera sa peine au Sénégal ou dans un autre pays de l’Union africaine (UA).
Il avait été condamné le 30 mai 2016 à la détention à perpétuité pour crimes de guerre, crimes contre l’Humanité, tortures et viols, par les Chambres africaines extraordinaires (CAE), créées en vertu d’un accord entre l’UA et le Sénégal, où il s’était réfugié après avoir été renversé en décembre 1990 par l’actuel président tchadien Idriss Déby Itno.
20 millions de F CFA par victime
Hissène Habré a ensuite été condamné en juillet 2016 à verser jusqu’à 20 millions de francs CFA (plus de 30 000 euros) à chaque victime. Une commission d’enquête tchadienne estime le bilan de la répression sous son régime à quelque 40 000 morts.
Face à son refus, tout au long du procès en première instance qui s’était ouvert le 20 juillet 2015, de s’exprimer ou d’être représenté devant une juridiction qu’il récuse, la Cour avait désigné trois avocats commis d’office pour assurer sa défense. Ce sont eux qui ont fait appel, et non les conseils désignés par l’accusé qui, selon ses instructions, ont boycotté les débats.
Durant les audiences, il a été démontré « l’implacabilité de ce dossier », estime Assane Dioma Ndiaye, un avocat des parties civiles, lesquelles réclament la confirmation de la condamnation.
Vers un aménagement de peine ?
Alain Werner, autre avocat des parties civiles, regrette une déclaration du ministre sénégalais de la Justice, Sidiki Kaba, au lendemain du jugement rendu en mai. Il évoquait alors une possibilité d’aménagement de peine ou de grâce présidentielle, quand le verdict serait définitif.
« Nous avons été choqués par ces propos », qui ont eu un « effet dévastateur sur nos clients », a déclaré à l’audience Me Werner, prévenant que « ce serait un cataclysme » tant pour les victimes que pour la justice. Les obligations internationales du Sénégal interdisent l’octroi d’une grâce présidentielle à Hissène Habré, selon lui. « Nous avons demandé [à la Cour] que cela soit dûment noté dans sa décision. »
La condamnation doit être « annulée », « invalidée », en raison « d’accumulation » et de « répétitions d’erreurs de fait qui affectent très gravement la validité de la décision de première instance », a répliqué un des avocats de la défense, Mounir Balal.
Viols : des preuves « très solides »
Un autre, Mbaye Sène, conteste pour sa part les viols dont le président déchu a été reconnu coupable. Selon lui, la Cour d’appel doit « prononcer l’acquittement de Hissène Habré parce que le crime de viol n’existe pas ».
Au contraire, selon le juriste américain Reed Brody, qui travaille avec les victimes depuis 1999, « la condamnation a été faite sur la base de preuves très solides ». « Je vois difficilement la Cour d’appel invalider toutes ces preuves, mais la tâche est de voir si Hissène Habré a eu un procès équitable et dans les normes », estime-t-il.
Le Sénégalais Abdourahmane Guèye, ex-vendeur de bijoux au Tchad, où il a été détenu par le régime Habré, a fait part à l’AFP d’un sentiment mitigé, en attendant le 27 avril. « Quand la cour aura délibéré, c’est là qu’on verra si nous, les victimes, serons pleinement satisfaites ou pas ».
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